Le cycliste Dravis Bixel, lors de son passage au bureau du journal, à peine descendu de son vélo tout souriant après avoir survécu à la route 389.

À vélo pour une noble cause

Éric Cyr,Le Trait d’Union du Nord, Fermont

Sur les traces de Thomas Stevens, le premier cycliste d’aventure qui a parcouru le monde en 1886, Dravis Bixel a déjà sillonné l’Europe, l’Afrique, où il a pédalé dans 19 pays il y a sept ans, l’Australie et l’Asie. En 2016, il a décidé d’effectuer un circuit à vélo de 20 000 miles et son parcours s’est échelonné sur 23 pays et plusieurs continents afin de relever un défi personnel, mais aussi pour amasser des fonds pour l’organisme de bienfaisance Médecins sans frontières. Il était de passage dans la région après avoir bravé la sinueuse route nationale 389 dans le cadre de son incroyable épopée à bicyclette. Il s’est arrêté à Fermont, le 17 octobre dernier, où un couple lui a offert l’hospitalité. Le conseiller municipal, Bernard Dupont, et sa conjointe, l’enseignante Marie-Pierre Brodeur, l’ont accueilli. L’adepte de cyclisme fermontois lui a aussi prêté son garage pour effectuer la maintenance de son vélo. L’athlète aguerri a séjourné deux jours sur place avant de poursuivre son escapade vers le Labrador Ouest et la Trans-Labrador vers Happy Valley-Goose Bay.

Une planète à découvrir

Employé dans les technologies de l’information et messager à vélo à Seattle aux États-Unis, c’est à 30 ans, après avoir perdu sa blonde, son emploi et son appartement, que Dravis Bixel décide de partir à la découverte du monde à bicyclette. Celui qui est né en Alaska n’a pas peur d’affronter les climats arctiques. D’ailleurs, il avait envisagé de rejoindre cet état américain à la fin de son long trajet en Eurasie en passant sur un pont de glace de 80 kilomètres à partir du district fédéral extrême-oriental de Tchoukotka à l’extrémité nord-est de la Russie, mais son objectif n’a pu se concrétiser pour des raisons politiques. Son périple impressionnant d’un an et demi a commencé au Portugal d’où il a rejoint l’Espagne puis la France et l’Italie avant d’atteindre la Slovénie. Par la suite, ce fut au tour de la Croatie, la Bosnie Herzégovine, la Serbie, la Bulgarie et la Turquie. La Géorgie et l’Arménie suivirent tout comme l’Azerbaïdjan et l’Iran avant l’Asie centrale incluant le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan, le Kirghizistan et le Kazakhstan avant une brève incursion en Russie qui le mena ensuite en Mongolie. Suivra une autre percée en Russie où il a tenté d’avancer vers le Nord avant de devoir se résigner à rentrer aux États-Unis faute de ne pas avoir réussi à obtenir les autorisations nécessaires du gouvernement Poutine.

De retour chez sa mère à Seattle dans l’état de Washington, il se décide rapidement à repartir à l’aventure. Il traverse alors l’Alaska en longeant le fameux passage historique, l’Iditarod Trail, jusqu’à Fairbanks à l’opposé des fameuses courses de chiens de traîneau qui viennent de se terminer. Puis il traverse au Canada par le Yukon et la Colombie-Britannique jusqu’à Dawson Creek, Edmonton en Alberta, Saskatoon en Saskatchewan et Winnipeg au Manitoba où il apprend une mauvaise nouvelle qui l’ébranle. Son père vient de mourir d’une crise cardiaque. Il ne peut abandonner sa famille en ces moments difficiles et repart donc à Seattle durant un certain temps afin de vivre son deuil durant l’été.

Après avoir participé au championnat mondial des coursiers à vélo qui se déroulait à Montréal en août, il se rend de nouveau à Winnipeg au début septembre où il se remet en selle en direction de l’Est canadien en passant par le Québec jusqu’à la Côte-Nord et la 389, qui a parfois des allures de certaines routes des pays du Tiers Monde qu’il a empruntées. Son objectif, Cape St Charles près de Mary’s Harbour au Labrador, le point le plus à l’est de l’Amérique du Nord continental, avant d’aller rendre visite à sa tante dans le Maine.

Nomadisme à l’état pur

Éternel nomade, Dravis Bixel, décrit les paysages magnifiques qu’il a eu la chance d’apercevoir durant ses expéditions à bicyclette. Il se nourrit de ses riches expériences d’exploration à vélo, qui lui permettent un rapprochement avec les populations, un véritable contact avec les gens, des êtres humains tout comme lui, qui selon ses dires ont beaucoup plus d’affinités et de points communs que de différences culturelles. « J’ai eu la chance de faire de nombreuses rencontres très enrichissantes durant mes multiples excursions. Ça me donne l’occasion de mieux comprendre les coutumes et traditions des peuples que je croise sur ma route. Je me souviens d’un épisode en Iran où j’étais un peu nerveux après avoir été intercepté par un policier qui m’a demandé mon passeport. J’avoue que j’étais plutôt stressé et que je m’attendais au pire. Il est revenu en me disant : oh, tu es Américain. Je t’aime ! » Il raconte quelques anecdotes savoureuses comme celle où il suivait un sentier montagneux de chèvres en Mongolie et où il s’est perdu. « J’ai demandé la direction à un passant qui m’a dit : soit tu rebrousses chemin, soit tu traverses cette montagne. Je me suis retrouvé au sommet, j’ai installé ma tente au milieu de nulle part puis une tempête s’est levée avec une pluie torrentielle, du tonnerre et des éclairs. J’étais seul face aux éléments, mais heureux et en sécurité » raconte ce dernier.

« Le monde est si vaste et il y a tant à découvrir. La plus grande tragédie c’est que je ne pourrai jamais tout voir », déplore-t-il avec regret.