Lichen que l’on retrouve dans le Nord québécois.

Un lichen du Nord québécois révèle ses secrets

Éric Cyr, Le Trait d’union du Nord, Fermont, le 8 février 2017

Des chercheurs de l’université Laval à Québec en collaboration avec l’université de Genève en Suisse ont découvert deux molécules uniques et des composés antibactériens dans un lichen du Nord québécois. Les scientifiques voulaient démontrer qu’il existe dans les milieux nordiques « une richesse insoupçonnée en composés naturels qu’il est urgent de mieux connaître et de protéger. »

 

Survivre dans un environnement difficile

Le lichen en question appelé Stereocaulon paschale, pousse principalement dans les régions subarctiques et arctiques du globe, mais se retrouve aussi sur certaines montagnes gaspésiennes dont le mont Jacques-Cartier et le mont Albert, ainsi que sur de hauts sommets de Charlevoix. Selon le responsable de l’étude, Normand Voyer, les chercheurs désiraient connaître la composition de cette plante qui pousse dans un climat très rigoureux : « Les lichens nordiques sont exposés à des stress environnementaux uniques, nous pensions donc qu’il était possible que ces espèces produisent des molécules spéciales pour composer avec ces conditions très difficiles. Ça confirme un peu  l’hypothèse que les plantes nordiques soumises au stress produisent des molécules et des substances chimiques différentes. » Le chimiste et professeur à la Faculté des sciences et de génie à l’université Laval explique que les propriétés antibactériennes des composés issus de ce lichen pourraient s’avérer utiles pour lutter contre les maladies parodontales.
« Certaines molécules qu’on a trouvées ont démontré une efficacité à combattre les bactéries causant la carie dentaire et la gingivite. »

 

Deux molécules jamais répertoriées

Les spécimens de lichen étudiés provenant du Nunavik, un territoire inuit québécois, ont été rapportés à l’université Laval par le biologiste et professeur au Département de biologie, Stéphane Boudreau, et des analyses phytochimiques ont permis d’identifier onze composés dont deux nouvelles molécules qui n’avaient jamais été isolées auparavant sur notre planète. Les neuf autres composés avaient déjà été identifiés dans des organismes vivants, toutefois des tests effectués par le professeur à la Faculté de médecine dentaire, Daniel Grenier, ont mis en lumière un fait nouveau : six de ces composés ont une activité antibactérienne potentiellement intéressante contre des pathogènes impliqués dans des problèmes buccaux.

 

Propriétés intéressantes

M. Voyer précise qu’il est encore trop tôt pour déterminer si cette récente découverte peut aboutir à des applications médicales ou industrielles mais il évoque néanmoins que : « Le but de l’étude n’était pas de provoquer une ruée vers les trésors moléculaires que pourraient renfermer les espèces du Nord québécois…(Plusieurs études) phytochimiques ont été menées dans les forêts tropicales, mais le Nord reste encore largement inexploré. Il y a sûrement beaucoup d’autres espèces nordiques qui, comme S. paschale, renferment des molécules uniques. C’est peut-être dans ces milieux qu’on va trouver les prochains traitements contre le cancer. »

Le scientifique conclut : « Si jamais nous découvrons des composés naturels qui ont des applications intéressantes, il sera important de développer des méthodes pour en faire la synthèse en laboratoire afin de ne pas mettre en péril la survie des espèces qui les produisent. »

Les résultats de cette recherche ont été publiés dans le dernier numéro de la revue Journal of Natural Products.