Lorraine Pagé, conseillère de ville : Elle habite le Sault-au-Récollet depuis bientôt 40 ans

Christiane Dupont, Journaldesvoisins.com, Montréal,  décembre 2013

À ceux et celles qui s’étonnent encore qu’elle ait fait campagne comme candidate du Vrai changement pour Montréal, aux côtés de Mélanie Joly, Lorraine Pagé ne se justifie pas. Elle s’explique simplement et précise qu’il s’agit d’abord d’un concours de circonstances, puis que les grands axes du parti lui convenaient très bien et, finalement, d’un lieu (ce parti) où elle avait « de la place » . «Mais c’est d’abord une histoire de vie qui a fait que je me suis présentée avec Mélanie Joly » souligne-t-elle d’emblée. 

« J’ai fait connaissance avec Mélanie Joly alors qu’elle était, comme moi, membre  du Conseil supérieur de la langue française, signale Lorraine Pagé. « Nous avons siégé et travaillé ensemble le temps  d’un mandat, soit 4 ans. Comme cela arrive souvent quand on travaille ensemble et qu’on côtoie les gens ajoute-t-elle, on a parfois des conversations informelles avec les gens où l’on discute de tout et de rien… Au hasard d’une conversation, j’avais dit à Mélanie que si j’avais fait de la politique, c’est au niveau municipal que je serais allée », dit-elle.

Voilà qui n’est pas tombée dans l’oreille d’une sourde! Au moment de se préparer pour lancer son parti et sa plateforme, l’aspirante candidate à la mairie a appelé Mme Pagé, et pas qu’une seule fois. « Elle m’a appelée pour me dire qu’elle se lançait en politique, au début de l’été, et m’a demandé de me présenter avec elle, notamment à la mairie de l’arrondissement. » Mais Lorraine Pagé refuse. À cinq reprises, elle refusera ainsi! 

En effet, la jeune aspirante à la mairie n’accepte pas un « non »! Et c’est cinq fois sur le métier qu’elle remet son ouvrage… communiquant à cinq reprises avec l’ancienne présidente de la Centrale de l’enseignement du Québec et résidante du district Sault-au-Récollet. Mélanie Joly lui disait : « J’ai besoin de femmes expérimentées autour de moi pour faire ce saut-là. »  « Elle revenait toujours à la charge! Je disais non, mais dans ma tête ce n’était pas réglé. Je continuais d’y penser. Mais en même temps, je me disais que j’étais à la retraite depuis dix ans et que j’avais redécouvert une qualité de vie. »

La politique : intense!

Lorraine Pagé était loin d’être certaine d’avoir le goût de « rembarquer » dans quelque chose d’aussi intense. En même temps, depuis qu’elle était à la retraite, elle avait donné plusieurs conférences sur le pouvoir des femmes. « J’’insistais toujours sur la place des femmes, et particulièrement la place des jeunes femmes en politique, dit-elle, la nécessité que les femmes accèdent au pouvoir ou soient dans les lieux de pouvoir ».

Lorraine Pagé rappelle que bien que les femmes ont obtenu le droit de vote en 1940, elles sont demeurées sous-représentées », dit-elle. Faisant valoir que les gens disent souvent que les jeunes ne s’intéressent pas à la politique et qu’il est difficile pour une femme de faire le saut en politique, elle a décidé de passer de la parole aux actes en aidant une jeune femme à accéder à la politique et en apportant elle-même sa propre contribution.  « Du coup, je me suis dit que j’étais sollicitée par une jeune femme, et que le moment était peut-être venu pour moi de passer à l’action et de contribuer par des gestes à ce que j’expliquais depuis des années, en appuyant une jeune femme. »

Des axes stimulants

Lorraine Pagé fait également valoir que les principaux axes du programme de Vrai changement pour Montréal lui convenaient très bien et qu’ils étaient stimulants.  Elle cite d’abord en exemple les questions de transparence et d’intégrité. 

« Ce que Vrai Changement pour Montréal propose, ce sont des mesure qui ont fonctionné à New York, comme la diffusion de l’information, des contrats en ligne », dit Lorraine Pagé. « On sait que l’une des façons de lutter contre la collusion, fait valoir Mme Pagé, c’est la transparence. Les propositions de Vrai changement pour Montréal permettent vraiment de changer la culture d’initiés, selon elle. « Quand on est sur le terrain du favoritisme, de la collusion, c’est toujours parce qu’existe un petit club d’initiés, affirme-t-elle. Et malheureusement, il faut souvent parler de « boys club » parce que c’est ça la réalité… », ajoute-t-elle. La nouvelle conseillère ajoute qu’à partir du moment où l’information est diffusée et rendue accessible, la donne change complètement. 

