Dévoué pour le milieu communautaire, M. Favreau a été un acteur important dans l’émergence des premiers comités de citoyens vers la fin des années 1960. Photo : Nelson Dion

L’action communautaire : sortir de la crise par l’écologie

Marie-Pier Leboeuf, Journal Mobiles, Sainte-Hyacinthe

Après 50 ans d’une progression marquée par de grandes luttes sociales, l’action communautaire s’est amoindrie de façon alarmante et significative. Les yeux rivés sur l’avenir, le docteur en sociologie Louis Favreau espère un changement de cap où l’écologie et le mouvement social ne feront qu’« un » pour mettre fin à cette crise.

« Voulez-vous continuer d’être des pompiers de service ou devenir des architectes de développement de votre communauté ? », a immédiatement illustré Louis Favreau, l’auteur du livre intitulé Mouvement communautaire et État social : le défi de la transition sociale-écologique. Le conférencier était de passage à Saint-Hyacinthe le 10 avril, au Restaurant Lussier, dans le cadre du toast populaire « allongé » organisé par Solidarité populaire Richelieu-Yamaska (SPR-Y).

Dévoué pour le milieu communautaire, M. Favreau a été un acteur important dans l’émergence des premiers comités de citoyens vers la fin des années 1960. Il s’implique encore aujourd’hui dans le développement des pays du Sud. Retraité de l’Université du Québec en Outaouais (UQO), il a été professeur et titulaire de la Chaire de recherche en développement des collectivités.

Dans son dernier ouvrage comme dans ses conférences, M. Favreau sonne les cloches sur l’urgence d’agir pour répondre aux menaces écologiques qui affectent, notamment, nos énergies, le climat, l’agriculture et l’alimentation. Cette bataille sociale que représentent la santé et la sécurité, c’est le même combat qu’il mène pour l’écologie. Les deux sont imbriqués l’un dans l’autre, a insisté à de nombreuses reprises le professeur-chercheur retraité.

« Les luttes sociales et écologiques sont fortement liées. Le problème, c’est que les écolos sont d’un côté et les organismes communautaires sont de l’autre côté, mais les deux se rencontrent rarement », s’inquiète M. Favreau. À preuve, le gouvernement du Québec octroie 40 % de son budget à la santé et moins d’un pour cent pour l’environnement. « On est dans la séparation totale des choses. On ne prend pas très au sérieux l’environnement », a-t-il ajouté.

Dans la région, l’exploitation des gaz de schistes avait été fortement contestée en 2014. C’est l’un des exemples donnés par le conférencier pour souligner la mobilisation des Maskoutains sur une question écologique pour des raisons de santé.

Selon l’hypothèse de M. Favreau, cet enjeu majeur de la prochaine décennie nécessite une transition obligatoire entre les énergies fossiles et renouvelables. Considérant le pouvoir important des municipalités dans ce domaine, il souligne aussi l’immense potentiel de la région.

Saint-Hyacinthe de l’avant

Les efforts mis dans la biométhanisation ont devancé ceux de bien des régions. Le bac brun et la transformation des déchets de table à Saint-Hyacinthe permettent de créer un biogaz, une alternative verte considérable pour remplacer le pétrole et le diesel. « Ça veut dire que tout le parc automobile de la région pourrait fonctionner au biogaz plutôt qu’aux énergies polluantes », a-t-il résumé.

Spécialisée en agriculture, la Ville de Saint-Hyacinthe pourrait aussi profiter de la biométhanisation comme créatrice de fertilisant naturel grâce au digesta, un restant de la transformation industrielle. « Imagine, sur une décennie, la mise en route d’un programme où c’est le digesta comme fertilisant naturel qui remplace les pesticides. Ça pourrait redéfinir ce que signifie une transformation écologique sérieuse », s’est emballé l’auteur et conférencier.

Avec un travail d’éducation, la région maskoutaine pourrait former de véritables architectes du développement de la communauté grâce aux conditions favorables de la biométhanisation. Cette transition écologique, dont les raisons principales sont sociales, pourrait s’avérer une solution idéale. Le développement de l’agriculture urbaine, la récupération et le recyclage des aliments dans les restaurants et les supermarchés, ainsi que l’électrification des transports constituent d’autres projets intéressants énumérés de façon non exhaustive par l’enseignant retraité de l’UQO.

« La démarche d’action collective est celle qui fait que les gens sortent de leur inertie, de leur sentiment d’impuissance, parce qu’ils sont dans un projet qui va au-delà de leur propre personne, de leur propre famille. Ils sont dans une cause qui est supérieure à leur seule motivation individuelle », a conclu M. Favreau, pour inviter à revivifier l’action communautaire.