Un piano dans le garage

Denise Gagné, Le Sentier, Saint-Hippolyte, aout 2014

On ne le voit pas tout de suite en entrant. Il est modestement placé près de l’entrée, dans le minuscule bureau du propriétaire du garage Benlo, Benoît Laurin. Cependant, il détonne au milieu des outils, des pneus, des bidons d’huile à moteur. C’est un beau petit piano d’acajou et sa présence insolite s’explique très vite quand Sébastien Labelle, le mécanicien employé au garage, s’approche et s’installe au clavier.

Le fils de Benoit Laurin étudie la musique classique, explique le jeune employé. Ce piano était pour lui, mais comme il ne pouvait le monter jusqu’à son appartement, c’est ici qu’on l’a installé. Il faut dire que le propriétaire du garage est lui-même musicien et que la musique occupe une grande place dans sa vie. Ayant obtenu son DEP en mécanique à Saint-Jérôme, Sébastien a été embauché au garage Benlo il y a trois ans. Quand le piano est arrivé, je ne savais pas jouer du tout. J’ai commencé doucement, quand j’avais cinq minutes entre deux clients. Puis, l’hiver dernier, j’ai décidé de suivre une formation sur Internet et c’est comme ça que je me suis rendu compte que j’avais de la facilité à jouer. Maintenant, je peux reproduire pratiquement n’importe quelle mélodie à l’oreille, car je ne sais pas encore bien lire les partitions.

 

Des clients sous le charme

 

Le pianiste-mécanicien n’a pourtant pas beaucoup de temps à consacrer à sa nouvelle passion : il joue environ une heure par semaine, 10 ou 15 minutes à la fois. Il m’arrive de m’asseoir au piano en attendant un client et, quand je lève les yeux, je le vois entrer sur la pointe des pieds pour ne pas me déranger… j’ai même des demandes spéciales à l’occasion! raconte Sébastien en riant.

 

Un choix réfléchi

 

Excellent sportif, Sébastien Labelle a participé aux championnats régionaux de football de son école au secondaire, en plus de remporter le prix Einstein en mathématique. Il avait une moyenne de 98 % dans cette matière! Maintenant âgé de 25 ans, ce passionné de mécanique a plus d’une corde à son arc : Mais alors, pourquoi la mécanique? Sébastien sourit. Je ne voulais pas continuer l’école. Après avoir travaillé comme manœuvre dans la construction, j’ai réalisé que la mécanique automobile représentait davantage de défis : les nouvelles technologies nous obligent à rester à la fine pointe, il faut constamment mettre nos connaissances à jour. Il n’y a pas de routine dans ce métier! Il ajoute que le contact avec la clientèle et les services qu’il peut rendre ont beaucoup d’importance pour lui.

 

Plus qu’un simple passe-temps

 

Le piano lui a apporté bien plus qu’un passetemps agréable. Jouer du piano m’aide à décrocher du métier. Je me plonge dans la musique, je relaxe. Être un bon mécanicien demande beaucoup d’attention. Nous travaillons avec des matières dangereuses, des outils performants et une clientèle exigeante, souligne le jeune homme. La musique fera sans doute partie de sa vie, dorénavant. Il conclut avec chaleur : Peut-être même qu’un jour, je jouerai en duo avec ma mère! Il se remet au piano et c’est alors qu’on comprend pourquoi les clients entrent sur la pointe des pieds…

 

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