Marmotte, paronymie et compagnie

Julie Gaudreault, L’Action de l’Est, Rimouski, février 2014

Le 2 février dernier, la marmotte a mis le nez dehors. D’où que provienne cette légende voulant que l’animal en hibernation possède une habileté pour annoncer le printemps, il est bien certain que sa réaction au sortir de son terrier n’est qu’un accident. Sous notre latitude, la prolongation de l’hiver jusqu’à la mi-mars est fort probable… Saviez vous qu’un paronyme est un mot dont la prononciation et l’orthographe ressemblent à celles d’un autre mot, mais dont le sens diffère? On l’aura deviné : la mise en scène de mon préambule comporte quelques paronymes et cette chronique traitera de paronymie. Hibernation et hivernation sont paronymiques. Un animal qui hiberne passe l’hiver dans un état d’engourdissement ou dans un sommeil comateux, état qui se traduit notamment par la baisse de sa température corporelle, alors qu’un animal qui hiverne se réfugie pendant l’hiver sous des cieux plus cléments. Ce n’est pas le cas de notre marmotte.

Le nom habileté désigne notamment un acte, un procédé qui est fait avec adresse et compétence ou intelligence. Il est parfois confondu avec habilité, du verbe habiliter, un terme relatif au vocabulaire du droit qui signifie capacité juridique à faire quelque chose. L’adjectif habile se rapporte par ailleurs aux deux termes, ce qui complique la situation. On peut être habile à fuir son ombre (pour faire rêver ceux qui aiment l’hiver) et habile à exercer une action d’un point de vue juridique. Par contre, on ne peut pas être habilité à déterminer la durée de l’hiver. C’est une impropriété en français. On doit plutôt dire que, selon la légende, la marmotte est capable de prédire la durée de la saison froide.

On aura remarqué l’emploi du nom incident, qu’il est possible de distinguer d’accident, même si les sens de ces paronymes sont proches. Un accident est un événement fortuit qui suspend ou modifie le cours des choses. Il peut être grave et malheureux ou entraîner des dommages, mais pas nécessairement. Un accident peut n’être qu’un hasard sans conséquence. Ainsi, que notre marmotte ait ou non vu son ombre est un pur accident. Un incident est également un événement inopiné qui perturbe le déroulement du cours des choses. On l’utilise toutefois pour insister sur le caractère anodin de l’événement qui survient inopinément, alors qu’on dit accident pour insister sur le fait qu’il s’agit d’un hasard. D’ailleurs, un incident est toujours secondaire par rapport à un fait principal.

Début février, il est raisonnable de croire que l’hiver se prolongera ou qu’il connaîtra une prolongation de plus ou moins six semaines. On emploie donc prolongation pour parler d’un accroissement en durée, alors que prolongement s’applique lorsqu’il s’agit d’un accroissement en longueur dans l’espace. Belle fin d’hiver à tous et à toutes, court ou long!

 

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