La foule se défoule

André Chrétien, Le Pont, Palamarolle, avril 2019

Le lundi 11 mars dernier, environ 150 personnes prenaient place au Centre municipal pour assister à l’assemblée mensuelle régulière du conseil municipal. Habituellement, moins de dix citoyens se déplacent pour y assister. Comment donc expliquer cette ruée soudaine, un lundi soir d’hiver, par un temps particulièrement maussade? C’est à cause de la grogne généralisée au sujet de l’augmentation de plus de vingt pour cent de la taxe municipale.

Avis à madame la mairesse et aux conseillers municipaux, si vous voulez une forte présence à vos assemblées, allez « fouiller dans les poches » des citoyens! Dans cette réflexion écrite aujourd’hui, le Journal Le Pont ne prendra pas position en faveur ou contre la décision du conseil d’augmenter l’impôt foncier. Cette hausse soudaine et draconienne a surpris tous les propriétaires qui ont eu un moment de colère à la vue du montant de la facture.

Palmarolle compte 1 600 habitants, plus de la moitié de ceux-ci habitent le village, on forme une « petite ville installée à la campagne». Une petite ville qui a voulu depuis plusieurs années se doter des mêmes services qu’une agglomération de 10 000 âmes. On s’est d’abord doté d’un service d’aqueduc et d’égouts, ce fut une excellente décision qui répondait pleinement à des besoins écologiques, économiques et sociaux.

Grâce à ces nouveaux atouts, le village s’est développé. Il a fallu construire de nouvelles rues, les paver, acheter de la machinerie pour en assurer l’entretien. On a donc dû embaucher du personnel supplémentaire, ouvrir un garage municipal, etc. Quant à posséder ces infrastructures, pourquoi ne pas attirer de nouveaux résidents? Pour cela, il fallait offrir les mêmes avantages et attractions que la ville voisine et les villages environnants.

On s’est donc, encore jusqu’à récemment, loisirs : aréna, salles collectives, terrains de jeux, pistes de ceci et pistes de cela… tout cela grâce à de généreux bénévoles qui ont donné temps et argent et qui, une fois le projet rendu à terme, on a « confié » à la municipalité le soin d’en assumer les coûts d’entretien et de rénovation.

Nous avons aussi notre propre service administratif, cela exige un secrétariat, une direction générale, un inspecteur municipal, une réceptionniste, un service de comptabilité, des gens compétents, sans doute, mais ce sont des salariés qu’il faut rémunérer à temps plein, selon leur formation et leurs attributions.

À cela ajoutons tout le personnel consacré à l’entretien des bâtiments, aux travaux de voirie, à l’organisation des loisirs… N’oublions pas les redevances envers plusieurs ministères, les permis de toutes sortes, notre contribution à la MRC…

Pouvons-nous continuer à fonctionner selon ce modèle? C’est le seul que nous connaissons, c’est le modèle que nous avons tous accepté et celui que nous n’avons jamais remis en question. Quelle sera donc la solution pour nous éviter de foncer tête première dans le mur si nous continuons sur une telle lancée?

Le conseil municipal que nous avons élu a comme mandat de gérer les services que collectivement nous avons bien voulu nous donner depuis longtemps. Nous avons aussi accepté d’en ajouter d’autres, d’année en année, ce qui implique que nous devons en assumer le coût. C’est donc tous ensemble que nous devrons évaluer la pertinence et le besoin de continuer à nous les offrir et les financer.

On garroche facilement nos exigences, nos demandes et nos revendications dans les mains et dans les bras d’une équipe de bénévoles, ou presque, et on exige d’eux une gérance sans faille, on ne suit pas leurs délibérations et, tout à coup, paf! ça nous pète au visage et, alors, on assiste à une séance de « défoulage » collectif. N’allons surtout par parler de mettre fin à certains services ou de renoncer à certains équipements, on assistera à une levée de boucliers, on veut tout garder, peu importe le coût.

Il en est de même quand on parle de fusion, cela provoque une crise d’urticaire, à chaque fois, chez les tenants de l’autonomie et de l’indépendance de leur patelin. On refuse catégoriquement cette option en affirmant dur comme fer qu’il n’y aurait aucun avantage et aucune économie à faire; on se prononce gratuitement sans en connaître les tenants et les aboutissants….

Tous les propriétaires en conviennent, cette dernière facture de taxes était trop salée, elle n’aurait pas dû être envoyée, mais c’est fait. Dites-vous que de rembourser le trop-perçu engendrait de nouvelles dépenses et une somme considérable de travail supplémentaire; ce qui nous serait chargé sur le compte de taxes de l’année prochaine. Peut-être que l’effort que nous faisons cette année permettra de regarnir « notre bas de laine » qui, selon la représentante de la firme comptable, est présentement à sec. Prenez note cependant que madame la mairesse a bien dit que cette hausse de taxes ne sera pas récurrente et que, dès l’an prochain, on corrigera le tir.

Avant de jeter la pierre à ceux que nous avons élus, révisons nos exigences et nos réels besoins et acceptons de vivre selon notre capacité de payer les services que nous nous sommes donnés. Sur Facebook, des critiques fusaient de toutes parts, des accusations et même des remarques grossières… Attention, ne détruisons pas l’espace démocratique qui nous permet encore d’élire et de choisir nos administrateurs municipaux. Une internaute écrivait : « Moi, je vais savoir pour qui ne pas voter aux prochaines élections.» Nous devrions lui répondre : « Peut-être que tu n’auras aucune décision à prendre, parce qu’aucun candidat n’aura le courage de se présenter à l’avenir. »