L’autre axe de Vrai changement pour Montréal qui a plu à Lorraine Pagé, c’est celui du  transport en commun. « Personnellement, je pense que les grandes métropoles du monde qui auront un avenir, ce sont celles qui vont être très proactives sur le plan du transport. » Elle fait valoir que lors qu’on parle du transport, derrière, on pense également au développement du territoire et les mesures que l’on met en place pour  favoriser la mobilité du territoire. Le transport en commun ne fait pas uniquement référence au transport, mais également aux questions de l’environnement, dit-elle, et aux questions d’accessibilité, notamment pour les personnes âgées et les personnes vivant avec un handicap. « Parler de transport, ce n’est pas que parler d’un moyen de déplacement, c’est parler de toutes sortes d’autres questions, c’est une des choses les plus structurantes du développement d’une ville », précise-t-elle.

Un autre axe de Vrai changement pour Montréal concerne les familles, tout un axe d’avenir, selon elle. « On sait que le départ des gens vers les banlieues,  c’est une façon d’appauvrir Montréal, souligne Lorraine Pagé. Si on veut que les gens restent en ville, il faut se demander comment on peut réussir à faire en sorte que les jeunes familles s’installent, restent ou reviennent à Montréal. » Et de préciser que cet axe fait également référence à  l’urbanisme, à l’aménagement du territoire, l’environnement, et le reste. 

« Bien sûr, prend-elle soin de préciser, ce n’est pas un programme détaillé comme dans d’autres formations politiques qui ont eu plusieurs années pour faire leur programme. Mais les grands axes principaux importants se retrouvaient dans le programme."

Contribuer au débat

Lorraine Pagé appréciait le type d’intervention et la philosophie portés par Vrai changement pour Montréal. « La ligne de parti n’est pas trop rigide, dit-elle, et pour ma part c’était un net avantage durant la campagne électorale, et depuis. » Elle fait valoir qu’il y a des gens issus de tous les milieux au sein de ce parti, jeunes, gens d’affaires, gens du milieu de l’éducation ou de l’environnement, du secteur des affaires sociales, etc. À son avis, cette combinaison de candidats donnait de l’espace aussi pour insuffler une vision des choses et influencer le débat à l’interne alors même que les gens se prononçaient sur une diversité de questions.

« Je pense que j’aurais trouvé difficile d'arriver au sein d'un parti et d’être trop prisonnière de la ligne de parti pour faire valoir mes idées, pour contribuer au débat, peut-être, ajoute-t-elle candidement,  à cause du moment où je suis dans ma vie… »

On se doute bien que Lorraine Pagé avait déjà été approchée par des partis politiques pour faire le saut en politique alors qu’elle était présidente de la Centrale. Elle confirme : à la fois le Parti québécois et le Bloc québécois l’ont courtisée. « J’ai déjà été aussi approchée par Louise Harel, au niveau municipal, mais je commençais ma retraite, dit-elle. Je n’étais pas prête, j’avais besoin de recul, j’avais besoin de prendre une distance par rapport à la vie publique. »

Il faut dire que le fait d’avoir été présidente d’une des plus importantes centrales syndicales québécoises pendant 11 ans lui a fait mener une vie publique intense au cours de toutes ces années. « J’avais besoin de me recentrer sur mon monde. Nécessairement, on néglige les gens qui nous sont chers quand on occupe un poste semblable, parce qu’on est toujours partis, notamment », fait-elle valoir.  

Quarante ans en juillet

Il y aura 40 ans en juillet que Lorraine Pagé habite sa maison du district de Sault-au-Récollet, dans l’arrondissement. Le premier appel de Mélanie Joly fut donc pour lui demander de se présenter à la mairie. « Mais ça ne m’intéressait pas! », lance-t-elle. Elle soutient qu’il faut avoir l’humilité de son parcours! « Rien ne me préparait directement à assumer un poste comme maire d’arrondissement » affirme-t-elle. Comme conseillère, elle croit que les compétences et les habiletés quelle a pu développer et les connaissances acquises, notamment celles ayant trait à son district qu’elle a appris à connaître au long de ses presque 40 ans, allaient pouvoir lui servir. « Je me suis dit que c’était un défi que je me sentais capable de relever et d’assumer. » (Elle ajoute : « C’est pas tout de le relever, le défi, il faut pouvoir l’assumer! »)

Mais elle n’aurait pas envisagé de se présenter dans un autre coin de la ville. « C’est ici que je suis depuis 40 ans, c’est ici que j’ai planté ma tente », précise-t-elle. Au fil des ans, malgré son engagement syndical très prenant et sa famille (elle a deux filles et, maintenant, quatre petits-enfants), Lorraine Pagé a participé aux activités des amis du boulevard Gouin, a fait partie de la Société de conservation du Sault-au-Récollet, du comité consultatif sur le réaménagement des berges du parc de l’Île de la Visitation. En outre, ses filles ont fréquentés les écoles du quartier : St-Isaac-Jogue, La Visitation, et Sophie-Barat.

