Les travaux et les jours

Aurélien Gallant, Tam Tam, Saint-Alexis-de-Matapédia

Les temps ont bien changé depuis l’avènement de l’agriculture, il y a de ça au-delà de 10 000 ans. De chasseurs cueilleurs, les hommes sont devenus éleveurs et cultivateurs.

En contrôlant mieux son garde-manger, l’homme s’assurait ainsi d’une plus grande sécurité pour lui et sa famille élargie.
D’une agriculture de subsistance avec quelques bêtes à une agriculture commerciale et, pour plusieurs autres, à une agriculture industrielle, l’agriculteur a vu son activité être complètement transformée. La recherche en agronomie, les techniques et les marchés ont fait en sorte que l’on obtient des niveaux de productions jamais atteints dans l’histoire de l’homme, mais à quel prix !
Pour comprendre un peu mieux l’agriculture d’aujourd’hui, j’ai rencontré monsieur Serge Dufour et son père Gilles, de Saint-Alexis. D’entrée de jeu, ils me mentionnent qu’il n’y a aucune commune mesure entre l’agriculture faite ici et celle pratiquée, de façon intensive, dans la vallée du Saint-Laurent. Serge Dufour, passionné par son métier, est éleveur de bovins ; il aime ses bêtes et il aime la terre, ce qui étonne toujours son père. Vivre sur une ferme aujourd’hui, c’est aussi vivre avec une administration plus lourde qu’autrefois.

Toutes les réglementations à respecter, les rapports à fournir, les lois, le marché et le prix des semences sont autant de sujets à maîtriser pour bien tirer son épingle du jeu. Son père Gilles voit bien que la tâche est devenue de plus en plus complexe et plus lourde ; c’est pourquoi il continue à donner un coup de main pour les différentes activités à réaliser sur la ferme. Lisette, la mère de Serge, de son côté, voit à l’administration des nombreux documents ainsi qu’à la comptabilité.
Ensemble, ils font une bonne équipe, tournée vers l’avenir. Gilles se dit chanceux d’avoir vécu le métier d’agriculteur à une époque où l’on pouvait encore avoir le sentiment d’être maître chez soi, de se sentir un homme libre. Il se fait souvent la réflexion à savoir s’il a bien fait de soutenir son fils dans sa décision de prendre la relève de la ferme. Depuis cinq générations, on cultive la terre chez les Dufour. « De 1920 à aujourd’hui, à deux reprises, l’on a été récompensé de la médaille de bronze du mérite agricole : dès la première génération, en 1922, avec l’oncle Pierre Lévesque et, en 2004, avec la ferme Dufour et Fils. »

Lorsque je demande à Serge : « Crois-tu qu’un de tes enfants prendra la relève ? », son père me reprend : « La question, c’est plutôt est-ce que tu encouragerais un de tes enfants à prendre la relève ? »

Il est évident que ces gens aiment leur métier et c’est ce qui les pousse à continuer. Des nombreux questionnements dans le monde de l’agriculture ne trouvent pas encore de réponses satisfaisantes : pourquoi des règlements mur à mur, sans tenir compte des réalités propres à chaque région du Québec ? Pour qui l’UPA se bat-elle ? Y a-t-il une place pour une agriculture différente ?

Merci à Serge Dufour, Gilles Dufour et Lisette Chabot d’avoir partagé leur passion et leur amour de la terre.