Adaée Beaulieu, Le Journal des citoyens, Prévost, juillet 2013
«Serge Bouchard ce n’est pas juste un conteur. Quand on a fini de l’écouter, on n’a pas juste appris, on a vécu quelque chose. » Cette phrase du député de Laurentides-Labelle, Marc-André Morin, a réellement pris un sens pour les nombreux auditeurs qui ont assisté à la conférence du passionné d’histoire le samedi 13 juillet au Chalet Pauline-Vanier de Saint-Sauveur.
Cet anthropologue a développé depuis son enfance une curiosité pour le territoire québécois et ses habitants, qu’il veut transmettre aux personnes qu’il rencontre. Ayant grandi dans l’Est de Montréal au coeur des raffineries de pétrole, Serge Bouchard a rapidement idéalisé le territoire en croyant ardemment que « là où c’est sauvage, c’est beau ». Il s’est donc intéressé à l’histoire des régions du Québec qui sont nées au coeur de la nature comme les Laurentides.
Dans son exposé de deux heures, Serge Bouchard a présenté avec justesse et enthousiasme l’évolution de ce territoire au nord de Montréal, et ce, sans aucune note devant les yeux. Il a d’abord permis à ses auditeurs attentifs de réaliser la richesse des ressources naturelles qui se trouvent dans les Laurentides. Par exemple, il a mentionné que les roches que l’on retrouve dans la région sont parmi les plus anciennes du monde.
Il a aussi noté, qu’avant l’arrivée des compagnies forestières au XIXe siècle, les Laurentides étaient le « paradis des arbres ». En fait, la couverture forestière originale était composée de forêts mixtes dominées par des conifères comme l’épinette et le pin blanc.
Malheureusement, comme l’a indiqué M. Bouchard, ces arbres n’existent plus aujourd’hui. En fait, cet homme aux connaissances inouïes a raconté que des riches Écossais qui vivaient à Montréal ont décidé d’abandonner l’industrie du castor et de se recycler dans le bois et les chemins de fer. « Les vrais coupables de la coupe c’est la société bourgeoise», a-t-il souligné avec ferveur avant d’expliquer que celle-ci expédiait le bois en Angleterre pour la construction navale.
Serge Bouchard a ensuite introduit des personnages à son récit. Déjà, au début de la conférence, il avait souligné que le territoire était occupé par les Algonquins. Toutefois, à ce moment précis, il a parlé plus en détail du sort qui leur a été destiné lors de la colonisation. En fait, lors de la confédération en 1867, il a été entendu que « la nature est aux provinces, mais les Indiens sont au fédéral ». Ce dernier a donc mis en place la première réserve en 1852, celle de Maniwaki, pour tous les Algonquins des Laurentides et de l’Outaouais. Ce sont les colons qui ont pris leur place et qui ont vécu dans des conditions pénibles. « Les gens se sont tués à faire des lots. Les colons sont des sacrifiés », a affirmé l’anthropologue en rappelant au public l’histoire de Séraphin et l’échec de l’agriculture. « Dans les Laurentides, le rêve n’a pas duré longtemps », a affirmé Serge Bouchard.
En guise de conclusion à cette histoire accrocheuse, le conférencier a indiqué que les Laurentides ont changé de vocation à partir de ce moment. « Dans les années 1950, le Nord devient le terrain de jeu des petits Canadiens-français », a-t-il raconté. Puis, ce sont les Étasuniensqui s’accaparent le territoire. Selon Serge Bouchard, ce changement n’a pas été positif. « Plus c’est touristique, plus tu t’amuses et plus tu investis, moins la nature a de droits », a-t-il affirmé.
Par le biais de ce survol historique, M. Bouchard a voulu passer un message. C’est donc sur ces mots qu’il a laissé les auditeurs qui étaient suspendus à ces lèvres : « Tout notre rapport au monde en est un de sensibilité. Il ne faut pas que le silence demeure pour toujours. Il faut raconter notre histoire à nos enfants. »