De Palmarolle à Battambang

André Chrétien, Le Pont de Palmarolle, septembre 2014

Battambang, c’est où ça? C’est la deuxième ville la plus populeuse du Cambodge, pays du Sud-Est asiatique où habite et enseigne une citoyenne de chez nous : Audrée Vachon, fille aînée de Pierre Vachon et de Jocelyne Beaulieu, figures bien connues de tous à Palmarolle.

Audrée est présentement en vacances chez ses parents, après une année complète d’enseignement dans une classe de jeunes Cambodgiens inscrits à un programme basé sur la pédagogie d’apprentissage par la manipulation, le jeu et la découverte, méthode dite : Montessori, du nom de sa créatrice.

D’abord, après sa cinquième secondaire à la Cité étudiante Polyno, c’est au Cégep Ste-Foy qu’elle étudiera pendant deux ans en musique pour après accéder à l’Université Laval afin d’obtenir son baccalauréat en interprétation musicale d’une durée de quatre ans. Par la suite, elle fréquentera le conservatoire de musique pendant deux ans pour parfaire sa formation. Vous croyez peut-être que c’est fini! Mais non! Pour se rendre encore plus loin, c’est à Toronto qu’elle complétera une maîtrise en musique pendant un an. Et, quant à être dans la Ville Reine, pourquoi ne pas y demeurer une deuxième année pour une formation en langue anglaise, de même que pour l’obtention d’un certificat en pédagogie Montessori.

C’est à la fin de cette dernière année qu’elle fera, toujours à Toronto, la rencontre d’une dame… de Rouyn-Noranda qui était à la recherche d’un professeur de musique et de français bilingue. Elle posera donc sa candidature et obtiendra le poste.

En février 2013, cette même dame lui montra une offre d’emploi d’une association de parents cambodgienne qui cherchait une enseignante pour une classe de pédagogie selon la méthode Montessori. Possédant une maîtrise en musique, un certificat d’enseignement Montessori, parlant couramment l’anglais et le français, cette candidate leur apparut comme un cadeau venu du Canada, elle fut immédiatement embauchée. Mais, encore fallait-il oser, ce qu’elle fit, avec bien sûr un peu d’inquiétude et de nervosité. C’était un saut dans l’inconnu. C’est donc ainsi qu’en septembre 2013, Audrée se retrouva devant une classe de jeunes Cambodgiens parlant trois langues : l’anglais, le français et le khmer, cette dernière étant la langue usuelle dans ce pays, langue qu’elle commence déjà à maîtriser.

Ce fut donc toute une aventure que de sa familiariser avec cette mentalité sud-asiatique, ce climat chaud et humide, tellement chaud que le mercure peut atteindre 48C, on ne peut, dans ces moments, sortir au soleil à l’extérieur. Il faillait aussi s’adapter à une nouvelle cuisine, au minimum de confort qu’offre la résidence où l’on habite, à une saison des pluies où il pleut sans arrêt pendant trois mois… En un mot, tout est différent, il faut une bonne capacité d’adaptation… ce qui semble être le cas d’Audrée, car elle a déjà hâte d’y retourner à la fin d’août.

Qu’est-ce donc qui la motive à ce point? D’abord, elle adore son travail, elle aime ces gens, ils sont, dit-elle, d’une politesse, d’une délicatesse et d’une générosité sans borne. Pas besoin de vous dire que c’est réciproque, qu’elle est aussi aimée et respectée des enfants, des parents et de tout l’entourage. Pour ces gens, le professeur c’est la personne que l’on considère le plus parmi toutes les professions. Même s’ils sont très pauvres, ils sont prêts à vous donner le peu qu’ils possèdent, les marchands et les cultivateurs peuvent vous offrir gratuitement leurs produits. Il existe aussi une grande fraternité entre eux, c’est un milieu social tissé serré, mais ils demeurent toujours ouverts aux autres. J’ai reçu dès mon arrivée un accueil franc, merveilleux et surtout chaleureux. La majorité est de confession bouddhiste, est-ce cela qui les pousse à une telle harmonie entre eux? Cette même religion influence les comportements et les mœurs. Voici un détail plutôt amusant : une femme mariée peut porter un vêtement qui laisse les épaules découvertes, alors que cela n’est pas de mise pour les jeunes filles célibataires, mais, bien sûr, comme partout sur la planète, les jeunes passent souvent outre ces préceptes qu’ils jugent ringards.

Autre particularité de ce peuple, au dire d’Audrée, ce sont des gens « pas pressés ». Le temps compte peu pour eux, tout va lentement, il faut prendre les choses à mesure qu’elles se présentent, on ne court pas contre la montre, les Cambodgiens n’ont pas de montre… ils n’en n’ont pas besoin. Il y aurait encore beaucoup de détails à écrire suite à cette rencontre avec Audrée, mais notre espace est restreint.

Q : – Quels sont Audrée tes projets à court et à long termes?

R : – À court terme, je retourne au Cambodge pour un an. Je veux poursuivre cette belle aventure. J’ai, en plus de mon travail régulier, fondé ma propre école de musique, violon et piano, projet qui me tient à coeur. J’y accepterai près de 20 inscriptions pour 2014-2015, j’aurai le choix des candidats, car je devrai malheureusement en refuser autant. À long terme, je continuerai à oeuvrer dans le programme pédagogique Montessori, probablement dans d’autres pays : l’Inde, l’Indonésie et la Birmanie m’intéressent beaucoup. Puis je reviendrai un jour au pays, qui sait, peut-être qu’un jour j’ouvrirai ma propre école Montessori à Palmarolle…

Q : – Que retiens-tu de plus important de cette expérience cambodgienne?

R : – C’est pour moi une énorme ouverture sur le monde, une prise de conscience de la chance que nous avons de vivre ici dans une telle abondance. De ce fait, je me rends compte que l’harmonie et la bonne entente peuvent exister sans ces valeurs matérielles dont nous bénéficions dans notre civilisation à l’américaine. La possession de biens matériels n’engendre pas le bonheur…

Q : – Si tu avais un message aux jeunes de ta génération, ce serait quoi?

R : – Ce serait : Osez, foncez, sortez de votre zone de confort, allez voir ailleurs ce qui se passe. Cessez de dire des autres : « Ils sont bien chanceux », faites-la votre chance. Arrangez-vous pour ne pas dire dans quelques années : « J’aurais donc dû », il sera trop tard!

 

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