Le droit au logement est fondamental

Sylvain-Claude Filion, L’Itinéraire, Montréal, le 1er juin 2014

Cette année encore, dans le jeu de chaise musicale qui se déroulera d'ici le 1er juillet, des centaines de ménages vont se retrouver sans toit – et sans autre recours, pour des jours, des semaines, qu'un hébergement temporaire. À quand l'application du droit au logement?

Le droit au logement est cité dans l'article 25 de la Déclaration universelle des Droits de l'homme, votée le 10 décembre 1948 : «le logement n'est pas seulement ce à quoi a droit tout individu, mais également ce qui lui permet d'accéder à une existence sociale, d'avoir une vie privée, de trouver un emploi ou encore de voter.»

Ce droit est toujours contesté par de nombreux États, dont les États-Unis. En 1976, le Québec et le Canada ont adhéré au Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). Pourtant, 35 ans plus tard, l'accès au logement ne s'est pas amélioré, bien au contraire. Le Conseil économique des Nations Unies, dans un rapport publié il y a quelques années, dénonçait que tous les locataires au Canada ne jouissent toujours pas du droit à la sécurité de l'occupation de leur logement On discrimine encore tes assistés sociaux, les pauvres, les endettés et les malchanceux, dont plusieurs travailleurs autonomes, forcés de déclarer une faillite personnelle. Voilà plus de 60 ans que l'on parle du droit au logement. Mais ce droit si vital, qui est à la base même des besoins exprimés dans la pyramide de Maslow, ne semble exister qu'en principe.

 

Des progrès … ailleurs

 

Depuis 1977, le Housing Act impose au gouvernement britannique l'obligation de fournir un logement permanent aux personnes dans le besoin. Depuis 1987, le Homelessness Act rend les sans-abri écossais prioritaires pour l'attribution de logements sociaux. Le droit pour chacun d'avoir un endroit décent et salubre pour vivre est aussi garanti constitutionnellement en France.

Malheureusement, au Québec et au Canada, ça piétine. À la suite de sa commission populaire itinérante sur le droit au logement, le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) révélait dans son rapport publié en mars 2013 que dans les causes soumises à la Régie du logement le «droit au logement) est une notion rarement évoquée. Le problème, c'est l'absence de volonté politique. Cela fait plus de dix ans que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse demande que le droit au logement soit enchâssé dans la Charte québécoise des droits et libertés. Un prêche dans le désert.

 

Un droit humain

 

Il y a trois mois, la nouvelle Politique nationale de lutte à l'itinérance déposée par la ministre Hivon citait la notion de droit au logement Mais là-dessus, on attend encore (au moment d'écrire ces lignes) de voir si le nouveau gouvernement libéral va appliquer cette politique favorablement accueillie par les milieux communautaires. Et l'assortir d'un plan d'action.

Mais voyons plus large : au-delà des itinérants, des poqués, des assistés sociaux qui sont contraints de consacrer jusqu'à 80 % de leurs revenus pour avoir un toit. L'accès au logement devrait être sanctionné au rang de droit fondamental avec un cadre juridique, afin qu'il soit protégé et aussi défendable que les droits civils et judiciaires.

Pour le moment, la loi du marché n'a que faire des logements sociaux. Et tes propriétaires du parc locatif l'ont facile en interdisant cigarette, chiens, chats et en excluant des locataires sur ta foi d'une cote de crédit qui n'a rien à voir avec la volonté, voire la capacité de payer son loyer. Seuls nos dirigeants peuvent changer la donne et travailler dans te sens de construire une société meilleure, en s'assurant qu'avoir un toit est ni un luxe ni une chance, mais bel et bien un droit humain.

 

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