L’exposition BLEU dévoile au Parc maritime de Saint-Laurent

Normad Gagnon, Autour de l’île, l’Île d’Orléans, juillet 2014

Il y a bien des manières de raconter des histoires, de raconter l'Histoire. Mais quand cette histoire est la nôtre, le récit peut devenir touchant au point, parfois, de nous émouvoir profondément. Et si, de plus, elle nous est présentée par des artistes, s'ajoute à l'émerveillement l'expérience de la complexité humaine et de la multiplicité des regards. C'est à cette expérience que nous convie l'exposition BLEU dévoile durant tout l'été au Parc maritime de Saint-Laurent.

 

Clins d’œil sur les œuvres présentées

 

Avec Tous les bleus du fleuve, Pascale Scalabrini nous amène à reconsidérer le sens univoque de la couleur de l'eau en nous présentant une palette aquatique ouverte qui force à renouveler un vocabulaire chromatique devant désormais composer avec les algues et les herbes. Arthur Plumpton, lui, a planté ses deux chaises anciennes au beau milieu du champ comme pour nous rappeler, sourire en coin, que le monde ne s'est pas fait d'un coup, ce matin.

Ma boulaie blanche, d'Anne Gourdeau-Borgeat, extraordinaire lacis en teintes de gris, ne montre-t-elle pas une inventivité de la nature qui n'a rien à envier aux plus étonnants des fractals? Anne-Yvonne Jouan a su rendre, à l'aide d'une image sobre, dépouillée, mais très expressive, tout l'espoir du petit homme aspiré par le large… qui deviendra plus tard marin puis capitaine. Dans Le fleuve tranquille à Saint-Jean, Cathy Lachance nous invite à son tour près du fleuve, les pieds sur les crans, le regard portant loin, mais prenant bien soin d'englober notre coin de terre. L'observateur attentif – ou inspiré – entendra peut-être les échos lointains de la chanson Le ciel se marie avec la mer.

Philippe Pallafray nous présente un étrange objet avec le 7 en énigme, La porteuse de toit. La «chose à facettes», on le suppose, attend son heure pour nous éblouir de ses jeux de lumière réfractée sur le rideau azur de la scène. Bernard Desmeules se fait conteur et prête à la pierre le sens de la parole. Une parole riche en couleurs qui ne nous épargne ni les perles, ni l'ironie, ni les références à l'histoire. «Les pieds sur la bavette du poêle qui leur donnait la chair d'écorce […] ; ils chantaient les hymnes à la mer et dansaient sur les pas de leurs ancêtres.»

L'aube turquoise, de Monica Vallée, avec le charme de la belle époque et ce jeu de couleur passant du roux au turquoise, acquiesce à Arthur P. en représentant cet enfant qui nous ramène à la durée, au passage, à la courte vie des humains plongés dans d'immuables paysages.

Plus loin, c'est le Temps des fraises, de Chantal Gingras, véritable éloge à la vie, festif et enjoué, où l'art naïf réussit, comme il se doit, à nous émerveiller tout en faisant remarquer au passage que nous sommes du pays de la fraise et des beaux villages fleuris. En un tel lieu, nous ne pouvions nous priver de Moka, fidèle et doux compagnon. C'est du moins ce que Josée Beauregard nous laisse entrevoir dans cette représentation faite de sérénité et de tendresse. Dans Quai du nord, l'auteur-compositeur et interprète Michel Dufresne nous parle de ce «quai oublié sur l'estran, égaré dans le temps». Allusion sans doute à celui presque disparu de Sainte-Famille. Dans la chanson du même nom, il ajoutera avec une poésie émouvante et nostalgique

 

«[…] comme un mur qui s'enfonce

dans le sable et les ronces,

comme un pont qui se perd

dans la mer.»

 

Vincente Negrin quant à lui nous présente un magnifique Icare I, personnage qu'il nous montre démembré, les ailes et le corps brûlés pour s'être trop approché du soleil. Terre et métal n'ont jamais fait si bon ménage, mythologie et menaces modernes si heureux mariage.

Carole Fontaine, avec la Gardienne intemporelle, nous ramène aux origines – nous étions poussières – en utilisant la terre et le feu pour faire naître un personnage – que l'on soupçonne issu d'une fantasmagorie nippone – qui nous force à souhaiter pareille gardienne pour protéger la communauté humaine de ses errements. Avec Louise Lasnier, Une fenêtre s'ouvre. Pour laisser entrer un soleil qui s'éclate en douces taches de couleurs. Qui éclaire l'intérieur. Qui réchauffe le cœur.

 

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