Ce n’est pas vrai tu n’es pas poche!

Serge Cloutier, Le p’tit journal de Woburn, décembre 2013/janvier 2014

Dernièrement, j’ai rencontré une jeune adulte au village. Je lui ai demandé où elle en était dans son parcours scolaire. « Ah! l’école ! m’a-t-elle répondu. J’ai lâché ça, j’étais trop poche. » Cette réponse m’a donné un coup au coeur. Voici ce que j’aurais aimé dire à cette jeune adulte. Tu n’es pas poche! Ce n’est pas à moi que tu vas faire croire ça. Je t’ai vue toute petite assise devant un ordinateur et tu étais tout sauf poche. Alors, quand tu m’as dit que tu étais trop poche pour aller à l’école, tu ne peux pas imaginer comment ça m’a fait mal. J’en aurais braillé. Qu’est ce qui s’est passé entre le moment où petite fille tu venais au Centre Internet et aujourd’hui?

Est-ce que tu savais que tu n’es pas la seule à penser ça? Je ne compte plus le nombre de jeunes adultes au village qui m’ont dit la même chose. Et pas juste des jeunes d’ailleurs. Plusieurs adultes m’ont confié : « Moi, je suis pas intelligent! » Pourquoi? Parce qu’ils n’ont pas réussi à l’école. Mais, il est où le problème? À l’école? À la maison? Au village? Peut-être un peu partout. Partout, sauf que de là à penser que tu es poche, il y a un monde. Je dis tu, mais je devrais plutôt dire vous, parce que vous êtes nombreux à penser ça.

Et ça, n’a rien à voir avec un secondaire V. C’est une question d’attitude. Une façon de voir la vie. Je parle de jeunes adultes qui démissionnent alors qu’ils commencent à peine leur existence. Et ça, moi, ça me révolte. Ça me rend triste à pleurer. Est-ce qu’on se prépare à avoir un village poche? Non, bien sûr! Ça n’existe pas un village poche.

Alors, qu’est-ce qu’on attend pour se brasser la cage? Pour aider cette jeunesse à retrouver la dignité, l’ambition. Et surtout la capacité de rêver. Parce que sans les rêves, la vie est une longue platitude. Là, c’est vrai que ça devient poche. Qu’est-ce qu’on leur dit aux jeunes? Arrête de rêver! Pense-toi pas plus fin que les autres! Pendant ce temps-là, qui s’occupe de les aider à faire leurs devoirs? Qui les aide à organiser des projets stimulants et valorisants?

Qu’est-ce qu’on attend pour leur permettre de rêver? De réaliser leurs rêves, de vivre des succès? Mais, qu’est-ce qu’il fait notre village pour les jeunes? On me répondra y’a pas le feu, ça va pas si mal. Eh bien oui! Au contraire, il y a urgence! Parce que c’est l’avenir du village qui est en jeu.

Le nouveau conseil municipal aura à discuter de taxes, de garage municipal, de déneigement et de bien d’autres dossiers importants. Mais j’aimerais rappeler que lors de la consultation du Tableau de bord, une quarantaine de personnes du village ont dit que la municipalité devait accorder une priorité aux jeunes. Le conseil a donc beaucoup à faire dans ce domaine. Et nous tous aussi. Comme le dit si bien un proverbe africain, ça prend tout un village pour élever un enfant. L’avenir du village existe déjà. Il est en train de se dessiner dans la tête des jeunes adultes qui y vivent. Alors il faut s’en occuper des jeunes! Sérieusement et maintenant.

Et si c’était notre résolution collective de 2014… Pour ma part, je souhaite aux jeunes du village une nouvelle année remplie de projets, de rêves, de fierté et de beauté. À leur image!

 

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