La pollution lumineuse

Jean-Pierre Fabien, Le Sentier, Saint-Hippolyte, janvier 2015

J’ai lu avec attention un article paru dans Le Devoir la dernière fin de semaine de décembre1. L’article traitait de la pollution lumineuse. On pourrait définir cette expression comme étant toute modification de l’environnement lumineux naturel et toute nuisance créée par la lumière artificielle sur la visibilité du ciel, la faune, la flore, les écosystèmes et la santé.

Dans ce texte, on cite l’ornithologue Jean-Philippe Siblet qui agit à titre de directeur du patrimoine naturel au Muséum national d’histoire naturelle de Paris. M. Siblet a écrit une impressionnante étude sur l’impact de la pollution lumineuse sur la biodiversité. Il étudia de près le cas de la Chouette hulotte qui se fait rare dans la grande région de Paris. Cette espèce a besoin de la nuit noire pour se nourrir et se reproduire. Comme les rues, les gratte-ciel et les monuments sont de plus en plus éclairés, et ce, vingt-quatre heures par jour, cet oiseau de proie nocturne est confiné à quelques grands parcs et cimetières pour pouvoir survivre dans cette région urbaine.

 

Corridor migratoire
 

Lorsque les nuits sont brumeuses et que les puissants faisceaux trouent le ciel de leur blancheur, des centaines d’oiseaux sont trouvés morts au pied de la tour Eiffel, car ceux-ci ont subi une modification de leur sens de l’orientation. En effet, les oiseaux, notamment en période migratoire, se fient sur les étoiles pour se diriger et trouver leur chemin. Les lumières urbaines peuvent donc influencer négativement leur parcours.

 

Du Mont-Mégantic à Montréal
 

Plus près de nous, à la Réserve internationale de ciel étoilé du Mont-Mégantic, on peut y découvrir pas moins de 3 000 étoiles par une nuit dégagée, et ce, à l’œil nu. Si on compare avec la ville de Montréal, nous nous rendons à peine à 100 étoiles par une nuit claire. Le voilement des étoiles est donc bien connu autour de nos grandes villes. Selon Jean-Philippe Siblet, la solution la plus efficace est d’éteindre la lumière! Une partie des réverbères peuvent être éteints, tout comme les vitrines.

 

Une tendance à trop éclairer
 

Dans nos villes, on a tendance à éclairer davantage par besoin de sécurité, de promotion commerciale et de mise en valeur patrimoniale. Or, des études récentes prouvent que la majorité des vols par effraction se font en plein jour et que le nombre d’accidents aux intersections ne diminue pas avec l’augmentation de l’éclairage. À plus forte raison, pourquoi avons-nous installé autant de lampadaires entre le lac Maillé et le chemin du lac Bleu sur le boulevard des Hauteurs?

 

Orienter l’éclairage vers le sol
 

J’ai la chance de demeurer dans un endroit paisible. Toutefois, sur le territoire hippolytois, certains résidants ont choisi d’installer des luminaires qui produisent un intense éblouissement et dont l’éclairage est tourné vers l’horizon. Il aurait été tellement plus écoénergétique d’utiliser des luminaires au sodium ou DEL (Diode Électro Luminescent), à faible taux de lumière bleue, tout en orientant l’éclairage vers le sol. Ceci ne nous aurait pas bloqué l’accès à la noirceur et à la présence d’étoiles en pleine nuit. Une autre façon d’agir est d’utiliser des minuteries et de tout simplement éteindre les lumières extérieures au moment du coucher.

 

Des insectes qui s’agglutinent
 

L’impact sur les lumières nocturnes est grand pour les insectes d’été qui s’agglutinent sur ces lampes qui deviennent une sorte de mouroir pour plusieurs. La chaleur de certaines ampoules de forte puissance a un effet dévastateur sur leurs populations.

 

Une hormone appelée mélatonine
 

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a fait un lien entre le dérèglement de l’horloge biologique et certains problèmes de santé humaine. Une perturbation de la mélatonine, une hormone fondamentale qui est sécrétée lorsque nous dormons en l’absence de lumière, causerait des dérangements voire des maladies. L’insomnie serait une des conséquences du dysfonctionnement de cette hormone importante.

 

Des gestes simples

 

Contrairement à plusieurs problèmes environnementaux mondiaux, la pollution lumineuse peut être améliorée par des gestes simples et quotidiens tels que des choix d’ampoules et de luminaires moins éblouissants et dont les feux sont dirigés vers le sol. Nous pouvons penser d’éteindre le plus souvent possible toute lumière extérieure et d’utiliser des minuteries. Ainsi, le ciel étoilé, les aurores boréales et les étoiles filantes seront plus visibles tandis que les animaux nocturnes et notre santé se porteront mieux.

 

1 Delbecq Denis, 27 et 28 décembre 2014, Quand la lumière menace les animaux. Montréal : Le Devoir, page B6

 

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