Jean-Marc Brais, Le Haut-Saint-François, Cookshire-Eaton, le 6 mars 2019
Plus d’une centaine de producteurs forestiers de tout le Québec se sont retrouvés à Sherbrooke lors d’une manifestation visant à défendre leur droit à la mise en marché collective. Ce rassemblement se déroulait en marge des audiences de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec (RMAAQ) auxquelles prenaient part les représentants de ces mêmes producteurs s’opposant à un groupe d’industriels, dont fait partie Domtar.
Plus forts ensemble
Le président de l’Union des producteurs agricoles (UPA), Marcel Groleau, a brièvement résumé le conflit. « Nous sommes des milliers de producteurs qui négocions un même produit dans une même saison. On est tous en même temps sur le marché puis on fait face à quelques acheteurs. Leur pouvoir sur nous est trop grand et la loi a donné aux producteurs agricoles ce pouvoir-là, s’ils le veulent, de négocier collectivement et d’obtenir des prix justes du marché. C’est ce que conteste Domtar et les industriels forestiers. »
On retrouvait sur place plusieurs petits producteurs du Haut-Saint-François pour qui le bois représente un revenu d’appoint. L’acériculteur de La Patrie Jonathan Blais était l’un d’eux. « On a le droit de se donner les outils puis les moyens. On va le faire dans le bois. On veut le partage équitable de la richesse. Ça, c’est toutes les régions puis les petits villages qui vont en profiter. Les capitalistes comme Domtar, ils en ont eu assez d’argent de la collectivité au Québec. C’est nous autres qui les ont tenus debout pendant la crise. »
Les prix de l’industrie
Les producteurs forestiers bénéficient depuis des décennies du droit de se regrouper pour négocier collectivement. C’est ce qui se produit dans la moitié des régions du Québec. Le Syndicat des Producteurs forestiers du Sud du Québec a souhaité étendre ce principe à certains produits de sciage sur son territoire de l’Estrie et de la Montérégie. C’est à ce moment que la compagnie Domtar, le Conseil de l’industrie forestière du Québec et quelques entrepreneurs forestiers se sont opposés.
Lynne Martel-Bégin, productrice forestière de Bury, constate un gel des prix pour ses produits depuis les dix dernières années. Même chose pour le couple formé de Pierre Dubreuil et de Lise Paquette, du côté d’Ascot Corner. Ceux-ci élèvent des vaches à bœuf et exploitent 250 acres de terres forestières. « On fait ça pour le plaisir, mais, en même temps, c’est le fun quand ton bois est vendu puis que tu as de l’argent », d’exprimer Mme Paquette.
Pour André Roy, président du Syndicat des Producteurs forestiers du Sud du Québec, « on fait face à une espèce de monstre très bien organisé qui s’appelle l’industrie forestière et qui veut nous garder dans un état d’asservissement. On veut leur démontrer que la mise en marché collective, c’est aussi important dans le bois que dans n’importe quelle production agricole et qu’on va la défendre jusqu’au bout. »
Les audiences de la RMAAQ se sont étalées sur huit jours à l’hôtel Le Président de Sherbrooke durant le mois de février. D’autres suivront au mois de mai, avant qu’une décision ne soit rendue par la Régie par après.