Val-David, la démocratie dans l’espace public

René Derouin, Ski-se-Dit, Val-David, juin 2015

Val-David évolue dans la richesse de sa culture et de sa diversité. Cet espace, que nous voulons différent, doit intégrer toute la diversité actuelle et future, mais surtout protéger la démocratie citoyenne par cette diversité. Notre société évolue rapidement. Nous entrevoyons des confrontations futures liées à l’évolution de notre municipalité, susceptibles de remettre en question le sens que nous avons toujours donné à la démocratie.

Nous pouvons constater deux aspects inquiétants dans ces changements : la commercialisation de nos valeurs par la mondialisation et le sectarisme en marche depuis plusieurs années. Nous nous pensons isolés de ces courants, mais ils vont nous surprendre plus durement que d’autres sociétés si nous continuons à les ignorer et à ne pas nous y préparer.

On dit que Val-David est un endroit différent, mais en quoi l’est-il véritablement? Dans une société où les communications ne se font plus dans le voisinage, mais à l’échelle planétaire grâce à des connexions numériques, c’est l’ère du chacun pour soi. Mais notre village est un modèle de culture, de plein air et de convivialité, et c’est grâce à son espace géographique restreint (illustré par la rue principale), au cœur villageois tissé serré et à une complicité citoyenne, renforcée par des familles pionnières toujours présentes. Nous vivons dans un monde à part, mais pour combien de temps encore?

La place publique a joué un rôle majeur. Le sens de la paroisse, les conseils municipaux et nos multiples organisations ont assuré cette démocratie citoyenne. Le perron de l’église, lieu de rencontre et de discussions, privilégiait auparavant un débat public entre les valeurs politiques et religieuses. Mais cette place publique est en voie de disparition au Québec : elle est remplacée par les centres commerciaux, devenus des lieux de rassemblement. Internet permet des idéologies variées et des mouvements dont nous ignorons souvent les objectifs, comme certains mouvements sectaires. Est-ce que la culture attirerait ces pensées sectaires et ésotériques? Je crois que ces mouvements utilisent la culture. Il ne s’agit pas d’une culture citoyenne puisqu’elle est fondée sur l’exclusion, mais cela fait partie de notre diversité et de notre liberté, dans la mesure où elle n’occupe pas tous les espaces publics.

Les espaces publics de la communauté forment l’espace citoyen où tous sont égaux, indépendamment de leurs croyances. Nous observons déjà les dangers de la mondialisation : des complexes dédiés à la consommation reflètent un nivellement vers le bas des valeurs citoyennes. Par exemple, aux États-Unis, dans d’immenses centres commerciaux, les propriétaires font leurs lois; il n’y a pas de conseil municipal où vous pourriez participer ni de mairesse ou de conseillers, seul un directeur général qui règne comme un prince.

Cette tendance à la privatisation de l’espace public progresse et risque de nous rejoindre. Conservons notre belle richesse qui peut agrandir l’espace public pour accueillir l’espace citoyen dans sa diversité. Il faudrait retrouver au cœur de Val-David notre futur hôtel de ville au couvent des Sœurs Sainte-Anne et, en périphérie, des services pour tous les citoyens. Voilà un exemple de ce qu’on doit faire pour préserver un Val-David citoyen où il fait bon vivre.

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