Jean-Patrice Desjardins : Un parcours peu commun

Michel-Pierre Sarrazin, Ski-se-Dit, Val-David, avril 2019

Se tenir debout près de Jean-Patrice peut donner l’impression de faire partie des Gaulois d’Astérix ou, pire encore, d’être un centurion romain sur le point de manger une volée. Car notre homme, aussi aimable qu’il soit, a la corpulence d’Obélix, avec ses six pieds quatre pouces originaires d’Amqui. Et pour ajouter à sa présence indéniablement remarquable, JP détient un diplôme en éthique, il est musicien, compositeur et père de trois enfants.

Bien connu dans les Laurentides, où il a posé sa guitare en 1996 avec sa compagne Magalie Jutras, elle aussi experte en éthique et aujourd’hui conseillère en la matière au CISS des Laurentides, Jean-Patrice Desjardins a travaillé comme journaliste dans plusieurs des hebdos de la région et consacré de nombreuses et fructueuses années à la rédaction du journal Ski-se-Dit. Il en est aujourd’hui le webmestre.

Et puis, à 48 ans à peine, notre sympathique collègue a pris la décision, l’automne dernier, de suspendre sa carte de reporter au clou, pour raisons de santé. Ceux qui le connaissent un brin savent que le journalisme coule dans ses veines avec la même intensité que son amour du hockey et de la musique, cette dernière passion qu’il partage toujours avec ses enfants, la belle Tanaïs et Alexi, tous deux dans la vingtaine, et Loïc, 14 ans. D’ailleurs, avec Loïc, il pratique un nouveau sport d’intérieur : la fabrication de guitares électriques, peintes à la main.

Jean-Patrice est la première personne que j’ai eu le plaisir de rencontrer quand, il y a de ça maintenant une quinzaine d’années, le CA du journal Ski-se-Dit m’a demandé de prendre les rênes du journal communautaire de Val-David. C’est lui qui m’a montré dès le départ qu’un journal communautaire souvent plus efficace que les médias régionaux ou nationaux, par le sérieux avec lequel il traitait déjà la nouvelle locale. À l’époque, nous étions encore loin des réseaux sociaux et le virage internet s’affirmait beaucoup plus timidement qu’aujourd’hui. Mais tout cela a changé. « Il est plus important que jamais, aujourd’hui, me confie Jean-Patrice, que le journaliste se questionne sur la valeur, sur l’origine de l’information qu’il reçoit et sur la pertinence de parler de tel sujet sous l’angle uniquement de l’actualité instantanée. La portée d’une nouvelle, aujourd’hui, par le biais de l’internet ou des réseaux sociaux, est considérable. Le contenu de cette nouvelle, à cause de la rapidité du numérique, peut évoluer plusieurs fois dans une journée. Par exemple, accuser quelqu’un d’agression sexuelle le matin sur le net peut avoir des conséquences dramatiques pour sa vie et sa carrière, même si la nouvelle est démentie l’après-midi ou le soir même. La version originale de la pouvait jouer un rôle d’informateur de son milieu moi qui pratiquais le journalisme indépendant depuis plus de trente ans, que le petit mensuel valdavidois allait prendre tant de place dans ma vie, à mesure que la concentration des médias nationaux allait décapiter petit à petit la presse indépendante.

Même si la presse communautaire est la plus pauvre et l’une des moins bien soutenues par les annonceurs au Québec, elle n’en demeure pas moins le seul véritable pilier de l’information locale, région par région. Elle est regroupée sous l’étiquette de l’AMECQ (Association des médias écrits communautaires du Québec) et elle se tient debout grâce à de nombreux bénévoles qui, comme Jean-Patrice, ont largement contribué à maintenir la rigueur et le professionnalisme de ses membres.

En janvier dernier, les collègues de tous les médias où Jean-Patrice Desjardins a travaillé et quelques amis de toujours ont décidé de créer pour lui un numéro spécial intitulé le Jipi express, histoire de rendre hommage à l’homme, au musicien autant qu’au journaliste engagé qui prenait sa retraite, forcée par les circonstances de sa maladie. Or, au moment de mettre sous presse cette édition du Ski-se- Dit, nous apprenons que de tout nouveaux traitements du cancer ont fait reculer les cellules métastatiques. Et que chez Jean-Patrice, si nous ne parlons pas de guérison, nous pouvons espérer une meilleure santé, des traitements moins pénibles et un net recul de la douleur.

Il n’en fallait pas plus à notre collègue pour qu’il remette le cap sur la curiosité et l’enthousiasme, et pour qu’il s’implique plus que jamais dans la production internet du journal Ski-se-Dit et, parallèlement, dans l’équipe de la Société d’histoire et du patrimoine de Val-David, qui se prépare à fêter le centième anniversaire de fondation du village, en 2021. Mais avant cela, Jean-Patrice a bien l’intention d’aller faire une petite visite à son frère Guillaume, là-bas, à la Réunion, où l’informaticien s’est installé il y a quelques années. Histoire de nous rapporter, peut-être, un reportage exclusif sur ce coin du monde où les géants sympathiques sont toujours les bienvenus.