Prof d’histoire

Née à Montréal, de parents et de grands-parents montréalais, elle a vécu son enfance dans le Centre-Sud, puis plus tard dans le quartier Villeray. Une fois adulte, elle a habité le Plateau, et, finalement, s’est porté acquéreure d’une maison dans le district du Sault-au-Récollet.

Après avoir fait des études à l’École normale, et munie de son diplôme universitaire en pédagogie et de son brevet d’enseignement, elle est devenue professeur d’histoire au secondaire. Pendant une dizaine d’années. 

D’enseignante au niveau secondaire, elle est passée au secteur primaire en même temps qu’elle commençait ses activités comme représentante syndicale. Bientôt, elle devient vice-présidente de l’Alliance des professeurs de Montréal, puis vice-présidente de la CEQ, pour revenir à l’Alliance comme présidente, et de là à la CEQ comme présidente. 

L’humilité du rôle

Comment voit-elle son rôle de conseillère? « C’est un rôle qu’il faut aborder avec humilité, dit-elle. C’est un privilège que d’être élue. » Selon elle, la conseillère est au service des gens, pour écouter leurs préoccupations. « En même temps, souligne-t-elle, il faut avoir l’humilité de dire qu’on ne connaît pas tout, qu’on ne sait pas tout! » Pour elle, les élus ont l’occasion de contribuer à faire avancer les choses, mais ne peuvent pas tout changer. Selon elle, c’est aussi une fonction qui commande l’intégrité. « On n’est pas là pour faire copain-copain avec un et l’autre ou pour profiter de la situation, on est là pour représenter des gens. »

Lorraine Pagé croit avoir appris de l’enseignement la capacité d’écoute. « J’ai aussi appris par mes fonctions syndicales les exigences du mandat de représentation. Je pense que ce mariage va certainement m’aider dans l’accomplissement de mes fonctions. » Fonctions qu’elle estime, par ailleurs, complexes, en ayant pris la mesure depuis la courte période de temps où elle a été élue. « Les questions ne sont pas simples, dit-elle.On a parfois à gérer des attentes différentes chez nos électeurs », dit-elle.  Elle fait valoir que ce sont parfois des attentes contradictoires. « Il faut prendre le temps de bien expliquer les enjeux, et ce qui est mieux pour le bien commun… Pourquoi telle solution est plus respectueuse du bien commun… », précise-t-elle.

Une bonne équipe

Pour Lorraine Pagé, l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville est un arrondissement dont on peut être fiers« C’est un bel environnement où il y a beaucoup de parcs, d’espaces verts, de verdure, incluant les berges de la rivière. Il faut tabler sur nos forces! », croit-elle.

Elle constate par ailleurs que les conseillers bénéficient d’une excellente équipe de soutien à l’arrondissement. « Ça nous simplifie beaucoup la vie, dit-elle. Elle se fait déjà un devoir de répondre à tous ses courriels, ses coups de fil. « Quand j’étais présidente de la CEQ, dit-elle, je répondais à tout mon courrier », souligne-t-elle. « C’est certain que les gens sont contents si on répond à leur demande, mais le plus important c’est d’abord de leur répondre.

Si le travail qu’elle fera comme conseillère contribuera à rendre encore plus intéressant l’arrondissement pour les résidants, elle pourra se dire que son mandat a été utile!, croit-elle. Mais par rapport à la Ville de Montréal, elle est d’avis qu’il faut impérativement rompre avec le passé. « On sort d’une tourmente qui a duré trop longtemps! On était presque gênés de dire qu’on était Montréalais », lance-t-elle. 

Selon elle, il faut dorénavant une administration compétente, efficace et intègre pour Montréal, en même temps qu’il faut remettre Montréal en mouvement aux plans de l’économie, du développement social, et des transports. « Il faut que Montréal  entre au XXIe siècle de plain-pied », dit Lorraine Pagé. Et son histoire de vie peut certainement contribuer à réaliser ce souhait.

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