Une nuit éclairante

La Quête, Québec, novembre 2013

« II était jeune, je dirais même plus jeune que moi» raconte Alexis, 16 ans, qui poursuit : « Il est venu à la friperie et il cherchait des couvertures. Il m'a dit qu'il n'avait pas vraiment d'abri. Ça m'a choqué, je n'aurais pas cru qu'un jeune de son âge se retrouve dans cette situation-là. On s'attend à ce que ce soit des adultes …»

Il n'y avait pas que la pleine lune pour éclairer la ville de Québec le 18 octobre dernier. La 12e  édition de la Nuit des sans-abri (NSA) battait son plein et laissait la lumière sur un phénomène qu'on préfère ignorer l’itinérance. C'est pour qu'ils se familiarisent avec cette réalité, que Valérie Laflamme Caron, intervenante en pastoral au collègue de Lévis, a invité 29 élèves, dont Alexis, à l'accompagner à la NSA.

 

Bénévoles à la friperie

 

Ces jeunes voulaient comprendre, mais aussi aider, alors ils ne sont pas arrivés les mains vides. Au cours des semaines précédentes ils ont réussi il amasser 345 vêtements, dont 70 manteaux. Faute de moyen de transport – de moyen tout court!- ils ont trimbalé à pied le  fruit de leur collecte du traversier au parc St-Roch, où se tenait l'événement. Leurs dons se sont ajoutés à  d'autres, sur les tables converties en friperie. C'est là qu'ils ont établi leur premier contact avec les moins bien nantis.

Un service personnalisé cinq étoiles, voilà ce qu'offrait Zachary qui prenait le temps de chercher, jusqu'à ce qu'il déniche quelques piètes qui plaisaient réellement à qui elles étaient  destinées. Chaque fois, ça le rendait heureux d’avoir fait la journée de quelqu’un.  «Un monsieur voulait payer les vêtements, rapporte Zuchary. Il disait qu'il n'était pas riche, mais pas sans-abri.» J'ai dû lui répéter plusieurs fois «tout est gratuit pour tout Ie monde », La misère n'annihile pas la dignité!

« aut que tout le monde vive ça, la Nuit des sans-abris» lance Zachary, après avoir révélé avec un certain malaise quelques-uns des commentaires que son entourage lui a fait par rapport aux itinérants. «Le monde a de la misère avec ça! Plusieurs m'ont dit: les itinérants sont lâches… »

«Tout le monde pense qu'ils ont juste il se trouver un job, mais quand t'es dans la rue, c'est pas si simple que ça de te préparer, de laver ton linge … », enchaîne Marie-Eve, qui a discuté longuement avec un gars qui a connu la rue. «C'est vraiment pas facile», lui dit celui qui a tout de même réussi à se trouver un emploi.

Quand Isabelle annonce au monsieur devant elle que la friperie ferme, il pète sa coche. Décontenancée par cette réaction démesurée, elle se tourne vers l'équipe qui lui explique alors que les problèmes de santé mentale peuvent être l'une des raisons qui mène li la rue.

 

Autour des braseros

 

Après la fermeture de la friperie, les 6 invincibles, ces élèves qui sont restés jusqu'à 6 heures du matin, se sont mêlés aux autres participants. Là, une rencontre inopinée a sorti Elizebeth de sa zone de confort… Un homme s'est approché d'elle et l'a embrassé sur la joue,  avant même de se présenter. Ce geste spontané a littéralement surprit la principale concernée. Sentant le malaise d'Élisabeth, une habituée du groupe s'est porté à la défense de la jeune femme, particulièrement touchée par cette marque d'attention.

La nuit a été longue et, même en se tenant tout près des braseros, les élèves ont eu un peu froid, mais sont ravis de leur expérience. «J'ai jasé pendant une heure avec un gars qui s'en est sorti», raconte Félix. Il est venu à  il la nuit parce qu'il connaît les gens. Il a réussi à faire des études et il a un appartement. Je l'ai trouvé vraiment sociable, pis il était allumé!», a-t-il insiste. Cela laisse croire que Félix, comme tant d'autres, pense que seuls les moins « brillant» peuvent se trouver à  la rue!

Alyson s'attendait à rencontrer que des gens malheureux, sans but, ni projet. «Les gens nous parlaient de leur rêve et l'ambiance était vraiment bonne! On était autour du feu et on chantait» rapporte Élisabeth. «On se sentait proche les uns des autres, même si on venait juste de se connaître» insiste Alyson.

 

Mission accomplie

 

Si on se lie à ces 6 élèves, la NSA rencontre ses objectifs de sensibilisation à l’itinérance. Ils  n'ont pas été frappés par les comportements délinquants de quelques-uns des participants ou par la marginalité des gens qu'ils ont rencontrés, mais par la ressemblance de ces humains qui, tout comme eux, s'entraident, rient, rêvent et sont fiers! Avez-vous l'intention d'y retourner l'an prochain ? Oui, ont-ils répondu, tous en chœur!

classé sous : Non classé