Karel Mayrand. Photo : Divest McGill

Karel Mayrand, un citoyen engagé avec la tête et le cœur

Elisabeth Forget-Lefrançois, Journaldesvoisins.com, Montréal, février 2017

Incapable de briser le cœur de son fils de 4 ans rêvant de jouer au hockey à la télévision, Karel Mayrand, directeur pour le Québec de la Fondation David Suzuki, a renoué avec l’ambiance des arénas en devenant père de famille. Aujourd’hui, il en est à sa huitième année en tant que gérant d’équipe chez les Braves d’Ahuntsic.

Ahuntsicois depuis 15 ans, M. Mayrand a récemment quitté sa demeure ancestrale du Sault-au-Récollet. Attaché au quartier, aux gens et à ses habitudes, il a opté pour une résidence dans le Domaine Saint-Sulpice. « J’ai l’impression de vivre chez Mad Men. C’est charmant avec l’école au milieu et les bungalows des années 1960 autour », lance-t-il.

 

Une vie bien remplie

Le quotidien de M. Mayrand est loin d’être de tout repos. En plus d’assumer les responsabilités de directeur à la Fondation David Suzuki et de président de Réalité Climatique Canada, un organisme fondé par Al Gore, Karel Mayrand a connu un automne exigeant en acceptant de se joindre à l’équipe de « Faut qu’on se parle », un groupe de réflexion non partisan ayant consulté les citoyens sur l’avenir du Québec.

Il évoque déjà un projet de livre avec des collègues. « On dirait que dès qu’un espace se libère dans ma tête, il me faut quelque chose en parallèle. Je ne vais pas à la pêche, je ne fais pas des modèles à coller, mais je me consacre à des livres, à des textes ou à des initiatives politiques. Mes hobbies font un peu partie de mon engagement », constate M. Mayrand.

Contrairement à bien des gens, sa fibre militante s’est imposée avec l’âge. Le cynisme a laissé place à un désir de faire changer les choses. « Plus je vieillis, plus je deviens intègre dans mes valeurs. Je ne vois pas pourquoi je ferais des compromis sur des questions de science, de justice ou de liberté, sur le monde dans lequel je veux voir grandir mes enfants », explique-t-il.

La carrière de M. Mayrand a débuté au sortir des bancs de l’Université Laval après une maîtrise en relations internationales. Grâce à son dernier stage universitaire, des contacts lui ont permis d’être recruté par Pierre-Marc Johnson, ancien premier ministre du Québec.

« La veille, j’étais déguisé en lutin dans un party de bureau chez Bell Canada pour payer les factures et le lendemain, j’étais au 25e  étage d’une tour du centre-ville et j’allais devenir l’assistant de recherche de M. Johnson », raconte Karel, amusé, en affirmant avoir adoré chaque seconde des onze années passées avec son mentor.

Après avoir cofondé le Centre international Unisféra, créé un programme de compensation des gaz à effet de serre, et conseillé plusieurs gouvernements et agences des Nations unies sur des enjeux tels le développement durable et la mondialisation, Karel Mayrand a décidé de relever de nouveaux défis en 2008 au sein de la Fondation David Suzuki. Le besoin de changer d’air s’est fait ressentir à la suite d’un séjour en Arctique rendu possible grâce à la bourse Action Canada visant à développer le leadership. « C’était un peu comme un voyage sur la lune. Avec la naissance des jumeaux la même année, j’ai mûri, quelque chose s’est transformé en moi », se souvient Karel Mayrand.

 

Un besoin de liberté

L’une des plus grandes beautés de son travail actuel est la possibilité de bénéficier d’un espace de liberté de parole et de prise de position. Son poste de directeur ne l’a pas empêché d’écrire le livre Une voix pour la Terre, de bloguer pour le Huffington Post et de rallier les mouvements écologistes et celui des étudiants lors du printemps érable.

« L’environnement vient me chercher par la tête, mais l’injustice, elle, vient me chercher par le cœur », lance-t-il, ajoutant être incapable de demeurer muet lorsque les libertés individuelles et les droits de la personne sont en cause. Il convient que sa ligne de conduite a parfois rendu nerveuse son équipe à la Fondation David Suzuki, mais il a la conviction que son ton moins conciliant a apporté une belle crédibilité à l’organisation.

Un sourire en coin, il ajoute être bien content que ses collègues du Canada anglais n’aient pas été au courant de toutes ses initiatives en raison de la barrière de la langue. « Ma compréhension des choses, c’est que tu ne peux pas protéger l’environnement sans te préoccuper des enjeux de démocratie et de justice sociale. Les problématiques du système économique sont celles qui créent des inégalités qui font que l’on détruit l’environnement », résume M. Mayrand, convaincu que l’engagement citoyen est l’antidote à la crise écologique et aux problèmes qui nous entourent.