Les Belles Histoires de Sébastien Dodge

Sylvain-Claude Filion, L’Itinéraire, Montréal, le 15 novembre 2013

Auteur, metteur en scène, il est partout là où on sent que les choses vont évoluer sur la scène théâtrale. Mieux qu'un jeune loup, il est peut-être le leader d'une nouvelle génération de créateurs. Depuis Dominion à Espace Libre, on le qualifie de «Quentin Tarantino de la mise en scène» et ce mois-ci, il incarne Séraphin dans une adaptation du classique Un homme et son péché.

Le jour de l'entrevue, nous sommes à quelques heures de la naissance de son premier enfant – ce sera une fille, Clara – et il ne laisse transparaître aucune nervosité. Pas de doute: Sébastien Dodge est aussi bon acteur …

Le grand gaillard aux yeux e ardents se fait discret dans le café équitable de la rue Beaubien où il nous a donné rendez-vous. Comme comédien, il n'est pas très connu du grand public. Il a joué quelques utilités au TNM, et à la télé, des troisièmes rôles «comme lancer une poignée de change sur une table dans un épisode de 30 vies … » sourit-il, en dévoilant deux rangées de dents éclatantes.

Mais il est au coeur de la génération montante au théâtre, traçant son sentier propre au fil des expériences où transparaissent de plus en plus sa passion pour l'histoire. «Je me sens un peu seul de ma gang! On est dans le propos, c'est un chemin aride, ingrat, qui donne très peu de résultats tangibles. On n'est pas dans le clinquant, le vendeur, on est plutôt exigeant dans ce qu'on demande du public.»

Cette passion pour le théâtre politiquement engagé est née spontanément chez Dodge – un patronyme hérité de son ascendance germanique. Engagement politique et interprétation de l'Histoire sont vite devenus ses leitmotivs. Avant même de terminer ses études, il passe les étés 1999 et 2000 à présenter dans les parcs de la Montérégie une trilogie sur la corruption municipale. Visionnaire, en plus ..

 

Marques distinctives

 

Son épiphanie survient à 19 ans à l'occasion d'une tournée théâtrale en Pologne. «Avant ça, je n'avais aucune ouverture sur le monde», avoue-t-il. Il choisit le Conservatoire d'art dramatique parce que l'architecture de la bâtisse l'attire. «C'était un attrait purement esthétique! Je suis de la dernière promotion qui a étudié dans l'ancien palais de justice.» Peu attiré par le roman, il se découvre une passion pour les ouvrages historiques, qui nourrissent son inspiration. Il dit «essayer» d'être politiquement engagé parce qu'il est «motivé par l'indignation».

Écrire et mettre en scène, c'est aussi une façon d'établir ses marques distinctives, lui qui s'ébroue également au sein du groupe country swing Véranda, qui se produit parfois dans les buvettes branchées du Plateau. «C'est difficile d'être acteur aujourd'hui, personne ne semble prendre ça au sérieux, que c'est un vrai métier. On voit de plus en plus de non-acteurs au cinéma, ça donne le message que n'importe qui peut faire ce métier», soupire-t-il.

Après les représentations de Viande à chien (et l'adaptation à son nouveau rôle de père) Sébastien Dodge poursuivra l'écriture d'une nouvelle pièce qui devrait voir le jour à l'automne 2014. «Ce sera sur la chute de Rome et sur la damnation éternelle de l'homme, qui est un loup pour son prochain. Une critique des systèmes qui s'écroulent, explique-t-il. Il y a beaucoup de parallèles à faire avec notre monde occidental d'aujourd'hui.»

 

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