Marie-Claude Demers

Marie-Claude Demers et l’art du bonheur

Étienne Walravens, Le Tartan, Inverness, février 2019

Visiter la galerie-atelier de Marie-Claude Demers, c’est entrer dans un monde dont on ne sort pas indemne. Sous l’emprise de l’émerveillement devant tant de belles choses, tant de sourires incrustés partout, on en sort fiévreux…de bonheur. La dame aux mains d’or ne cherche qu’une chose, transmettre cette joie de vivre qui l’a inspirée depuis le début.

Ils sont chez nous depuis l’an 2000, Marie-Claude, sculpteure et son conjoint Mario Carrier, souffleur de verre. La beauté du paysage et la renommée d’Inverness dans le domaine artistique les ont décidés à s’installer chez nous. Le couple est arrivé avec deux petites filles qui maintenant volent de leurs propres ailes. Il venait de Drummondville, ville natale de Marie-Claude.

D’aussi loin qu’elle se souvienne, dessiner, modeler des figurines, peindre a toujours été son activité favorite. À 10 ans, encouragée par sa mère, elle participe déjà à des expositions. Remarquée par son talent, elle illustrera des livres pour enfants. Déjà à cette époque, la joie de vivre qui éclaire ses personnages plaît à tout le monde.

La jeune fille veut voir le monde, c’est ainsi qu’elle suivra les cours de cinquième secondaire en Équateur, un bain hispanophone qui contribue à son enrichissement culturel. Revenue au pays quelques années plus tard, elle accèdera au baccalauréat en psychologie.

Entre temps, elle a rencontré Mario. Ils fondent une entreprise de transformation de fruits et légumes avec en parallèle la fabrication de cosmétiques naturels. Leur audace d’innovateurs dans un domaine en démarrage au Centre-du-Québec sera remarquée par un investisseur dans la transformation des canneberges qui les associera à l’essor de son entreprise. Mais le couple est passionné par l’art, Marie-Claude voudrait vivre de la peinture ou de la sculpture, de même que Mario qui a été séduit aux Iles-de-la-Madeleine par l’art du verre soufflé.

Un peu plus à l’aise financièrement. Ils cherchent un beau coin inspirant, ils le trouvent au sommet du chemin Hamilton. D’une maison ordinaire, mais ancienne, ils ont fait un agréable domaine coloré et décoré avec beaucoup de goût. Les ateliers détachés de la maison, un petit poulailler, tous les bâtiments épousent le même style. Beaucoup d’épinettes, d’érables, un grand potager, des arbres et arbustes fruitiers occupent l’espace et aussi le temps des propriétaires.

Nous avons cinq sens pour goûter à la beauté des choses. La bonne cuisine pour apprécier fruits et légumes qu’on vient de récolter, c’est une autre passion du couple. Chacun a sa spécialité culinaire, les confitures et le pain sont pour le cuisinier Mario qui, paraît-il, serait aussi habile devant le fourneau de la cuisine que devant le creuset de verre en fusion.

Reste un autre sens, l’ouïe. La musique, l’aurait-elle laissée indifférente. Non! Et elle parle alors de l’émotion que les cordes pincées de la contrebasse lui font ressentir.

Comme il est écrit dans son catalogue d’artiste, Marie-Claude fait commerce de bonheur. Avec humour, elle avoue que : le bonheur me court après et comme je ne cours pas vite, il me rattrape toujours. Et ce qui est merveilleux, c’est qu’elle traduit dans toutes ses pièces le bonheur de vivre, orné de fantaisie, mais de tellement de profondeur humaine. Il faut s’attarder devant chacun de ses personnages alors qu’elle explique la signification de tous ces détails qu’elle y a mis, ainsi que les circonstances et anecdotes qui ont donné naissance au chef-d’œuvre, pour se délecter du plaisir qu’elle a eu à les concevoir. Sa joie est communicative.

L’art n’est pas élucubration pour autant. Marie-Claude parle avec sincérité des contraintes matérielles et financières qu’impose son métier. Ce n’est pas un passe-temps, c’est une entreprise qui doit susciter les rencontres avec les clients potentiels qui, vu le prix d’un bronze de taille ne convient pas à toutes les bourses. Elle expose dans des galeries et des symposiums, mais surtout, elle garde plusieurs pièces, certaines inachevées dans son atelier où les clients éventuels peuvent choisir. Détail intéressant, notre artiste ne réalise que très rarement une sculpture selon une commande précise, elle compose seule et vous achetez si ça vous plaît.

Ému et séduit, car tout est sourire et fantaisie dans son petit palais de travail, on ne peut que se remémorer la prophétie de l’auteur russe Dostoïevski : C’est la beauté qui sauvera le monde.

Une visite sur Internet : demersbronze.com