Portrait d’une femme engagée reconnue pour sa bonté et sa générosité.

L’Accueil Bonneau tatoué sur le cœur

Yvon Massicote, camelot métro Université-de-Montréal, L’Itinéraire, Montréal, le 15 juin 2019

Les démunis sont nombreux à avoir bénéficié des actions de sœur Nicole Fournier, directrice de l’Accueil Bonneau pendant 21 ans. Portrait d’une femme engagée reconnue pour sa bonté et sa générosité.

Sœur Nicole Fournier est née en 1941, dans le village de Saint- André-d’Argenteuil. Elle a fait des études à l’Université de Montréal, à l’Université du Québec à Montréal, de même qu’à l’Institut de pastorale de Montréal. Elle a fréquenté l’école normale des Sœurs de la Charité de Montréal, mieux connue sous le nom des « Sœurs grises », puis elle se joint à la congrégation en 1959. Fondée en 1737 par Marguerite d’Youville, les Sœurs grises de Montréal ont comme mission d’apporter soins, nourriture et réconfort au plus grand nombre possible.

Dans les années 1960, sœur Nicole est institutrice au Québec pendant sept ans. Plus tard, en 1971, elle est appelée à enseigner au collège Mazenod de Ngaoundéré au nord du Cameroun. Missionnaire dans ce pays pendant près de 14 ans, elle apprend à mieux connaître la culture et les mœurs de ce peuple africain.

 

Du Cameroun à l’Accueil Bonneau

Après avoir terminé son mandat, elle revient dans sa terre natale au Québec en 1984. On lui demande de donner un coup de main bénévole à la cafétéria de l’Accueil Bonneau, ce qu’elle accepte. Dévouée, elle devient rapidement responsable des bénévoles. L’année suivante, constatant la ferveur de son implication, on la nomme directrice générale de l’organisme qui est une ressource reconnue pour ses interventions sociales auprès de la population itinérante de Montréal.

Elle dirigera l’organisme de 1985 à 2006 : un mandat de 21 ans. Sous sa gouverne, l’Accueil Bonneau grandit et se développe. Audacieuse et visionnaire, elle se préoccupe beaucoup de la réinsertion sociale des itinérants et des gens vivant des situations de précarité à la rue. Les logements sociaux et l’accompagnement psychosocial seront son fer de lance.

 

L’explosion

Le 9 juin 1998, le bris accidentel d’une conduite de gaz naturel provoque une explosion qui détruit une bonne partie des locaux de l’Accueil Bonneau. La déflagration fait trois victimes : deux bénévoles (Marie-Liliane Lavallée et Céline Corriveau) et une religieuse

(Sœur Claire Ménard). Une dizaine de personnes sont également blessées, dont trois grièvement. Le premier ministre Lucien Bouchard se rend sur place dans les heures suivant le drame. D’une main de maître, Sœur Nicole se démène afin de trouver les fonds pour la reconstruction de cet organisme montréalais voué à la réinsertion sociale. Grâce à des dons atteignant 3,5 M $, l’Accueil Bonneau ouvre à nouveau ses portes quatre mois seulement après l’explosion.

L’année suivante, elle reçoit le Prix d’humanisme de l’Association des médecins psychiatres du Québec pour son extraordinaire dévouement, puis le Prix du Gouverneur général du Canada pour l’entraide en 2005.

 

Toujours active

Lorsqu’elle quitte la direction de l’Accueil Bonneau en 2006, quatre maisons d’hébergement ont vu le jour, dont la dernière, construite en 2004-2005 au coût de 5 M $, contient une salle de jour, un lieu de répit situé à la campagne ainsi que des services de repas, d’habillement, de pastorale et d’accompagnement psychosocial. Sœur Nicole devient alors secrétaire générale de la congrégation des Sœurs grises. Elle est également membre du comité de développement de Moisson Montréal ainsi que des conseils d’administration de Renaissance Montréal, des œuvres de Saint- Jacques et de Radio Ville-Marie.

Incarnant la bonté et la générosité, sœur Nicole reçoit la Médaille de Chevalière de l’Ordre national du Québec en 2006. Trois ans plus tard, on lui décerne le titre de Grande Montréalaise dans la catégorie sociale, et enfin, on la nomme Commandeure de l’Ordre de Montréal en 2016.

Depuis 2017, sœur Nicole donne des conférences en remplissant une double mission, soit celle de présenter un portrait de femme engagée, déterminée et active tout en partageant ses connaissances d’une communauté religieuse impliquée dans son milieu. En effet, sœur Nicole Fournier ne parle pas seulement de son parcours exemplaire, elle profite de l’occasion pour faire connaître les œuvres de la congrégation des Sœurs de la Charité de Montréal, dont elle fait partie depuis 60 ans.

En 2018, afin de souligner les 20 ans de la réouverture de l’Accueil Bonneau, un journaliste du Journal Métro lui a demandé si la lutte à l’itinérance était un combat sans fin. Voici ce qu’elle a répondu : « On n’arrivera pas à vaincre la pauvreté, mais la solution, elle est dans la solidarité. Si dans 30 ans, on est encore là à donner à manger et à aider, ce ne sera pas un constat d’échec. […]Le rôle des organismes communautaires, c’est d’alerter, d’attirer l’attention et de soutenir les intérêts de ces gens. » Que dire de plus ?