La force de la communauté pour se consoler et ne pas oublier

Johanne Carbonneau et Serge Cloutier, Le p’tit journal de Woburn, aout 2013

L'émotion est palpable, ce vendredi 12 juillet, alors qu'une centaine de personnes de tous âges se rassemblent au terrain de jeux de Wobum pour vivre et traverser ensemble la tragédie de Lac-Mégantic.

Les gens arrivent de partout, se serrent la main, se font la bise, un clin d'oeil, un sourire entendu et se rejoignent en petits groupes. D'autres préfèrent errer seuls. On se permet de vivre tristesse, apaisement, anxiété, douleur, et tristesse encore. La colère tente de s'insinuer, mais on l'a retient pour l'instant. Le temps des comptes n'est pas venu.

Un profond respect pour la douleur exprimée flotte dans l'air, bien visible. Tout autant que les émotions et l'état de choc qui collent à la peau et que le temps aura du mal à effacer. Un premier quart de Lune lance un regard en coin.

20 heures, on allume les bougies pour observer une minute de silence. Une légère brise fait vaciller les flammes à l'image d'un espoir fragile, celui que plus jamais un tel désastre ne se produise. Des bougies s'éteignent, on s'empresse de les rallumer. Il faut donner une chance à la vie, à la lumière. Dans le silence, l'assistance se recueille sous les nuages roses de la fin du jour. Certaines personnes se tiennent par le bras, d'autres se rejoignent dans leurs pensées. Toutes témoignent de leur solidarité et de leur chagrin.

Puis, la minute de silence cède la place à une musique calme qui diffuse cette phrase toute simple et apaisante: «Paix, amour et lumière sur la Terre et dans mon coeur», «Paix, amour et lumière sur la Terre et dans mon cœur». Parmi les bougies qui frémissent, des flammes vacillent plus que d'autres. Les mains qui les tiennent ont du mal à contenir leur souffrance. On offre des fleurs au conjoint, à la fille, au gendre, au fils, au petit-fils, à la mère et au père de Sylvie Charron, une des victimes de la tragédie. Des proches les entourent discrètement, chaleureusement, tout en sachant qu'il sera impossible de répondre à la seule question sans réponse. Pourquoi?

Le cercle se défait, les petits groupes se reforment, c'est le temps de parler. Des anecdotes, des faits troublants, des événements blessants. Quelques rires, beaucoup de larmes. Puis, sous le regard imperturbable de la Lune qui poursuit sa course, les petits groupes se défont et chaque personne repart en emportant un petit morceau de cette soirée du 12 juillet 2013. Restent les messages d'espoir, d'amour et de solidarité accrochés à la clôture. Personne n'a idée de les décrocher. Pour ne pas oublier.

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