Vincent Di Candido, Échos Montréal, Montréal, juillet 2018
Les fervents adeptes du monde numérique laissaient croire que ce moyen de communication allait faire disparaitre le papier, incluant le livre. En effet la tablette, les téléphones intelligents et les ordinateurs connectés à internet ont pris une place prédominante chez les gens et particulièrement les jeunes, continuellement rivés sur le petit écran mais souvent sans s’assurer de la fiabilité des nouvelles qu’ils consultent et qui peuvent colporter des allégations diffamatoires.
C’est d’ailleurs ce peu de crédibilité qui est confirmé par tous les différents sondages. Une étude de The Gandalph Group, réalisée en 2014, place même ces moyens de communication modernes derniers dans le niveau de confiance que les lecteurs ont des publicités diffusées, alors que le taux de confiance envers les nouvelles et les publicités est le plus fort pour les journaux imprimés, bons premiers et en tête de liste parmi tous les médias.
Le constat est encore plus probant dans le dossier concernant le quotidien La Presse, qui a arrêté son format papier, pourtant centenaire, pour se consacrer sur une offre numérique destinée aux tablettes et téléphones intelligents. Or ses résultats catastrophiques, dont Power Corporation refuse toujours par ailleurs de dévoiler l’ampleur, démontrent l’échec de cette stratégie qui est devenue un véritable gouffre financier, avec une perte annuelle dépassant les 65 millions $.
Suite à l’avis de nombreux experts, les Desmarais, malgré un investissement de plusieurs centaines de millions au départ de cette aventure numérique, ont préféré se départir de La Presse en offrant 50 millions pour qu’un OSBL prenne la place, sans pour autant assurer la pérennité à long terme de ce dernier, l’éditeur Guy Crevier comptant sur des subventions gouvernementales et des dons de particuliers pour les années à venir.
On veut ainsi essayer de suivre l’exemple du The Guardian à Londres, mais il faut tenir compte que ce journal est de gauche, avec un lectorat très international, comme l’indiquent les spécialistes. De plus, via le principe de l’OSBL, La Presse aura à repenser son modèle éditorial. Le New York Times, confronté à un problème similaire bien qu’à plus grande échelle, a d’ailleurs rectifié le tir et est revenu au système d’abonnements payants avec pas moins de 3,5 millions d’inscrits. Il est vrai que sa marge de manœuvre est plus grande dans une ville de plusieurs millions d’habitants. Pendant ce temps, le Toronto Star tacle la tablette pour revenir au papier.
Par ailleurs, madame Colette Brin, professeure titulaire au département de l’information et de la communication de l’université Laval, ne croit pas à la fin du papier. Elle pense au contraire à une renaissance, car le papier est considéré comme étant prestigieux. Le cas du Journal de Montréal le confirme, avec l’augmentation constante de son lectorat, grâce à une remise en cause perpétuelle et à l’offre qui est faite aux lecteurs d’un journal pertinent et de qualité.