Mario Merola, une explosion de vie sur 84 ans bien remplis

Elisabeth Forget-Le-François, Journaldesvoisins.com, Montréal, novembre 2015

En pénétrant dans la salle d’exposition de la Maison de la culture Ahuntsic-Cartierville, les amateurs d’art se laissent porter à la découverte de l’œuvre de l’artiste ahuntsicois d’envergure internationale Mario Merola. Les teintes de bleu, de vert, de rose, de mauve et d’orangé font oublier aux visiteurs l’hiver sur le point de reprendre ses droits. Les couleurs vivantes illuminent l’atmosphère tamisée et chacun s’imprègne de la joie de vivre émanant des toiles.

« Y’a de l’explosion de vie », s’exclame une dame tout en félicitant l’homme à la chevelure poivre et sel se trouvant à ses côtés. Presque chaque jour, M. Merola fait un arrêt rue Lajeunesse pour partager sa vision de l’art avec les gens de passage. Sans ses habits au charme suranné et les quelques taches de vieillesse parsemant son front, il serait impossible de deviner l’âge de cet homme à l’esprit vif et au coup de pinceau assuré.

À 84 ans, l’artiste prolifique a trouvé l’énergie de proposer et de mettre sur pied une exposition présentant l’évolution de ses murales, de ses peintures et de ses reliefs tout en incluant ses plus récentes œuvres qui marquent un renouvellement de son art autrefois abstrait. Dans ses nouveaux tableaux figuratifs, M. Merola propose sa vision du quartier en passant par l’île de la Visitation, le parc Stanley, la rivière des Prairies, le jardin de la rue Sauriol ou encore la rue Florence.

 

Âgé, oui, mais…

 

« Il y a un enthousiasme derrière ça. Je suis âgé, mais j’ai des élans, des fois. C’est peut-être de petites pulsions de jeunesse », suggère M. Merola en parlant de sa nouvelle phase artistique. « J’ai trouvé l’hiver atroce. Alors, au printemps, j’ai eu un besoin de regarder la nature, de faire des choses autour de moi parce que j’ai grandi ici », raconte l’homme vivant depuis plus de 40 ans à la même adresse, rue Somerville.

 

La passion d’une vie

 

À l’âge de 15 ans, alors qu’il demeurait encore au domicile familial situé dans le haut des côtes du Sault-au-Récollet aujourd’hui disparues, Mario Merola a fait son entrée à l’École des beaux-arts de Montréal. Des années pour lui formidables et inspirantes. « C’était tellement extraordinaire pour moi que ça me nourrit encore », confie l’artiste. Conscient d’avoir besoin d’ajouter des cordes à son arc pour vivre de sa passion, le jeune Merola a choisi de s’instruire davantage à l’École supérieure des arts décoratifs de Paris grâce à une bourse offerte par le gouvernement français. Il avait à ce moment-là une idée en tête : se préparer pour prendre part aux débuts de la télévision. Son projet s’est d’ailleurs concrétisé à son retour. Radio-Canada a sollicité ses talents, lui permettant ainsi de consacrer ses journées au dessin de costumes.

Trois ans plus tard, sa carrière a pris son envol grâce au premier prix d’un concours national qu’il a remporté pour la réalisation d’une murale au pavillon du Canada à l’Exposition internationale de Bruxelles.

 

Laisser sa trace

 

À partir de la fin des années 1950, l’artiste a réalisé environ une centaine de travaux intégrés à l’architecture. M. Merola a laissé sa signature dans le paysage montréalais. Les deux grandes verrières aux dominantes bleues et la murale faite d’un agencement de briques brunes aux stations de métro Charlevoix et Sherbrooke n’en sont que quelques exemples. « J’allais voir les architectes et je leur proposais mon travail. Je n’attendais pas que les gens viennent, je me suis démené », se remémore l’homme au tempérament fonceur.

 

Transmettre son savoir

 

En parallèle, il a consacré une grande partie de sa vie à l’enseignement des arts à l’École des beaux-arts de Montréal et à l’UQAM. C’était pour lui l’occasion d’être entouré et d’échanger avec ses étudiants et ses collègues artistes. « J’ai aimé ça, se souvient-il. Si j’avais fait uniquement de la peinture tous les jours, ça m’aurait peut-être assommé par moment. » Une retraite active À l’évocation du terme retraite, M. Merola fronce les sourcils. « Le mot peut avoir l’air un peu négatif. C’est-à-dire que je suis à la retraite comme professeur depuis 24 ans, sauf que je continue de peindre », nuance l’artiste qui aime retrouver ses pinceaux et ses crayons au petit matin.

Outre le temps consacré à son art, l’artiste se tient occupé. « Disons que je m’active, mais un peu au ralenti en raison de l’âge. Je me promène, je lis, je vais au musée, au restaurant, on rencontre de la famille, ils viennent à la maison, on va chez eux… On a une vie familiale riche », s’enorgueillit l’homme comblé. Tout comme lui, trois de ses filles ont élu domicile dans le quartier, permettant aux grands-parents de vieillir entourés de leurs petits-enfants et de demeurer jeunes de cœur.

 

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