La Mauricie et le mouvement patriote : le cas Barthe

Jean-François Veilleux, La Gazette de la Mauricie, mai 2015

En novembre 2002, le gouvernement de Bernard Landry proclame par décret que la « Fête de la reine » (Victoria Day) ou « Fête de Dollard », célébrée le lundi qui précède le 25 mai de chaque année, portera désormais le nom de « Journée nationale des patriotes» « dans le but d’honorer la mémoire des Patriotes qui ont lutté pour la reconnaissance nationale de notre peuple, pour sa liberté politique et pour l’obtention d’un gouvernement démocratique. »

Parmi ces héros, mentionnons le poète trifluvien Joseph-Guillaume Barthe. Né à Carleton le 16 mars 1816, fils aîné de la famille, il déménage rapidement chez un oncle maternel, Étienne Tapin, à Trois-Rivières, où il fait ses études primaires. Après avoir complété des études en philosophie au Séminaire de Nicolet en 1834, en médecine, puis en droit, il se fait connaître en tant qu’auteur, avocat, journaliste, homme politique, poète et fonctionnaire.

Orateur à la grande assemblée patriote de Yamachiche du 26 juillet 1837, qui rassembla plus de 3000 personnes, il est surtout connu pour avoir été emprisonné pendant trois mois à la prison de Trois-Rivières en 1839. Il était accusé de haute trahison à cause d’un poème séditieux intitulé « Aux exilés politiques canadiens », dédié aux 58 patriotes déportés dans les colonies pénitentiaires britanniques.

Bien qu’ayant obtenu sa commission d’avocat en mars 1840, il n’exerce toutefois pas sa profession, car on lui confie la rédaction de l’Aurore des Canadas. En avril 1841, âgé de 25 ans, il devient député libéral de Yamaska au Parlement du Canada-Uni, même s’il est reconnu comme anti-unioniste.

En 1853, il est envoyé en France au nom de l’Institut Canadien de Montréal afin de renouer avec la mère-patrie et de s’affilier avec l’Institut Français. Séjournant à Paris pendant deux ans, il profite de l’occasion pour y faire publier son ouvrage « Le Canada reconquis par la France ». Joseph-Guillaume serait en partie responsable de la venue en 1855 de la corvette française La Capricieuse, premier bateau militaire français à mouiller dans les eaux du Saint-Laurent depuis la Conquête anglaise de 1760. Remplie de livres et de journaux, elle fut un véritable baume à la suite de l’incendie du Parlement du Canada-Uni à Montréal de 1849, lors duquel brûla la bibliothèque de 25 000 livres d’archives de la Nouvelle-France.

De retour à Trois-Rivières, il retrouve son métier de rédacteur, d’abord à L’Ère nouvelle dont il devient éditeur puis au Bas-Canada, journal indépendantiste fondé par son frèreGeorges-Isidore qui ne paraîtra que quelques mois à cause de l’incendie des ateliers. Pour assurer sa diffusion, Barthe compte sur 70 agents dans le Bas-Canada, trois aux États- Unis et quinze en France. Auteur de trois contes et d’environ 80 poèmes publiés dans divers journaux, il décède à Montréal en 1893.

À l’instar des poètes nationalistes de son temps, tels qu’Antoine Gérin-Lajoie, Joseph-Guillaume Barthe aura su toute sa vie dédier sa plume au processus de redéfinition identitaire qui émerge alors. Son plus célèbre vers patriotique est celui-ci : « Je n’ai point de défaut dans le cœur qui soit plus fort que l’amour de ma patrie » (1839).

 

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