Les Weedonnais campent sur leur position

Jean-Claude Vézina, Le Haut-Saint-François, Cookshire-Eaton, le 23 octobre 2013

Plus de 150 personnes de Weedon se sont déplacées à la salle Guy-Veilleux de Cookshire-Eaton pour manifester leur opposition à regrouper le CHSLD et le CLSC dans un même bâtiment et, par la même occasion, de voir le nombre réduit de lits.

Bien que la soirée se soit déroulée dans le respect, malgré une ou deux sautes d'humeur lors de certains propos, les citoyens campent sur leur décision. Le Conseil municipal a, pour sa part, déposé une résolution semblable. Elle reste sans équivoque. On demande au conseil d'administration du Centre de santé et de services sociaux de la MRC du Haut-Saint-François de s'opposer à ce projet. On ajoute qu'il faut améliorer les édifices où se succèdent les interventions du CSSS à Weedon et de ne pas retirer des lits au CHSLD.

Renée-Claude Leroux est citoyenne de Weedon. Elle a réagi à l'intervention de Cécile Tellier-Roy, membre du C.A. du CSSS. Cette dernière considère que les Weedonnais « sont peureux en refusant la proposition mise de l'avant par Mario Morand », dg des CSSS des Sources et du HSF. « Au contraire, réplique Mme Leroux, cette population est prudente. » Faisant référence aux promesses du directeur précédent, Jacques Boissonneault, de ne pas fermer de lits de soins de longue durée, elle rappelait que l'engagement n'avait pu être tenu.

Pour justifier les modifications importantes proposées au C.A. du CSSS, M. Morand annonçait que dans un premier temps, une subvention de 1,9 M$ n'était pas suffisante pour effectuer les travaux. Pour toutes les réparations, le montant était estimé à 5,5 M$. Il expliquait que parce que la somme dépasse le 5 M$, il faudrait des années pour les inscrire aux futurs plans quinquennaux, comme ce fut le cas pour la construction du CHSLD d'East Angus. Il soulignait que « le CLSC ne vaut pas la peine d'être réparé », ce qui a soulevé une vague de contestations dans la salle.

Les objectifs de ce profond remaniement des installations Weedon reposent sur la volonté de s'approcher des ratios provinciaux. On vise un équilibre de «lits» entre East Angus, 60 % et Weedon, 31 %. On réduirait les coûts d'entretien, ce qui serait plus facile dans un seul bâtiment. Selon les statistiques des 3 dernières années, il y aurait 2,9 lits pour 100 citoyens et sans liste d'attente. Actuellement, 6 lits sont libres à Weedon. Poursuivant les données recueillies, M. Morand expliquait que 30 % des personnes admises ont un profil inférieur à ce qu'il devrait être pour demeurer dans un CHSLD. « Certains malades peuvent être maintenus à domicile. D'autres devraient se retrouver dans des établissements pour ressources intermédiaires. » D'ailleurs, sur le sujet, il rappelait qu'une telle ressource sera disponible autour de Weedon et elle contiendra 10 lits pour personne en perte cognitive d'un niveau modéré. Et 35 % des lits sont occupés par des gens qui arrivent de l'extérieur et 15 % proviennent de la zone d'East Angus. Le rapport produit par Raymond Chabot Grant Thorton pour l'ASSS l'été passé soulignait que dans la MRC, il y aurait 22 lits de trop.

Pour l'instant, nous apprend M. Morand, le budget pour le soutien à domicile est de 35 % dans le HSF et le gouvernement fixe la barre à 45 %. C'est qu'avec une enveloppe de quelque 33 G$, il n'est pas possible d'héberger tous les patients dans les CHSLD. On doit mettre l'accent sur les soins à offrir à la maison. Actuellement, le taux de roulement dans l'utilisation des lits pour soins de longue durée tourne autour du 40 %. Chaque année, on dénombre environ 40 décès.

Michel Besner, membre du C.A. du CSSS, représente les usagers. Il rappelle que les gens en CHSLD y restent moins de deux ans. Selon lui, « un lit peut se remplir 3 ou 4 fois dans l'année. » Pauline Beaudry, représentante des organismes communautaires au CSSS, s'inquiète. Avec les statistiques portant sur le vieillissement de la population, elle veut s'assurer qu'il ne manquera pas de lits dans quelques années. M. Morand répond: «On a tenu compte des données démographiques, c'est pris en considération. »

Renée Paquette, citoyenne de Weedon, rappelle que la population désire: « Nous voulons bonifier les acquis et non les perdre. Nous ne voulons pas que vous, les membres du C.A., vous adoptiez la proposition, peu importe leur promesse. » De plus, elle doute de la qualité des soins dans le réseau privé des ressources intermédiaires. Elle craint, entre autres, que l'hygiène et les programmes de stimulation soient déficients.

Denis Rondeau travaille à l'Hôpital d'Youville de Sherbrooke. Il affirme qu'avec 35 % du budget accordé au maintien à domicile, c'est la proportion la plus importante au Québec. Il rappelle aussi que l'an passé, « on a fait sortir un dentiste » pour appliquer cette économie dans ce service. Questionnant M. Morand, il lui demande quand il a changé ses orientations par rapport au budget de 1,9 M$ pour effectuer des réparations et tout réunir dans un même édifice. En réponse, M. Morand explique que rien ne s'est fait en catimini. « La réflexion s'est fait avec Luc Langlois, directeur du soutien à l'autonomie des personnes âgées, Nathalie Bois, directrice des ressources financières, techniques et informationnelles, des architectes et un représentant de ASSS. » Il ajoutait que: « Quand on a vu que ça faisait du sens, le C.A. a décidé d'explorer l'hypothèse du regroupement des 2 bâtiments. »

Le docteur Yves St-Pierre connaît le CLSC par coeur et il en a suivi l'évolution à travers plus de 40 ans de pratique à Weedon. Il trouve qu'il est « intolérable d'amputer des lits parce qu'il y a trop de roulement au CHSLD. » De plus, il a observé que les diagnostics des patients étaient sous-évalués ce qui permettait d'en refuser et qu'encore, dans bien des cas, il était posé en l'absence de la parenté. Il fait remarquer enfin que la participation financière du milieu avait contribué à éponger des déficits et à augmenter le nombre de lits, ce qui méritait d'entrer dans la balance.

