Éric Cyr, Le Trait d’union du Nord, Fermont, le 7 novembre 2016
Une portion des monts Groulx-Uapishka, situés le long de la route nationale 389, fait partie de la réserve de la biodiversité et constitue une aire protégée. Ce récif montagneux est malheureusement écorché par des motoneigistes insouciants et irrespectueux qui font fit la règlementation en vigueur leur interdisant de se balader sans guide dans ce secteur préservé qui couvre le tiers ouest de la superficie du massif.
Il faut dire que le règlement n’a aucun mordant puisque le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) censé appliquer la loi ne patrouille que très rarement sur les lieux. L’un des fondateurs des Amis des monts Groulx et des sentiers des monts Groulx-Uapishka qui célébrait son 30e anniversaire cette année, Michel Denis, un aventurier de 72 ans qui habite la région, s’indigne de cette négligence et fait appel au civisme des motoneigistes et à la collaboration des clubs de motoneige afin de tenter de sensibiliser leurs membres à l’importance de respecter l’état naturel de ce joyau.
Les invasions barbares
« La réalité que nous vivons actuellement est sombre et concerne l’avenir écologique de ce massif unique. Ce territoire qui a été ouvert par et pour les randonneurs est maintenant envahi par la motoneige. Le mot envahi n’est pas trop fort, car d’après une évaluation, et malgré le fait que les deux tiers du massif soient pourtant accessibles aux motoneiges, au-delà de 1500 motoneigistes ont circulé en toute liberté et sans être importunés sur les sommets protégés des monts Groulx-Uapishka à l’intérieur de la Réserve de biodiversité Uapishka. Cela s’est fait en dépit du règlement du ministère de l’Environnement, responsable de ce territoire, qui stipule qu’il est interdit de circuler en véhicule motorisé au-delà de 800 mètres d’altitude (ce qui correspond à la limite des arbres). » Visiblement irrité par la situation qui risque de détériorer le patrimoine unique de la faune et de la flore et de nuire de façon irrémédiable aux espèces animales et végétales qui s’y retrouvent, M. Denis dénonce l’inaction et l’inertie du gouvernement libéral de Philippe Couillard dans ce dossier.
« Le gouvernement du Québec a décrété que c’est une aire protégée sur papier, mais dans les faits le règlement qui la protège est totalement inefficace.»
Destination récréotouristique envahie
« La conséquence la plus démoralisante pour nous est que les randonneurs, les skieurs et les raquetteurs commencent à déserter le territoire vers d’autres montagnes, comme les monts Chic-Chocs en Gaspésie, à l’abri des bruits de moteurs, d’odeurs d’essence et de traces de motoneiges. Ces adeptes de grands espaces et d’air pur commencent à bouder l’endroit puisqu’ils n’y retrouvent plus le silence, la quiétude et la neige vierge qui faisaient la réputation de ce massif montagneux qui constituait jusqu’à tout récemment un endroit de prédilection et l’ultime expérience de communion avec la nature dans le Nord québécois. »
Vandales des montagnes
« Nous avons essayé de sensibiliser les motoneigistes à l’importance de respecter cette terre sacrée ancestrale innue et la faune et flore qui l’habitent, mais il semble que nos efforts n’ont pas obtenu les résultats escomptés. Des affiches où on pouvait lire « Motoneiges défendues sur les sommets » ont été installées afin de bien délimiter la zone naturelle protégée, mais la plupart ont été vandalisées ou arrachées par des malfaiteurs. Un délinquant a même coupé un arbre sur lequel on avait posé une pancarte. Certains motoneigistes apathiques abandonnent leurs déchets sur place. Des individus ont même été jusqu’à ajouter de l’eau dans les bidons d’essence des agents de la faune. »
Fourbir les armes
Les amis des monts Groulx peuvent compter sur l’appui formel d’organisations de protection de la nature, d’associations touristiques régionales et d’institutions académiques universitaires et collégiales. Leur engagement envers cette cause stimule et donne confiance aux bénévoles qui oeuvrent au sein de l’organisme.
« Nous avons exercé une influence soutenue auprès du ministère de l’Environnement afin qu’une partie de ce massif devienne une réserve de biodiversité en croyant naïvement et à tord que cela lui garantirait protection. Nous avons l’expérience de l’action combattive, car dans le passé, nous avons mené avec succès des luttes contre les industries minières et forestières qui souhaitaient envahir le territoire des monts Groulx-Uapishka. Nous souhaitons une cohabitation harmonieuse, mais s’il le faut nous mènerons cette lutte contre les motoneigistes récalcitrants et nous utiliserons si nécessaire les tribunes internationales. Ce ne sera qu’une bataille de plus que nous mènerons à bien. Nous ne lâcherons pas le morceau » assure M. Denis.
« Ce n’est pas comme si l’espace pour pratiquer la motoneige manquait dans la région. Nous demandons juste que les adeptes de ce sport motorisé respectent cet espace protégé afin de le préserver pour les générations futures. Chacun à sa place, une place pour chacun. L’harmonie est dans la nature. Quand les activités motorisées et non motorisées se dérouleront sur des territoires différents, l’harmonie règnera sur les monts Groulx-Uapishka. » Un citoyen fermontois, Denis Moreau travaille actuellement sur la concrétisation d’un sentier de motoneige alternatif entretenu par une surfaceuse pour contourner les espaces protégés et accéder aux deux tiers Est hors réserve qui comprendrait un refuge.