Un couple et ses moutons

Marjolaine Jolicoeur, L’Horizon, MRC des Basques, avril 2014

Ghislaine Dionne n’hésite pas à se qualifier de « survivante ». Très malade pendant de longues années, elle consulte nombre de spécialistes, sans succès. Puis, on découvre qu’elle souffre de candidose (Candida albicans), qu’elle est allergique aux produits de conservation dans l’alimentation. Sa vie change : « La réponse est venue de la naturopathie. La nature est ma meilleure alliée ».

Son conjoint, Jean-Yves De la Durantaye, se définit lui comme un « passionné des moutons». Sa production ovine compte 250 animaux. Même si elle n’est pas certifiée biologique, ses moutons sont soignés grâce à l’homéopathie et nourris aux grains sans intrants chimiques ou résidus d’herbicides. « Les dangers du Roundop de Mosento, ça donne froid dans le dos », dit-il. Pour leur santé mais aussi pour celle des animaux et de la terre, le couple croit à une vie saine et simple, à une alimentation produite de leurs mains, avec leurs brebis et un grand jardin.

 

Une vie active

 

« Je vieillis et je suis de plus en plus en santé », mentionne Ghislaine Dionne très active sur la ferme – elle s’occupe de la comptabilité et de la traçabilité – tout en travaillant pour la Commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs. « Depuis une douzaine d’années, j’aide à la réalisation de divers projets, pour le Services d’Accueil, de Référence, de Conseil et d’Accompagnement (SARCA) à l’éducation des adultes. Autant sur le territoire des Basques que dans le Témiscouata ».

 

Modèle coopératif

 

Formé en agriculture, Jean-Yves De la Durantaye s’est impliqué dans l’UPA et la Coalition Urgence rurale. En 1980, il a fondé la première coopérative de mise en marché de l’agneau au Québec, la Coopérative de production ovine du KRT (Coop KRT). En 2007, elle changera de nom pour la Coopérative de solidarité des producteurs d’agneaux du Québec (CSPAQ), suite à une réorganisation provinciale et à l’ajout de nouveaux partenaires. Il en est présentement le président. Avec un chiffre d’affaires de 3 M$, la CSPAQ commercialise chaque année plus de 14 000 agneaux, dont 65 % sont abattus et découpés à forfait à l’Abattoir de Luceville. La coopérative est le deuxième acheteur en importance à l’Agence de vente. Une centaine d’éleveurs en font partie, dont plusieurs des Basques. En collaboration avec la Coopérative de développement régional (CDR), il pourrait être possible de développer un marché pour la laine ou la lanoline. Le projet est à l’étude. Pourquoi choisir le modèle coopératif? « Cela peut paraître cliché, nous répond Jean-Yves De la Durantaye, mais seul on peut aller vite, alors qu’à plusieurs on peut aller plus loin ».

 

Une mafia de la viande

 

Se regrouper en coopérative a permis aux producteurs d’être une force face à certains acheteurs d’agneaux qui contrôlaient le marché. « Les producteurs se faisaient manger la laine sur le dos! », lance l’éleveur ovin. Mais la concurrence reste féroce, avec l’agneau de l’Australie ou d’ailleurs au Canada, vendus moins chers que celui du Québec. Une concurrence déloyale pour Jean-Yves De la Durantaye. « Cette viande est de moins bonne qualité que la nôtre, son goût est différent, elle a été produite selon des normes moins strictes. Lorsque l’agneau de l’Ouest canadien est abattu au Québec, parfois on l’étiquette comme provenant d’ici. Il y a beaucoup de magouilles ». Sa conjointe ajoute même qu’il existe « une mafia de la viande». Alors que plusieurs fermes ovines ont récemment fermé leurs portes au Québec, le couple pense qu’il est urgent que le gouvernement instaure des mesures politiques pour soutenir l’agriculture « parce qu’elle contribue à nourrir notre monde et à faire fonctionner l’économie ».

 

 

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