Dans la controverse, à savoir s'il y a toujours suffisamment de places disponibles dans le CHSLD, Roger Nadeau raconte que pour son épouse atteinte d'Alzheimer, il n'y en avait pas au début de l'été. Il a dû aller à Wotton qui a fermé ses portes un peu plus tard. La conséquence en a été d'un autre déménagement à la Résidence St-Janvier de Weedon. Elle y est entrée le mardi et le samedi suivant, elle se jetait par la fenêtre du 2e. Après un séjour de 3 ½ semaines au CHUS, elle repose handicapée, au CHSLD. La non-disponibilité de lit a laissé dans la vie de M. Nadeau une souffrance indélébile dont il aurait pu se passer, racontait-il. La prochaine réunion du C.A. du CSSS aura lieu le 20 novembre pour, qu'au cours de la rencontre, la proposition de fusion et de coupure de lits soit décidée.

 

Des mesures sévères de contrôle

 

Au lendemain de la réunion du C.A. du Centre de santé et de services sociaux (CSSS) du Haut-Saint-François qui réunissait quelque 150 citoyens de Weedon, M. Morand, dg du CSSS des Sources et du Haut-Saint-François, a souhaité rassurer la population du village. Les Weedonnais ont manifesté leur opposition à regrouper sous un même toit le CLSC et le CHSLD et à subir des coupures de lits.

Au cours d'une conversation téléphonique, M. Morand s'est fait rassurant. Dans le réaménagement des équipements et immeubles du CSSS à Weedon, il est fait mention qu'une ressource intermédiaire pour personnes en pertes cognitives modérées disposerait de 10 lits. Il n'y a pas de services publics pour ce genre de patient, expose-t-il dans un premier temps. Il indiquait qu'à Sherbrooke, un tel promoteur a une bonne expérience dans le domaine, ce qui n'en fait pas pour autant celui qui fournira l'hébergement à ces 10 patients dans le HSF.

Mais cette ressource privée assure-t-elle des soins d'aussi grande qualité que le réseau public? Rappelons que la veille, il avait été fait mention d'un taux de satisfaction du CLSC et du CHSLD tournant autour du 90 %. En réponse, M. Morand explique que l'Agence de la santé et des services sociaux (ASSS) a rédigé un programme de procédures pour régir ce type d'établissement. Dans un premier temps, il y a appel d'offres pour trouver un promoteur. Celui-ci doit satisfaire à toute une série de conditions pour recevoir l'accréditation de l'ASSS. Le protocole qui détermine le fonctionnement de l'entreprise et la participation du CSSS décrit les exigences qui garantiront le bien-être des hébergés. Et il est strict, rappelle le directeur général.

L'ASSS et l'inspecteur assurent un minimum d'une inspection par année. Par contre, avec l'entente de partenariat entre le CSSS et le promoteur, les visites sont fréquentes. « On verse assez d'argent ! Ça nous donne le droit de vérifier ce qui s'y passe », avance-t-il. Le dg ajoute que l'expérience de l'organisme Carpe Diem de Trois-Rivières peut servir de modèle pour définir les relations entre les partenaires et les patients.

Si les vérifications démontrent qu'il y a négligence ou que des aspects du contrat ne sont pas respectés tant au niveau des services que des équipements, l'ASSS peut mettre fin à l'entente. Cela touche la salubrité, le respect de la médication, les soins apportés aux malades, qu'il donne en exemple. « On va loin dans la vérification », ajoute-t-il.

Selon des rumeurs, un entrepreneur d'Asbestos aurait des visées pour s'installer à Weedon? La réponse de M. Morand est catégorique. Si ce promoteur désire devenir ressource intermédiaire, il n'a qu'à suivre les procédures. Agacé, il fait remarquer que ce n'est pas une commission Charbonneau qu'il doit craindre. Tout le monde est astreint à passer par les mêmes chemins pour obtenir cette responsabilité.

En ce qui concerne la vente du CLSC de Weedon, le dg explique qu'il ne sera pas vendu à n'importe qui. Encore une fois, répète-t-il, il y a des procédures à suivre pour acquérir un bâtiment public. Ce genre «d'établissement excédentaire» doit être déclaré à l'ASSS. Par la suite, on fait une vérification pour s'assurer qu'aucun organisme public n'en aurait besoin. La Sûreté du Québec, les établissements scolaires en sont quelques exemples. Encore, l'ASSS voit à ce que cette ressource ne soit pas liquidée à vil prix. « Tout est très réglementé », rappelle-t-il aussi. Et le marché est testé pour établir des comparaisons.

C'est à la suite de ces étapes qu'on affiche les appels d'offres et l'Agence est libre de refuser les propositions si elle les juge inadéquates.

M. Morand affirme qu'il respecte les inquiétudes des résidents de Weedon. Il se veut ouvert et il est prêt à répondre aux interrogations des gens pour que tout se passe bien. « On ne veut pas nuire à la population, on documente cette possibilité de fusionner les bâtiments et couper des lits et d'ajouter des ressources intermédiaires  », conclut-il.

Lors de la rencontre du 20 novembre prochain, les membres du C.A. prendront position sur le projet déposé.

 

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