Photo : Courtoisie

Le forgeron Sylvain Rondeau

Étienne Walravens, Le Tartan, Inverness, décembre 2018

Vous croyez rencontrer un forgeron fier de son biceps droit, vous tombez sur « un gosseux, patenteux, mais avant tout un conteux ». Inclassable artiste que ce Sylvain Rondeau.

L’allusion à Fred Pellerin n’est pas exagérée, avec cette fierté d’être Québécois, ce plaisir à raconter histoires ou légendes, le goût de faire revivre les ancêtres et leur monde.

Avant d’être l’animateur qu’il est devenu, Sylvain en a fait du chemin, plutôt, il en a pris des chemins, il en a fait des expériences, il a goûté à bien des métiers, a revêtu bien des habits. Oui, il peut forger tous les métaux avec dextérité. Il est même fondeur, il coule des pièces en tout genre, mais sa préférée est la fleur de lys, l’étendard que brandit le fier nationaliste et qui lui a valu de belles rencontres et de solides amitiés.

C’est la construction de l’échangeur Turcot à Saint-Henri dans le sud de Montréal qui a délogé ses parents. La famille s’est retrouvée à Sainte-Marthe près de Saint-Eustache dans ce qui est appelé les Basses-Laurentides. Dès l’adolescence, il se passionne pour l’organisation, la mise en scène et l’animation musicale et lumineuse de fêtes, de réceptions, etc. Pour ajouter une corde à son arc ou plutôt une flèche à son carquois, il crée une école de cirque à Oka. Le personnage de clown l’intéresse, il crée son personnage, le Clown Bavard qui se produira avec un vrai succès durant plusieurs années. De là à la magie, il n’y a pour Sylvain qu’un petit pas : le voilà magicien cette fois. Cet art de l’illusion, il s’en sert toujours avec succès dans ses présentations actuelles. Oui, les doigts savent tenir un marteau de trois livres, mais savent aussi jongler avec des pièces de monnaie pour vous étourdir.

En 2006, c’est à Saint-Jean-Port-Joli, lors d’une sortie à moto (il allait y visiter le musée de la moto, comme par hasard) qu’il rencontre un forgeron qui lui donne la piqûre du fer rouge. Sylvain demeure alors à Sainte-Scholastique dans l’entité de Mirabel. Il aménage une nouvelle Vieille Forge. Il y passe agréablement les journées libres que lui laissent ses contrats d’animateur-disco.

Et puis, il imagine de tout mêler : feu, fer, contes et magie. Les outils de l’artisan du métal, le feu de sa forge, son indispensable compagnon, les objets variés qui y naissent suscitent tant de questions chez ceux qui s’arrêtent chez lui, qu’il imagine en faire une nouvelle façon de vivre : il serait Forgeron-Conteur, un Fier-Forgé et il l’est toujours.

Un exemple de sa vie professionnelle : depuis neuf ans, il installe à Québec lors des fêtes de Nouvelle-France sa forge, version démontable, et il bat le fer. Parfois il apprend en même temps le métier à un jeune, mais pour l’essentiel, il répond aux questions des visiteurs et c’est à ce moment que la verve du « verbomoteur » s’en donne à cœur joie, les réponses s’ornent d’histoires vraies ou fictives, qu’il a gardées en mémoire. Ce n’est pas de l’improvisation, ce sont des récits bien structurés, appris par cœur, mais qui s’accordent toujours avec le métier et la vie rurale des siècles passés. Des histoires, il en a à la pelle et il en compose sans cesse, toujours en rapport avec les outils qu’il a en main. Sa dernière création légendaire a pour titre « les 40 écureuils du curé Labelle ». Imaginez donc le récit! Mais non, vous n’y êtes pas, c’est encore autre chose. Les idées fourmillent dans la tête de l’artiste pour capter l’attention des petits comme des grands. Ses textes sont adaptés à l’âge des auditeurs. Ainsi ses contes ne sont pas pareils s’il se trouve dans une bibliothèque ou une école. De plus, il perfectionne son art oratoire en suivant actuellement encore des cours de communication.

Les festivals l’engagent comme animateur, il y a participé cette année à 19 occasions, c’est en plus des présentations corporatives, inaugurations, tournois de golf et autres festivités auxquelles il apporte son matériel de sonorisation et son talent d’animateur.

Sylvain Rondeau et sa femme Louise Gagné ont choisi de vivre chez nous, car les fonderies lui permettaient de couler des pièces métalliques assez volumineuses sans être obligé de construire lui-même une fonderie, ce que les règlements d’urbanisme interdisaient dans son quartier à Sainte-Scholastique. C’est encore à moto qu’il a découvert le village du bronze.

C’est en 2016 qu’ils sont arrivés et en mai de l’année suivante qu’ils ont emménagé. Un beau projet d’autoconstruction, ils ont aménagé l’intérieur eux-mêmes en réservant tout le sous-sol à un atelier de confection de vitrail, le domaine de Louise. L’année suivante, la forge a été construite en parallèle avec un étonnant bon goût.