La commission du vide

Vincent Di Candido, Échos Montréal, Montréal, janvier 2016

La commission Charbonneau, mise sur pied par l'ancien chef libéral Jean Charest après deux ans de pression publique, semble avoir accouché d'une souris malgré les nombreux témoignages de témoins-clés, ayant clairement démontré une vaste conspiration pour collusion et corruption, qui impliquait des politiciens, hommes de main et gens d'affaires.

Le rapport de la commission, contenant plus de 1 700 pages et ayant coûté plus de 45 millions de dollars, se limite à de banales recommandations et n'a ultimement servi que de faire-valoir à des personnages frauduleux qui peuvent continuer à dormir tranquilles et tirer profit de leurs délits en toute impunité. Quoi de mieux pour bien faire comprendre à tous que la fraude organisationnelle, avec la complicité directe ou indirecte de hautes instances, peut rapporter gros, à peu de risques. Le crime paie, quoi!

Pourtant, via l'aveu de nombreux témoins à la commission, on a démontré un organigramme mafieux d'extorsion de fonctionnaires à la solde des politiciens et la complicité de grandes compagnies qui ont profité de faramineux contrats suite à leurs « donations » au profit d'organisations politiques qui, en retour, autorisaient par exemple le gonflement du coût des travaux de 30°/0 par rapport au prix réel.

Les chefs de parti Jean Charest, Pauline Marois et Gérald Tremblay ont tous mentionné leur ignorance des faits … la commission ne se donnant même pas la peine de les convoquer pour témoigner!

Or, il était plus que raisonnable de penser que ces chefs de parti puissent potentiellement être indus dans cet organigramme décisionnel vicié – à l'instar de certains de leurs subalternes.

Au final, – à part éventuellement pour ceux attendant encore le développement et les résultats subséquents des poursuites légales entamées par les instances gouvernantes, tels Frank Zampino (ancien numéro 2 du maire Tremblay) et les Entreprises de Tony Accurso, cette commission, qui aura cité en comparution moult personnalités connues des milieux politique etlou municipal telles: Nathalie Normandeau, Bernard Trépanier, Marc Bibeau (ancien argentier libéral par la suite engagé par Power Corporation), Surprenant, Milioto, Arsenault et Lavallée (FTQ), n'aura engendré que de légers blâmes sans conséquence pour ceux parmi ces derniers qui auront avoué – participer de façon directe ou indirecte dans ce système de corruption bureaucratisée à grande échelle.

L'impunité de toutes les personnes « mouillées» prouve une fois de plus la présence d'une justice défaillante où il y a deux variantes, une politicienne et une citoyenne. Tout le monde n'est pas égal devant la loi quand on sait en effet que le moindre délit d'un contribuable aurait été sévèrement puni et n'aurait pas bénéficié d'une telle complaisance. La commission Charbonneau a certes contribué à exposer un système véreux et aberrant. Mais si elle n'amène aucune conséquence judiciaire ultérieure, elle se sera ultimement avérée un exercice en futilité, une démarche qui aura coûté cher pour des résultats médiocres et ne fait qu'accentuer la méfiance omniprésente et le cynisme des contribuables envers les institutions en place.

 

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