Infrastructures et lieux patrimoniaux : Des résidants déplorent la dégradation

Hélène Maillé, Journaldesvoisins.com, Montréal, septembre 2015

Benoît Bertrand, résidant d’Ahuntsic-Cartierville et ancien employé de la Ville de Montréal aujourd’hui retraité, ne peut s’empêcher de constater la dégradation des infrastructures et des lieux patrimoniaux d’Ahuntsic-Cartierville. Il n’est d’ailleurs pas fier de voir la manière dont nous protégeons notre patrimoine. Au chapitre des infrastructures, ce n’est pas la première fois qu’il se plaint de l’état du trottoir devant chez lui et pourtant, rien ne semble changer. La dégradation de plusieurs lieux dans l’arrondissement inquiète les résidants, qu’il s’agisse de structures (trottoirs, rues, etc.) ou de lieux patrimoniaux.

Rémi Lacoste, également résidant d’Ahuntsic, croit aussi que les quartiers du territoire ont besoin d’être revitalisés. Selon lui, le plan de développement de la rue Fleury, tel qu’il a été conçu, est un échec, alors que la circulation y est à son apogée.

Selon Vincent Garneau, directeur du développement historique à Cité historia, le site des moulins, situé dans le parc-nature de l’île de la Visitation, est au sommet de la liste des bâtiments patrimoniaux menacés, sans parler de l’externat Sainte-Sophie du boulevard Gouin Est, de la clôture de l’école Sophie-Barat, et des entrepôts sur l’ancien terrain du ministère des Transports situés sur le boulevard Henri-Bourassa, qui sont tous dans un piteux état.

Monsieur Garneau souligne toutefois que ce qui est alarmant dans notre arrondissement, c’est l’absence d’une réelle préoccupation de notre patrimoine.,« Si on laisse dépérir des sites aussi importants pour l’histoire du nord de Montréal, imaginez ce que deviendra le patrimoine plus récent », questionne-t-il.

Quand les citoyens ont-ils réellement pris conscience de la situation? Dans le cas de Cité Historia, Vincent Garneau admet que ce n’est que la destruction de la maison du Peintre qui a poussé l’organisme à agir. Ce n’est pourtant pas seulement la dégradation du patrimoine qui inquiète. Certaines infrastructures de la voirie sont aussi en mauvais état.

 

Infrastructures déficientes

 

Pierre E. Lachapelle, ancien conseiller municipal, juge que « l’arrondissement rit des citoyens ». Il pense, en outre, que plusieurs marquises devraient être installées afin d’assurer la sécurité aux arrêts d’autobus desservis par la station de métro Sauvé. Il croit également que le passage piétonnier sur la rue Basile-Routhier devrait être rétabli, afin que les piétons se déplacent plus aisément, et que de nouveaux arbres devraient être plantés sur les terrepleins, notamment ceux du boulevard Henri-Bourassa. L’ancien conseiller suggère, par ailleurs, l’implantation de poubelles quatre saisons dans les parcs, ce qui diminuerait considérablement la pollution des espaces verts. Il existe pourtant plusieurs moyens qui permettraient aux citoyens de contribuer à la protection des lieux, qu’ils s’agissent des structures de voirie ou des lieux patrimoniaux. Faire une intervention à l’occasion d’une séance du Conseil d’arrondissement est l’un de ces moyens, mais la démarche peut apparaître laborieuse pour les citoyens qui ont déjà des journées bien remplies avec la famille et le travail (NDLR : cf notre éditorial).

 

La part de la Ville

 

Toujours selon le directeur du développement historique à Cité Historia, l’arrondissement a déjà été plus proactif en matière de préservation des lieux. Il se pourrait que cela revienne au goût du jour. À la séance du conseil d’arrondissement du 10 août dernier, la conseillère du district du Sault-au-Récollet, Lorraine Pagé, mentionnait qu’il y aurait cet automne une consultation publique de la Ville-centre quant à la gestion du patrimoine historique et du patrimoine plus récent de Montréal.

Interrogée à ce chapitre par journaldesvoisins.com, Mme Pagé faisait valoir que ce serait là l’occasion pour les organismes et les citoyens préoccupés par la question de protection et de gestion du patrimoine, même modeste, de démontrer leur intérêt à ce chapitre. « Nous ne savons pas à cette date quelle forme la consultation prendra, ou encore si ce sera une consultation menée par l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM), mais ce sera l’occasion pour les citoyens de faire part de leurs différents points de vue sur le patrimoine historique et même le patrimoine plus modeste », a déclaré Mme Pagé à journaldesvoisins.com.

 

Des moyens pour qui?

 

Comme le précise Vincent Garneau, pour l’instant, l’arrondissement ne possède aucun moyen légal pour intervenir sur des propriétés privées abandonnées, comme la maison du Peintre. La raison? « Les fonctionnaires disposent de très peu de moyens d’intervention et les amendes, aussi élevées soient-elles, ne freinent pas les particuliers mal intentionnés. La démolition est donc l’option de dernier recours », dit-il. À son avis, il faudrait envisager de mieux outiller les fonctionnaires, afin qu’ils puissent empêcher les propriétaires de sites privés de laisser dépérir des bâtiments dans le but de les démolir et il faudrait les obliger à assurer un entretien minimal des lieux dont ils sont proprios. De même, les propriétaires, aussi bien intentionnés soient-ils, devraient recevoir de l’aide en matière de protection des maisons patrimoniales, alors qu’ils réussissent rarement à obtenir des subventions.

Toutefois, M. Garneau trouve ironique de constater que la Ville est elle-même propriétaire de lieux qui sont de plus en plus préoccupants à ce chapitre : la maison Berri (démolie depuis quelques mois, toutefois, et pour cause), le site des moulins, et l’ancienne caserne de pompiers sur la rue Bois-de-Boulogne. La Ville ne devrait-elle pas agir en conséquence et donner l’exemple aux citoyens en matière de préservation du patrimoine? La consultation publique organisée par la Ville-centre donnera sûrement l’occasion d’en débattre.

 

Participation

 

Benoît Bertrand est partisan d’une consultation avant que des travaux ne soient entrepris. Il croit, par ailleurs, que les citoyens devraient changer leur mentalité. Même s’il sait que les procédures pour faire valoir les points de vue des citoyens à tous égards peuvent être longues et pénibles, il incite fortement quiconque ayant un minimum de temps et de bonne volonté à faire une plainte ou à participer au processus.

 

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