Sylvain Vigier, Entrée libre, Sherbrooke, mars 2020
Depuis le temps que le maire Steve Lussier se fait reprocher son manque de leadership, on peut dire qu’il a montré de quel type de propositions il était capable lors de la dernière rencontre de l’Union des municipalités du Québec. En effet, le maire de Sherbrooke compte proposer au Directeur général des élections du Québec de limiter le nombre de pancartes électorales affichées par les candidats et candidates lors de la période électorale, ainsi que de définir et limiter les lieux où ces pancartes pourront être affichées. Cette idée a germé dans la tête de M. Lussier car « nous avons des problèmes avec nos centres de récupération, avec nos matières résiduelles » et que pour remédier à ce problème il faut « se positionner rapidement par rapport à l’affichage (électoral) ». En plus de sauver nos centres de tri submergés par le matériel électoral, cette mesure entrainerait la diminution de la pollution visuelle créée par les affiches et diminuerait les coûts des campagnes électorales car les dépenses de pancartes n’auraient plus à être remboursées.
Steve Lussier et son conseil municipal sont régulièrement talonnés par la population sur leur manque d’actions et d’initiatives par rapport à l’environnement et la lutte aux changements climatiques. Avec une telle proposition à l’UMQ, on est content de voir combien l’enjeu environnemental a fait du chemin dans la tête du maire de Sherbrooke. Car il apparait évident qu’une fois le nombre de pancartes autorisées par candidat et candidate sera réduit même d’un bon facteur dix, la question des déchets des centres de tri et d’enfouissement sera clairement résolue. Belle job man! C’est avec des idées comme celle-là que l’on sent que le monde avance. Et finalement, une telle mesure n’est pas faite sur le dos des citoyens, car qui se préoccupe vraiment de voir la tête ou de lire le slogan de ceux et celles qui se proposent de nous représenter chaque 4 ans? Une bonne chose de moins à penser, et on pourra même avoir des élections sans même remarquer qu’il y en avait.
Pourtant, on aimerait ça une belle proposition qui diminue la quantité de déchets que l’on produit quotidiennement et contre la pollution visuelle. Parce que les centres de tri, ils ont bien plus à faire tous les jours aux plastiques d’emballage des légumes frais, de la viande et des bouteilles en verre qu’au dernier tract du Parti québécois pour promouvoir sa course à la chefferie et réenchanter l’idée d’avoir un pays. Parce que la pollution visuelle, ça n’est pas tous les 4 ans qu’on la voit plantée en haut d’un poteau de téléphone ou d’un lampadaire. La pollution visuelle c’est tous les jours de l’année sur la rue King et le boulevard Bourque. La saturation des centres de tri c’est la somme de tous les produits électroniques obsolètes dont on se débarrasse car non réparables ou simplement rendus inutiles car un autre objet fait trois fois plus de job que le précédent d’il y a moins de 5 ans.
La pollution visuelle c’est le M jaune, arrondi, lumineux, reconnaissable entre mille, qui trône en haut de la rue King Est et qui modèle le panorama de Sherbrooke. La pollution visuelle ce sont les affiches électroniques dans les nouveaux abribus, ce sont les bus eux-mêmes repeints intégralement aux couleurs, logos et slogan de la bannière qui a pu se l’offrir. La saturation des centres de tri, c’est la publicité pour plus de consommation toutes les 15 minutes sur les télés et radios privées, ou à chaque arrêt de jeu dans une game du Canadien de Montréal.
Si on n’a pas besoin de voir la tête du candidat ou de la candidate pour choisir qui nous élirons, on ne devrait pas avoir besoin de voir imprimé en 4 x 4 un burger fumant pour réaliser qu’on a faim. Décoloniser nos esprits de toute la pollution visuelle et sonore qui chaque jour nous rappelle de consommer c’est aussi un moyen de faire des choix politiques éclairés. Mais c’est sûr que c’est une proposition plus ambitieuse que de s’attaquer aux pancartes électorales.