Sonia Benezra : «Je ne regrette presque rien »

Élie Benchetrit, La Voix Sépharade, Montréal, décembre 2014

Icône du paysage culturel québécois, « la reine de TQS » se présente à nous dans ce que l'on pourrait appeler, une histoire vécue doublée d'une confession. Confession à sa famille, à ses amis et évidemment à ses milliers de fans qui l'ont aimée, soutenue et adulée inconditionnellement tout au long de sa vie et de sa carrière et qui souhaitent ardemment aujourd'hui la voir revenir sur les devants de la scène.

C'est Lise Ravary, longtemps rédactrice en chef de magazines prestigieux et collaboratrice occasionnelle à La Voix Sépharade qui signe sous ce titre son deuxième livre. Au cours de 186 pages, Sonia nous parle tout simplement d'elle-même, de sa vie, de sa famille, de sa carrière, de ses amours, de ses rêves, de ses croyances, de sa judaïté, avec cette spontanéité qui fait partie de sa personnalité de ce qui nous touche et qui nous fait redécouvrir une femme sensible, humaine et pétrie de valeurs solides qui lui ont toujours servi de rempart dans les beaux comme dans les moins beaux moments de sa vie.

Ce livre, je l'ai pratiquement dévoré en une journée. M'étant rendu spécialement pour la rencontrer la semaine dernière au Salon du Livre de Montréal, j'ai eu en plus du plaisir de revoir Sonia et Lise, ce merveilleux tandem fait pour s'entendre, le bonheur de me voir offrir leur livre. Il faut tout d'abord préciser que je connais Sonia depuis des années et que chacune de nos rencontres est marquée d'un indicible bonheur celui de sentir face à soi la présence d'un être cher qui a le pouvoir de réveiller en vous ce qu'il y a de meilleur et de plus altruiste. Les mystiques diraient que « l'on se sent touché par la grâce ».

Ceci pour la petite histoire que je mets en parallèle avec cette phrase écrite par Maya Angela, auteure et poétesse américaine décédée en mai 2014, qui figure en prologue à l'ouvrage : « j'ai appris que les gens oublieront ce que vous avez dit, ils oublieront ce que vous avez fait, mais ils n'oublieront jamais ce que vous leur avez fait ressentir » le ton est donné pour ce qui va être l'histoire d'une femme qui a toujours cru en ses capacités créatrices et celles de triompher dans le monde de la musique et du spectacle et d'imposer son talent grâce à son opiniâtreté. Vous découvrirez à travers les pages de cet ouvrage, une Sonia Benezra égale à elle-même, tantôt petite fille, tantôt femme et artiste accomplie qui ne se prend pas la tête, qui garde les pieds sur terre, malgré un palmarès impressionnant qui nos redécouvrir les centaines d’artistes qu’elle a eu le bonheur de rencontrer au cours de ses entrevues marquées et de la spontanéité, deux traits fondamentaux de sa personnalité. Les nommer ici exigerait des pages et des pages d'écriture, je voudrais citer cependant quelques célébrités telles que Paul McCartney des Beatles, Mike Jagger des Rolling Stones, Paul Anka, l'idole des années 50-60, Carole King, Leonard Cohen, Roch Voisine, Céline Dion bien sûr, et j'en passe. Le tout émaillé d'anecdotes, certaines amusantes d'autres carrément délirantes, voire même cocasses. Nous découvrirons, grâce à Sonia, ce monde du Show Biz où parfois l'ethnicité constitue un handicap plus qu'un atout pour ceux et celles qui ne sont pas de souche ou « tricotés serrés » et Sonia l'a pleinement vécu dans sa chair, parfois à ses dépens, à plusieurs reprises lors de sa carrière. Elle nous en parle avec tristesse bien sûr, mais sans rancune ni amertume une preuve encore de son humanité et de son optimisme.

Au chapitre de sa vie sentimentale, nous découvrons amusés le récit de ses premières amours de collégienne puis cette immense déchirure d'un grand amour trahi et brisé qui la laisse amère et vidée d'elle-même, car cette relation représentait pour elle, qui avait 40 ans à l'époque: « la dernière chance d'avoir des enfants », mais grâce à sa famille, à ses amis et surtout à sa force de caractère, elle décide de « reprendre sa vie en main ».

La famille représente pour Sonia la centralité de son existence, sa reconnaissance envers ses parents pour les sacrifices consentis. Perla, mère juive par excellence et Albert le père aimant qui, parti trop tôt, n'a pas eu l'occasion de connaître les succès de sa fille, ses sœurs, Kelly, Esther et Myriam à qui elle voue un amour inconditionnel, ses neveux devenus ses enfants, sa tante Biba et son oncle Max et leur fils le cousin Nissim atteint de sclérose en plaques et qui garde le sourire. Je ne peux m'empêcher de reproduire cette phrase que son père lui a enseigné : « La seule chose qui t'appartient vraiment, c'est ce que tu as donné aux autres »

Juive traditionnelle et attachée aux valeurs de cette religion où elle baigné son existence, Sonia a su garder la foi de ses ancêtres: Elle se dit « une juive qui vit pleinement ses origines marocaines » elle croit et elle prie, mais pas autant qu'avant nous confie-t-elle, comme si sa foi s'était abimée au fil des ans », mais elle n'a jamais renié ses origines de juive sépharade et tangéroise de surcroit, bien qu'elle soit née à Montréal. Elle a toujours tenu à garder fièrement son nom de famille de Benezra dans un univers où les Tremblay. Parent, Lepage ou Côté sont dominants.

Sonia, par sa personnalité et son parcours, fait honneur à notre communauté et malgré l'adage bien connu que nul n'est prophète en son pays, nous nous devons de nous sentir fiers d'elle et lui rendre ce petit hommage qu'elle a largement mérité, en nous procurant son livre et en le conseillant à nos proches et nos amis. Son histoire est égaIement par certains aspects, un peu la nôtre.

Je ne peux m'empêcher en tant que tangérois hispanisant, de reprendre pour conclure le refrain d'une chanson d'Eddy Marnay qui a écrit des chansons pour Edith Piaf et Céline Dion et dédiée à Sonia : « Mi reina, mi flor, te quiero » (ma reine, ma fleur, je t'aime).

 

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