Le «Gordie Howe» de Palmarolle

Jean-Pierre Robichaud, Le Pont, Palmarolle, février 2015

À 63 ans, jouer de 50 à 55 parties de hockey par saison à raison de deux ou trois par semaine, entouré de jeunots dont il pourrait être le père, relève de l’exploit. Depuis 30 ans, Onil Aubin, non seulement coordonne les activités de la Ligue des vétérans de Palmarolle, mais il y est aussi un des joueurs encore le plus actif.

Début ’80, la structure de l’aréna de Palmarolle vient d’être compléter et ne demande qu’à accueillir des hockeyeurs. Les jeunes agriculteurs de l’époque, dont j’étais, cherchaient un moyen de se rencontrer et de fraterniser dans leurs rares temps libres. C’est à ce moment que fut mise sur pied une « ligue » de hockey d’adultes qui comptait, à ses débuts, deux équipes de cinq ou six joueurs chacune. La « ligue des cultivateurs», qu’on l’appelait, ceux-ci y étant majoritaires. Une fois par semaine, on se retrouvait à l’aréna. On était presque tous des patineurs « sur la bottine », mais on s’amusait ferme pendant une heure avant de terminer la soirée autour d’une caisse de bières dans le vestiaire des joueurs.

 

La mutation

 

Onil Aubin arriva parmi nous vers 1985, en même temps qu’Alfred Nicol et Conrad Boissonneault. Avec ces derniers, il prit la direction de la « ligue », la structura, puis recruta de nouveaux joueurs. La « ligue des cultivateurs » devint la Ligue des vétérans de Palmarolle et compta jusqu’à six équipes. Trente ans plus tard, cet increvable préside encore fermement aux destinées de cette ligue. Comme dirigeant, mais encore et surtout comme joueur, toujours aussi intense et passionné. Ne se sent-il pas un peu dépassé parmi tous ces joueurs dont la moyenne d’âge est de 40 ans?

« J’inscris encore deux ou trois points à presque toutes les partie », m’avoue-t-il candidement. Pas mal pour un gars qui n’a commencé à jouer au hockey que vers l’âge de 30 ans.

 

La fin d’un rêve?

 

À compter de 2007, l’aréna de Palmarolle fut fermé pendant trois ans. La ligue dut déménager à Macamic, perdit des joueurs et, à bout de souffle, vint près de cesser ses activités. Ça présageait un dur coup pour Onil et ses acolytes. Ils sentaient s’éteindre le sport qui avait mis Palmarolle sur la carte de l’Amérique du Nord avec l’illustre Rogatien Vachon. Qu’à cela ne tienne, l’increvable n’allait pas baisser les bras.

 

La renaissance

 

Pendant que d’autres mettaient de la pression sur l’administration municipale pour remettre l’aréna en opération, Onil gardait le contact avec ses joueurs les plus influents. En 2010, quand l’aréna Rogatien Vachon repartit enfin sa glace artificielle, il se remit à la tâche, bien déterminé à remettre sur pied cette ligue qui lui tenait tellement à coeur. Il rapiéça les trois équipes moribondes et, à l’automne 2010, c’est avec une grande fierté que lui et « sa » Ligue des vétérans s’élancèrent à nouveau sur la glace de Palmarolle. Depuis ce temps, à force de travail, ratissant tout l’Abitibi-Ouest, ce dévoué peut compter sur un bassin de 85 joueurs disponibles ou sur appel. La ligue compte aujourd’hui cinq équipes, presqu’une sixième.

La notoriété de cette ligue est telle qu’elle est devenue un facteur d’attraction, puis d’intégration pour les professionnels et autres travailleurs qui arrivent parmi nous. Originaire de Val-d’Or, Patrick Girouard, 30 ans, gardien de but, adore jouer dans cette ligue qu’il trouve très bien structurée et accueillante.

« Deux choses m’ont attiré à La Sarre et j’y ai accepté le poste de directeur de la SAQ : le hockey et le golf », admet-t-il quatre ans plus tard. Et il conserve fièrement sur son bureau la rondelle de son premier jeu blanc dans la ligue, le 10 février 2014.

 

Une autre réalisation

 

Une ligue de hockey qui vient d’atteindre ses 30 ans mérite un foyer digne de sa notoriété et de sa pérennité. Encore là, passionnés et fiers, Onil et son équipe ont rêvé, planifié, puis enfin réalisé « le vestiaire des vétérans » à l’aréna local et qui sera officiellement inauguré sous peu.

 

Et l’avenir de notre « Gordie » local?

 

Certes la ligue a rajeuni. Elle ne compte plus de joueurs qui « patinent sur la bottine » comme à ses débuts. Le jeu y est plus rapide et le style a beaucoup changé, mais « le vieux Gordie » affirme qu’il y a encore sa place, qu’il peut encore suivre les jeunes. Pendant longtemps, son objectif était de battre le record du vénérable Lucien Robert qui a joué jusqu’à 65 ans. Mais Onil patine dans une ombre : un lièvre nommé Yvon Chabot évolue encore dans la ligue à…70 ans. Nul doute que la passion, l’ardeur et la détermination d’Onil Aubin auront marqué cette ligue. Et, quand l’heure de la retraite sonnera, que le vétéran des vétérans tirera sa révérence, souhaitons qu’un autre de sa trempe reprenne le flambeau. « J’ai un dernier souhait », me souffle-t-il un peu ému. « Ne plus avoir de responsabilités. Juste venir jouer… »

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