Laurent Soumis, L’Itinéraire, Montréal, le 15 août 2018
Elle s’appelle Jo Redwitch ? Oui et non. C’est la vie qui lui a donné ce nom de plume. « J’ai connu un anglophone, raconte-t-elle. Au début, il m’appelait Red pour mes cheveux rouges. Puisqu’il disait que je l’avais ensorcelé, il m’a finalement appelé Redwitch (Sorcière rouge). J’ai décidé de garder ce pseudonyme comme nom de plume. »
Jo est entrée à L’Itinéraire en 2015. Très tôt, elle est devenue membre du conseil d’administration de l’organisme, une expérience qui lui a beaucoup appris. « J’ai compris qu’il y a des professionnels qui en savent plus que moi. J’ai appris à être à l’écoute de ces personnes. Avant, j’étais encore plus rebelle. J’avais de la misère avec l’autorité. Cela a changé ma façon d’être. J’ai plus de contrôle sur mes émotions. Et je ne parle plus pour ne rien dire. »
Depuis un an, Jo est aussi devenue mentor dans l’organisme. « Être mentor, c’est se transmettre des trucs de vente entre camelots mais c’est plus que ça. Ça m’a rapproché des autres camelots comme Mostapha (Métro Édouard-Montpetit) et Annie (Bibliothèque Jacques-Ferron à Longueuil). Quand je donne des conférences, je me sens responsable de donner le meilleur de moi-même car je suis l’image de L’Itinéraire. »
L’écriture reste sa passion. « L’écriture c’est très thérapeutique pour moi ». Il faut dire que Jo est également publiée à l’étranger. En 2016, son reportage sur La justice réparatrice a été traduit en portugais et publié par le magazine de rue Ocas à São Paulo et Rio de Janeiro (Brésil).
L’an dernier, l’entrevue : Conversation avec un pédophile, parue dans l’édition du 15 avril, lui a aussi valu le prix du « Meilleur article société » au gala annuel de L’Itinéraire. Cette année, ce même article est d’ailleurs en nomination dans la catégorie « Meilleure contribution de camelots » au congrès annuel de l’International Network of Street Papers (INSP), le réseau international des journaux de rue. Le gagnant sera connu le 22 août.
« J’ai mis quatre mois pour organiser cette entrevue. J’en suis très fière. Je suis grand-mère d’une petite fille de quatre ans, Amélya. Alors, ce n’était pas du tout évident de discuter avec un pédophile. J’ai dû faire preuve d’une grande ouverture d’esprit. » Jo entend bien continuer à explorer les sujets psychologiques et les relations humaines.
Depuis déjà sept ans, Jo ne consomme plus. Ni alcool, ni cocaïne. Elle fait sa part dans la société. Entre autres, elle donne de son temps comme bénévole à la prison de Bordeaux. « Malgré les séquelles physiques et psychologiques de violences antérieures, je persévère à devenir une meilleure personne, et cela, c’est grâce à L’Itinéraire. »