Anne Bonnefont, porte-parole des sans-voix

Ludivine Maggi, L’Itinéraire, Montréal, le 15 juillet 2013

Anne Bonnefont aime les défis. À peine arrivée au Québec, elle est devenue la nouvelle coordinatrice du Réseau solidarité itinérance du Québec (RSIQ). Consciente de sa responsabilité de représentation des itinérants auprès des institutions politiques, elle s'est donnée comme mission de ne pas les décevoir.

«En France, j’étais dans le secteur associatif. Quand je suis arrivée ici, il y a un peu plus d'un an, j'ai voulu poursuivre dans la voie du communautaire», raconte Anne Bonnefont. Forte de ses expériences au sein du Secours catholique et de l'Unicef en France, la jeune femme voulait poursuivre sa carrière dans des domaines similaires au Québec, «Je veux faire une différence pour la terre qui m'accueille, explique la coordinatrice. J'ai envie de m'investir dans quelque chose qui a un sens et de savoir pourquoi je me lève le matin.»

C'est en arrivant à Paris que la jeune femme a été sensibilisée à la problématique de l'itinérance. Choquée par le nombre de sans-abri et frappée par l'indifférence des gens, elle a commencé à réaliser des tournées, la nuit avec des organismes pour aller à leur rencontre.

Au-delà de son attirance pour la cause de l'itinérance, c'est sa volonté d’influencer la politique qui anime Anne Bonnefont. Sa mission au sein du RSIQ est d'effectuer le lien entre la rue et les sphères politiques provinciales et fédérales.

Afin de recenser les différents visages de l’itinérance et les solutions à y apporter, elle se déplace souvent en région. «Nous voulons faire connaître toutes les sortes d’itinérance. En région, elle a un autre profil. Par exemple, les sans-abri vont d'un logement à un autre, dorment dans leur voiture ou sur le canapé d'amis», remarque la coordinatrice.

 

Vers une politique en itinérance

 

Cette situation pourrait bientôt changer. Organisé le 17 et 18 juin dernier à Montréal, le Forum de consultation sur le projet de Politique nationale en matière d’itinérance a réuni 64 organismes et la ministre déléguée aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse, Véronique Hivon, pour établir ce projet.

Depuis 2006, la RSIQ milite pour voir émerger une telle politique. «Quand Pauline Marois a annoncé la mise en place de ce projet il y a eu certes énormément de joie, mais aussi beaucoup d'attentes, explique Anne Bonnefont. C’est l'aboutissement d'un projet prévu depuis sept ans. Nous estimons que les choses vont dans le bon sens. Mais le texte n’est qu'un projet, il doit encore être bonifié.»

Pour parvenir à une telle Politique, le RSIQ siège dans le comité d'experts réuni depuis janvier dernier et a un mandat d'aviseur sur l'élaboration du contenu. À la suite du forum, la prochaine étape sera l'adoption du texte en fin d'année, puis la mise en place du premier plan d'action au printemps 2014.

La victoire est de courte durée. Le RSIQ travaille maintenant à défendre la Stratégie de partenariats de lutte contre l’itinérance (SPLl). Le budget fédéral 2013 prévoit une nouvelle réorientation du financement donnant la priorité au «logement d'abord». Le programme vise à fournir un logement par l'intermédiaire du secteur privé aux personnes itinérantes accompagnées d'un soutien. «Cette décision ne concerne qu'un seul type de personnes, celles qui vivent tout le temps dans la rue, regrette la coordinatrice. Sortir de l'itinérance n'implique pas seulement un logement, mais aussi une quantité d'autres services.»

À ce jour, la RSIQ a obtenu le soutien de partis politiques, notamment du Nouveau parti démocratique (NPD), et un appui unanime de l 'Assemblée du Québec pour faire appel de cette décision.

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