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Yvan Gaudreault : Raconter ses passions

Stéphanie Dupuis, Journaldesvoisins.com, Montréal, septembre 2019

Si jamais votre chemin croise celui d’Yvan Gaudreault, vous serez non seulement immédiatement séduit par son bonheur contagieux, mais aussi hypnotisé par toutes les histoires qu’il a à raconter. Rencontre avec cet homme de toutes les passions, de la radiocommunication à la pratique artistique.

À peine quelques pas entamés sur le parvis de l’appartement d’Yvan Gaudreault que, déjà, on comprend qu’on a affaire à tout un personnage! Et pas n’importe lequel    : celui d’un homme de 75 ans qui, depuis sa retraite d’un métier cartésien, a décidé de bifurquer à 180 degrés vers les projets artistiques. Mais avant de faire ce virage, M. Gaudreault a eu une belle carrière bien remplie.

 

Une carrière inattendue

Au primaire et à l’école secondaire, Yvan Gaudreault était loin d’être un premier de classe. Le cumul des échecs l’a poussé à décrocher de l’école pour s’enrôler dans les Forces armées canadiennes à 17 ans. Il n’aimait toutefois pas le régime autoritaire auquel il était confronté au quotidien dans son engagement militaire.

À sa sortie de l’armée, il se sent interpellé par une publicité dans le journal portant sur une formation en radiocommunications. En 1967, il retourne aux études pour compléter ce certificat. Peu après, il est envoyé à Clyde River, au Nunavut.

«   C’était un secteur très isolé comprenant huit personnes. Il n’y avait aucune communication extérieure, à l’exception de la météo. J’ai passé un an là-bas. J’étouffais   », confie-t-il. Pour combattre l’ennui, il organisait des ateliers pour les enfants inuits. Mais alors que la tension était devenue insoutenable à son travail, la vie avait d’autres plans pour lui : un grand bateau venant approvisionner les communautés avoisinantes faisait son arrivée.

« J’ai vu le bateau au loin et j’étais émerveillé. Il fallait que j’en voie l’intérieur. Ma sociabilité m’a servie. J’ai demandé au commandant de le visiter, et il a accepté! », raconte-t-il. Le coup de cœur est immédiat. Mais avant tout, Yvan Gaudreault souhaitait plus que tout quitter Clyde River.

Il devient entre temps coordinateur du contrôle maritime et aérien à l’aéroport de Québec. Mais sa tête est ailleurs. En effectuant des recherches sur le domaine maritime, M. Gaudreault constate qu’il a besoin d’une licence internationale en télécommunications aux études supérieures pour arriver à ses fins. Il quitte son emploi, se motive et complète sa scolarité, cette fois-ci en tant que premier de classe. Une belle revanche pour un ex-décrocheur.

Ses efforts portent fruit : la Garde côtière du Canada lui offre un emploi sur un brise-glace en hiver pour aller ravitailler l’Arctique. Après quelques années en service, son chemin croise à nouveau Clyde River. Bien  que  ce  métier  le  comblait,  ses  absences répétées, soit huit mois par année, l’ont forcé à retourner travailler à l’Aéroport de Québec.  « J’ai appliqué à un poste pour lequel j’étais sous-qualifié. Je me suis lancé, et j’ai obtenu le poste. J’ai passé 25 ans de ma vie là à travailler comme inspecteur du contrôle qualité du matériel », explique-t-il.

 

Quand l’art cogne à la porte

Le 2 juin 2004, Yvan Gaudreault prend sa retraite. Il achète un camion jaune, et il fait la traversée du Canada et des États-Unis. C’est là que l’art commence à s’immiscer dans sa vie. « Je me suis mis à écrire sur mon année d’isolement à Clyde River. Je correspondais avec de la parenté, d’anciens collègues et des amis pour partager mes écrits, mes avancements. Je ne connaissais pas la technique. C’était vraiment intuitif. Ça venait du dedans », indique-t-il, en tapant sur son cœur.

Yvan Gaudreault a dû apprendre à faire abstraction de son métier de technicien pour aller vers le créatif. Sculptures, instruments de musique artisanaux, photographies, manuscrits, vidéos, vêtements… Pensez à une forme d’art, il la maîtrise certainement. Dans son appartement, chaque clignement des yeux révèle une nouvelle pièce d’art de son cru. Celui qui réside dans Ahuntsic-Cartier-ville depuis 22 ans s’est aussi lancé dans l’aventure YouTube. Il filme ses propres capsules Do it yourself (DIY), ou faites-le vous-même, portant sur l’artisanat.

Le raconteur

Si l’art le rend certainement des plus actifs, une autre activité meuble ses semaines : l’écoute.  « Je me sentais gâté dans ma vie. J’avais l’impression de ne rien faire pour les autres », souligne-t-il. Trois fois par semaine depuis septembre, Yvan Gaudreault se rend à l’hôpital Fleury pour donner au suivant. Il passe chambre par chambre voir des patients et discuter avec eux. Il trouve un sujet qui les intéresse, leur donne confiance en eux et répand de la joie. « Je fais du bien aux gens et je leur apporte une présence amicale que j’aime », indique-t-il.

Et comme il ne fait pas les choses à moitié, il met à profit sa plume et il écrit de courts récits pour les gens. Ces petites histoires, il en a fait un livre : La danse du cœur. Alors qu’il vient de raconter le récit de sa propre vie, il s’apprête à écrire d’autres lignes à travers une nouvelle aventure.

Ces jours-ci, Yvan Gaudreault est dans son camion en route vers la Californie pour aller visiter son fils.