Les allées et venues du Bruant à gorge blanche

Jean-Pierre Fabien, Le Sentier, Saint-Hippolyte, avril 2015

Au moment où vous lirez ces lignes, certains oiseaux seront revenus au pays, de retour de leurs quartiers d’hivernage. C’est le cas d’un oiseau brunâtre, de la taille du moineau, et qui se nomme le Bruant à gorge blanche. C’est en avril que je vois arriver cet oiseau trapu. Il gratte le sol avec ses pattes en se déplaçant d’avant en arrière. En agissant ainsi, il trouve la nourriture cachée dans l’humus ou sous le peu de neige qui reste au sol.

Le Bruant à gorge blanche, comme son nom l’indique, possède une gorge blanche qui contraste efficacement avec le gris du ventre et le brun du dos. Il a un bec conique ce qui nous indique qu’il se nourrit surtout de graines, de fruits et de bourgeons. Derrière le bec se trouve une tache jaune appelée le lorum. La tête porte une couronne rayée de blanc et de noir. C’est un oiseau sympathique qui vient tout bonnement aux mangeoires lorsque cela coïncide avec le temps de ses migrations. Il passe l’hiver dans l’est des États-Unis et peut également se rendre aussi loin qu’au sud-ouest de ce pays.

 

Un chant musical

 

Ce qui le caractérise à coup sûr, c’est son chant. Ses prouesses sifflées sont bien connues des habitués de la campagne et des forêts. On pourrait le traduire par : Où es-tu Frédéric, Frédéric, Frédéric? Les premières notes (Où es-tu) sont très aiguës tandis que les notes émises par la suite (Frédéric) sont chantées en respectant les règles musicales du triolet. Plusieurs variations peuvent être entendues. Il existe un chant qui répète les mêmes onomatopées et qui s’exprime en mode majeur, mais aussi une version dans un mode mineur que j’affectionne particulièrement. Lorsque l’oiseau se sent dérangé ou désire garder contact avec ses congénères, il lancera un sonore chink! Tout près d’un chalet que je connais bien, et qui a été construit en 1935 se trouve un muret au-dessus duquel foisonnent de nombreuses plantes laissées en friche. La plante dominante de cet emplacement est certainement la Ptéridie des aigles, une fougère qui pousse même en plein soleil.

 

Un nid bien caché

 

C’est sous une talle de fougères et abrité sous une roche que le Bruant à gorge blanche a installé son nid en juillet 2014. Le nid, tressé de fines brindilles, était placé directement sur le sol. À la fin de juillet, au moins trois jeunes âgés de quelques jours étaient présents dans leur repaire. Ils étaient sans défense, nus et aveugles. Mon beau-frère, ornithologue de renom 1, a pu observer de près l’évolution des jeunes. Il a vu les parents venir nourrir les oisillons au nid en prenant soin de leur apporter quelques insectes, source indéniable de protéines essentielles. Plus tard au mois d’août, les jeunes avaient commencé à circuler sous les fougères et arbustes. Les parents étaient toujours en contact sonore avec eux afin de connaître où ils s’étaient terrés.

 

Présent partout au pays

 

J’aime bien ce petit charmeur de nos forêts. On sait qu’il niche dans tout le pays, du Yukon à Terre-Neuve. Il préfère les bosquets denses et l’orée des bois. Il profite des éclaircies provoquées par les coupes forestières pour se trouver un lieu de nidification. J’aime beaucoup son chant qu’il émet peu souvent pendant la saison de nidification afin de ne pas trahir sa présence. Il me laisse avec la certitude intérieure que l’humain n’est pas seul dans la nature. D’autres espèces, quelles qu’elles soient, affichent leurs couleurs et laissent entendre leur voix.

 

1Il s’agit de Marc-André Villard, professeur titulaire au département de biologie à l’Université de Moncton.

 

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