As-tu tué, cette année?

Julienne Pilon, L’Alliance, Preissac, octobre 2015

La chasse à l’orignal occupe une place importante dans l’histoire et les traditions québécoises. Cet animal à l’imposant panache qui incarne la force et l’endurance est l’animal le plus chassé au Québec devant le chevreuil et l’ours noir. Sa chasse a longtemps été une nécessité liée à la survie alimentaire.

L’orignal est le plus grand cervidé et le mammifère terrestre le plus imposant en Amérique du Nord. Le mâle adulte, avec son panache complet, peut peser de 600 à 800 kilos. Doté de muscles massifs, d’épaules voûtées, d’un museau long et arqué, l’orignal présente un pelage foncé, presque noir. Peu de temps après sa naissance, il est un habile nageur. Même s’il a une vue très faible, l’orignal compense cette lacune par un odorat et une ouïe fort développés. Sa croissance est très rapide; ses rejetons peuvent prendre jusqu’à deux kilos par jour dans les premières semaines de leur existence. Il y aurait plus de 500 000 orignaux dans les forêts canadiennes. On estime qu’ils pourraient être même près d’un million de bêtes.

 

Pour la survie

 

Dans la culture traditionnelle autochtone, la chasse à l’orignal est un rituel réservé aux hommes. Les autochtones chassent l’orignal chaque automne depuis des temps immémoriaux. En plus de sa chair fort appréciée et nourrissante, sa fourrure servait à faire des vêtements et des chaussures. Elle servait aussi de monnaie d’échange entre les premières nations et plus tard avec les Français.

La capture de cet animal n’était pas chose simple à l’époque. Outre qu’il était difficile de l’abattre avec de simples flèches, il convenait de connaître ses moeurs. Ainsi, les chasseurs amérindiens ont rapidement utilisé des burgaux en écorce afin d’imiter le cri de la femelle. Il faut dire que la chasse se pratiquait jusqu’à très tard à l’automne alors que la neige permettait de se déplacer en raquettes facilitant la traque de l’animal.

Dès leur établissement au Québec, les Français ont appris des autochtones à chasser l’orignal. La chair de l’animal était très prisée par les nouveaux venus et contribuait à une saine alimentation, riche en protéines, susceptible de protéger contre les maladies graves. Parmi les techniques fondamentales de survie alimentaire, la chasse à l’orignal représentait très vite un apprentissage essentiel. L’apport de l’arquebuse et du fusil a rendu plus facile cette activité traditionnelle et importante même chez les Canadiens-Français. Jusqu’au milieu du XXe siècle, la chasse s’avérait nécessaire à la subsistance de nombreux Québécois. La viande servait alors à nourrir les familles nombreuses.

 

Un sport

 

Toutefois, vers les années 1950, la chasse à l’orignal devient essentiellement récréative même si on continue à déguster la viande. Elle se transforme en loisir souvent réservé aux membres de clubs privés. Ce n’est qu’à partir de 1962, que la chasse devient plus contrôlée avec la création des réserves fauniques, et plus tard celle des zones d’exploitation contrôlée (ZEC) et l’implantation de permis et de diverses réglementations plus ou moins appréciées des chasseurs.

En Abitibi-Témiscamingue, certains diront que la vie s’arrête avec l’arrivée de la saison de chasse à l’orignal. Nombre d’entreprises ajustent leurs agendas en fonction des départs en forêt. C’est la bataille pour les vacances en octobre. Et pas seulement pour les hommes. Les femmes apprécient de plus en plus ce sport prétendument viril.

La région se classe au 2e rang au Québec pour le nombre de chasseurs avec 15 % du total provincial et au 1er rang pour les chasseurs non résidants à 35%. Cette année risque d’être une bonne saison de chasse puisqu’on peut tirer le mâle, la femelle ou le veau. La température ne nuit pas non plus. On verra cela lorsque les statistiques sortiront. As-tu été chanceux, cet automne?

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