Animée par Daniel Breton et par Marie-Claude Delisle, du Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l’environnement maskoutain (CCCPEM), cette conférence a permis de faire le point sur la centrale et l’état de la rivière.

Un projet de coopérative pour gérer la centrale T.-D.-Bouchard

Justine Harbonnier, Journal Mobiles, Saint-Hyacinthe, été 2017

La centrale électrique T.-D.-Bouchard, près du pont Barsalou, inquiète de plus en plus la communauté maskoutaine. En plus de nuire à l’environnement, cette centrale privée ne rapporte plus un sou à la municipalité depuis plusieurs années. Un groupe de citoyens a donc décidé de prendre les choses en main, et propose de créer une coopérative pour reprendre le contrôle de la centrale.

« Nous, les Maskoutains, on est fiers de pas mal d’affaires, mais pas de la rivière Yamaska », a déclaré d’emblée Daniel Breton, consultant en énergie, environnement et électrification des transports, lors d’une conférence intitulée « À nous la centrale ! », le 23 mai dernier. Animée par Daniel Breton et par Marie-Claude Delisle, du Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l’environnement maskoutain (CCCPEM), cette conférence a permis de faire le point sur la centrale et l’état de la rivière.

Affluent le plus pollué du Saint-Laurent, la rivière Yamaska fait face à de nombreux défis écologiques. Son écosystème est perturbé, entre autres, par les activités humaines, agricoles et industrielles. À Saint-Hyacinthe, la centrale hydraulique installée sur le barrage Penmans, à deux pas du centre-ville, est une source bien connue de problèmes écologiques et économiques.

 

Des conséquences néfastes

Gérée depuis 1997 par l’entreprise ontarienne Algonquin Power, la centrale fonctionne à l’aide de trois turbines pilotées à distance par ordinateur. Elle génère une puissance de 2,5 MW d’électricité, soit l’équivalent d’une petite éolienne, et entraîne une importante réduction du débit d’eau de la rivière à la hauteur du barrage. C’est ce faible débit d’eau, entre autres, qui aurait contribué à la mort de milliers de poissons dans la rivière l’été dernier.

Selon un rapport d’Hydro-Québec datant de 2016, la province compte 139 centrales privées raccordées à son réseau. En 1995, la commission Doyon, menée par le gouvernement québécois, a révélé les conséquences environnementales néfastes des centrales privées. Ses recommandations ont conduit à l’instauration d’un débit minimum dans plusieurs centrales, dont la centrale T.-D.-Bouchard, ainsi qu’au respect d’une période d’arrêt de turbinage durant l’été. Selon le CCCPEM, ces restrictions ne sont toutefois pas toujours respectées.

 

Vers une prise de pouvoir citoyenne ?

Au fil des années, l’entreprise ontarienne a diminué, puis interrompu le versement d’une redevance de 3 % à la Ville, invoquant une baisse de ses profits en raison des restrictions environnementales croissantes.

Selon les dernières données fournies par la municipalité, pour la période de 1994 à 2014, la perte de revenus bruts pour la Ville se chiffrerait à 12 902 654 $. « C’est un important manque à gagner. Cet argent pourrait être réinvesti dans des projets pour la collectivité, comme la protection de la rivière», déplore Marie-Claude Delisle, du CCCPEM.

L’événement du 23 mai avait pour objectif de présenter le projet d’une coopérative solidaire qui reprendrait l’entière gestion de la centrale et redonnerait aux Maskoutains le contrôle de son énergie électrique. « L’écosystème de la rivière Yamaska serait mieux protégé par ceux et celles qui habitent à proximité. Ils en seraient fiduciaires et donc directement avantagés par les profits éventuels », explique Daniel Breton.

Des appuis précieux

Daniel Breton a réussi à fédérer plusieurs personnalités autour du projet, dont Didier Fleury, de la Caisse d’économie solidaire, qui a offert son aide pour développer un budget et pour estimer le coût de fonctionnement de la centrale. « D’ici la tenue d’une assemblée citoyenne dans les prochains mois, nous devrons toutefois consulter d’autres experts, car de nombreux aspects du projet sont encore flous », précise Marie-Claude Delisle.

Il reste en effet bien des points en suspens. Quel est l’état véritable de la centrale au regard des normes environnementales ? Dans quelles mesures les citoyens pourront-ils négocier avec Algonquin Power pour en reprendre le contrôle ? Autant de questions que les porteurs du projet devront éclaircir sous peu, car ils ont l’ambition de positionner la centrale parmi les enjeux des prochaines élections municipales.