Danielle Goyette, L’Écho de Compton, avril 2019
Caroline Poulin est travailleuse de rang en Estrie. Elle est là quand un producteur a besoin de parler. De ses problèmes vécus sur la ferme, de son isolement, de son surmenage, de son divorce éprouvant, de violence… Caroline est là, pour écouter, pour aider.
Estrienne pour qui le milieu agricole a toujours fait partie de sa vie, Caroline Poulin est bachelière en travail social et travaille depuis 12 ans au sein du Réseau de la Santé et des Services sociaux de la région. « Le fait d’avoir à la base une bonne connaissance de la réalité du milieu agricole, je peux proposer des solutions adaptées aux besoins des agriculteurs, nous explique-t-elle. J’ai grandi à la campagne, j’ai travaillé à l’entretien de la ferme, je m’occupais, entre autres, des chevaux. Je connais le milieu et j’admire ces gens, car ils travaillent dur. Quand la détresse psychologique s’ajoute à la surcharge de travail déjà présente, ça rend les situations encore plus complexes.»
Un nouveau concept
Une travailleuse de rang œuvre tout comme un travailleur de rue. Ce sont les MRC de l’Estrie et l’UPA qui sont à l’origine de cette initiative après qu’ils aient consulté les producteurs et les agriculteurs à ce sujet. Le stress, les accidents de travail, les longues heures de travail et la versatilité des marchés engendreraient un haut niveau de détresse psychologique chez près de la moitié des producteurs agricoles. « Le concept de travailleur de rang est nouveau.
On est encore à se faire connaître, raconte Caroline. Mais on voit que c’est nécessaire. Le fait de prendre ma voiture, d’aller me promener dans les rangs pour aller rencontrer les gens pour jaser avec eux de leur situation, c’est vraiment tout nouveau comme approche. En fait, nous avons plusieurs façons de faire. Les gens peuvent aussi communiquer avec nous. Ce peut être un voisin, un ami, un individu en contact avec un agriculteur qui va nous appeler et nous dire ‘‘Je suis allée chez un tel ce matin, il feel vraiment pas, pensez-vous que vous pourriez lui donner un coup de fil ? Je suis vraiment inquiet pour lui.’’ « À ce moment-là, je vais prendre contact avec cette personne, je n’ai pas besoin de dire qui m’en a parlé si les gens préfèrent garder l’anonymat, et souvent, à partir du moment où j’ai fait les premiers pas, la personne en détresse aura tendance à s’ouvrir, à partager avec moi ce qu’elle vit de difficile. »
Savoir écouter pour pouvoir aider
Basée à Sherbrooke, l’intervenante se déplace volontiers pour rencontrer toute personne dans le besoin. Il existe également une ligne téléphonique accessible 24 heures par jour. Avec une approche humaine et attentive, Caroline prend le temps d’écouter les gens et d’évaluer leur situation avec eux, de les soutenir dans certaines situations difficiles ou lors d’étapes complexes de leur cheminement. Elle peut leur fournir aussi les ressources disponibles dont ils peuvent avoir besoin, que ce soit dans le réseau communautaire environnant ou dans le réseau public de la santé.
« Parfois, je peux ne parler qu’une seule fois avec un producteur pendant deux heures au téléphone et il peut aller mieux juste parce qu’il a pu parler avec quelqu’un de neutre, parce qu’il a été écouté de façon objective et qu’il s’est senti en confiance. D’autres vont préférer me rencontrer de façon régulière pendant un certain temps pour avoir un suivi. Il faut savoir que les problèmes de santé mentale, quand ça s’installe, ça peut jouer des tours. Et plus on est isolé, plus ça peut déraper. Les gens se disent souvent ‘‘ ça va passer ’’, mais ça ne passe pas toujours tout seul. Le fait de ne plus être seul avec un problème ou une difficulté, de pouvoir en parler avec quelqu’un de neutre, ça peut faire toute la différence, on vient déjà de faire un pas dans la bonne direction. »
Pour joindre Caroline Poulin, contactez l’organisme Au cœur des familles agricoles au 450 768-6995, accessible 24 h par jour, sept jours par semaine.