Photo : Mathieu Gosselin

Le scandale et la honte ont une cathédrale

Gilles Le Chasseur, Le Mouton NOIR, Rimouski, le 25 janvier 2020

Le 28 novembre dernier marquait le cinquième anniversaire de la fermeture de la cathédrale Saint-Germain de Rimouski pour des motifs non fondés. La bâtisse est toujours debout et aucune pierre n’est tombée. Tous les moyens ont été pris par les diocésains, individuellement ou par un regroupement de sauvegarde, pour que l’église soit rouverte et que des travaux normaux d’entretien soient effectués. Les marguilliers ont tout fait et font tout, par leurs propres moyens, à cette fin. Ils n’ont aucun revenu d’exploitation, l’évêque s’étant arrogé le droit de retirer tout bien et avoir de la fabrique et de les virer à l’évêché et à la paroisse de la Bienheureuse-Élisabeth-Turgeon, nouvelle paroisse érigée en catimini le 19 avril 2018. De toute évidence, cette opération visait à décourager les marguilliers et à se débarrasser de la cathédrale.

 

L’histoire se répète

Il y a plus de deux mille ans, tout comme Socrate, un philosophe galiléen nommé Jésus, trop dérangeant pour le pouvoir religieux, fut accusé par le grand prêtre du Temple de Jérusalem et confié au bras séculier pour être jugé et éventuellement condamné. Denis Grondin, le grand prêtre de l’Église de Rimouski, poursuit les marguilliers, leur reprochant d’avoir failli à leur tâche et demande à la Cour supérieure, en date du 17 avril 2019, de trancher.

Depuis cinq ans, l’évêque et sa curie utilisent tous les stratagèmes pour laisser la situation péricliter en poursuivant des objectifs non avoués. Qu’il s’agisse des tentatives d’annuler l’élection des marguilliers ou de leur surveillance étroite par un sbire de l’évêché, d’une stratégie bidon d’appel de projets pour la transformation de la cathédrale à l’encontre de la volonté populaire exprimée par le sondage Léger, de l’inutile pseudo-médiation en vase clos de Monseigneur Marc Pelchat, jusqu’à la récente nomination d’un chargé de projet dont on ignore les réalisations dans ce domaine et qui agit dans l’ombre, l’évêché dépense à satiété l’argent des diocésains pour parvenir à ses fins, alors qu’un minimum de transparence et de bonne volonté aurait pu dès le début éviter ce gâchis. Je suis scandalisé.

 

Apostasie

Je n’attends plus rien de l’Église. Son histoire est farcie de scandales, d’abus de pouvoir, de crimes de toute nature. Aujourd’hui, c’est la même chose : une dictature théocratique dont les dirigeants sont nommés (non élus) par des jeux de coulisses, un favoritisme aux diverses saveurs et des intrigues de palais. L’Église n’a aucun respect pour la démocratie dans l’exercice de son pouvoir, qu’elle prétend tenir de Dieu et qu’elle fait reposer sur la tradition, des coutumes dépassées et sur l’usage abusif de la désuète Loi sur les fabriques.

Cette institution misogyne a toujours déconsidéré et exploité les femmes. À travers son clergé et ses missionnaires, elle a maltraité les enfants autochtones et inuits, elle a abusé et abuse sexuellement des mineurs. Cette institution à la morale sexuelle obsessionnelle et discriminatoire refuse le mariage des prêtres et l’ordination sacerdotale des femmes.

Cette institution ne paie aucun impôt ni taxes et profite de tous les avantages et services de la société civile. Ses dirigeants, tout comme les familles royales, vivent en princes dans de somptueux évêchés ou palais cardinalices, soignés aux petits oignons, se promènent d’un pays à l’autre grâce aux quêtes, à la capitation, aux legs, aux intérêts de placements et à toutes sortes de procédés frauduleux que plusieurs auteurs qualifient de mafieux. Cette institution faisait dire à Marx qu’elle est l’opium du peuple. Je suis scandalisé.

Pour ces motifs, entre autres, je ne me réclame plus de cette institution. On m’y a fait entrer sans mon consentement dès ma naissance. On m’a fait chanter d’autorité dans la cathédrale, lors de la communion solennelle de mai 1952 : « J’engageai ma promesse au baptême, mais pour moi d’autres firent serment ». Aujourd’hui, je me désengage librement. J’adresserai à Monseigneur Denis Grondin, évêque de Rimouski, dans les jours qui viennent, mon acte d’apostasie, afin de rayer mon nom du registre des baptêmes de la paroisse mère Saint-Germain. À compter de maintenant, je ne me considère plus membre de cette scandaleuse institution. Je ne suis pas le premier à utiliser cette procédure, pour demeurer en conformité avec mes convictions et mes valeurs profondes, et ne serai sûrement pas le dernier. Le message de Jésus, que d’autres avaient scandé avant lui, se résume pour l’essentiel à « Aimez-vous les uns les autres ». Ce message demeure fondamental pour l’harmonie de l’humanité. Ce qui fait défaut, ce sont ses messagers, dont l’Église catholique romaine. Le traitement que l’évêque et sa curie ont accordé à la cathédrale m’a enlevé mon reste de foi et d’espérance en cette église.

 

Engagement

Cela étant, par respect pour les croyants et pratiquants catholiques de Rimouski, par respect pour la protection et la pérennité de notre patrimoine religieux, je souhaite ardemment la réouverture prochaine de la cathédrale pour le culte et la culture, comme le veut la population. Je continuerai à soutenir et à encourager tout mouvement œuvrant en ce sens, dans la transparence et l’honnêteté.