Le trio Guitares Nomades : Après le labeur, le plaisir!

Gisèle Bart, Le Journal des citoyens, Prévost, avril 2014

Le samedi 15 mars à Prévost, que se réunissent trois amis aux antipodes les uns des autres, Alexandre Éthier à la guitare classique, Dan Livingstone à la «finger style» et Stéphane Tellier à la manouche, relevait déjà de l’audace. Qu’ils nous jouent tout aussi brillamment autant du Django Reinhardt que du Chopin tenait du défi.

Dès les premiers accords, Dame Beauté est sur la scène. Il pleut des étoiles. Puis, voici la course folle des doigts. Nous sommes passés sans transition des valses de Lauro à Sara puis à Reinhardt.

Je ne m’attendais pas à ce que l'on compose une pièce musicale sur du poulet frit… Merle Travais l'a fait en un Ragtime « effiloché » joué par nos comparses, suivi d'une marche mélancolique à la finale sublime, composée par un bluesman converti en pasteur, Gary Davis.

Les trois sont compositeurs et nous joueront de leurs propres œuvres. De plus, dans plusieurs airs, Livingston nous charmera de sa voix grave, de la même tessiture que son rire. Également, chacun aura son solo. Un solo manouche de Tellier, sa propre composition, contemporaine. Puis, de l'importance du poulet frit aux EU, nous passerons au rôle primordial des trains dans ce même pays avec une pièce de Livingstone. Une performance ! Quant à lui, Éthier nous régalera avec un compositeur qu'il affectionne tout particulièrement, Carlo Domeniconi. Magique! Enfin, avant la pause, avant Le petit bonhomme effréné de Tellier, le triumvirat nous servira sur une assiette en or un délice des dieux de Manuel de Falla.

Ce spectacle fut étonnamment éclectique. Après rien de moins qu’un Duke Ellington, nos guitaristes, comme des larrons en foire, se taquinèrent entre eux : « Jouer du Chopin avec un cow-boy, faut être fous ! » Belle folie ! Un enchantement qui se prolongea par un Villa- Lobos rêveur suivi d’un intrépide Chenail aux Corbeaux et d’un naïf Oiseaux. Passer de ceci à un Vivaldi annonciateur de printemps fut un passage logique et celui-ci fut joué avec une incomparable virtuosité. C’est bouleversé par la violence de certains policiers envers lui lors des événements de 2012 qu’Alexandre avait écrit la pièce suivante, Prelude to War, plus triste que revendicatrice, arrangée par Dan puis amalgamée à une autre pièce de Clarence Jefferson datant des années 1900 sur le même sujet. Quelques dernières flammèches, une pièce arrangée par Livingston. Puis ces trois « adulescents » nous dirent au revoir avec un Django Reinhardt dont ils semblent avoir emprunté la philosophie : «Après avoir bien travaillé, surtout, ne pas oublier de s’amuser ! »

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