Élections 2012 : Une hypocrisie malsaine

Vincent Di Candido, Échos, Montréal

À chaque élection, c’est immanquable. On assiste à un curieux spectacle : des politiciens désespérément en manque d'attention essaient par tous les moyens de nous convaincre de leur rigueur et de leur droiture morale en enchaînant des déclarations plus fantaisistes les unes que les autres.

Pour atteindre leur but, ils attaquent des candidats de valeur du camp opposé en les dépeignant injustement sous des traits défavorables. En plus de ne convain cre personne, cette tactique est malsaine et dégrade le débat public.

C'est ce qui s'est produit récemment avec le candidat à l'investiture péquiste dans Borduas, l'ex-journaliste de Radio-Canada Pierre Duchesne. M. Duchesne, journaliste d'expérience qui a cumulé près d'une trentaine d'années à la Société d'État et qui a signé une importante biographie de Jacques Parizeau, a été accusé de manquer d'intégrité journalistique dans un geste d'une rare violence partisane de la part du PLQ, qui a déposé une plainte au Conseil de presse et à l'ombudsman de Radio-Canada.

La candidature du blogueur et chroniqueur influent Jean-François Lisée a suscité elle aussi son lot de réactions outrées chez des Libéraux, bien que de moindre envergure.

Les Libéraux, avec le premier ministre Jean Charest en tête, crient au scandale et affirment que M. Duchesne a contrevenu aux règles de déontologie. L'accusation ne tient pas et ne repose sur aucune preuve sérieuse. M. Duchesne est un journaliste reconnu par ses pairs depuis de nombreuses années. Tant que les journalistes respectent les principes déontologiques dans l'exercice de leurs fonctions, on ne peut les empêcher d'avoir des allégeances et de se lancer en politique s'ils le désirent, une fois bien sûr leur carrière mise entre parenthèses.

Refuse-t-on aux professeurs d'université, qui doivent eux aussi respecter une éthique de la neutralité, le droit de se lancer en politique sous prétexte qu'avoir des allégeances politiques serait contraire à leur métier ? Il y a des limites à l'hypocrisie partisane.

L'hypocrisie consiste aussi à prendre les citoyens pour des naïfs qui ne savent rien du jeu politique. La population sait très bien que, dans le passé, la profession de journaliste a fourni d'excellents candidats qui ont brillamment servi le Québec : pensons à René Lévesque, le plus connu d'entre eux. Plus près de nous, citons Claude Ryan, Bernard Drainville et Christine St-Pierre.

Le PLQ aurait avantage à regarder dans sa propre cour avant de parler d'éthique. Le processus douteux d'octroi des contrats gouvernementaux qu'est en train d'étudier la Commission Charbonneau, ou encore le passage rapide d'ex-ministres dans des entreprises privées (par exemple : l'ex-ministre de la Santé Philippe Couillard), soulèvent de sérieuses questions de conflit d'intérêt. Mais cela, M. Charest s'est bien gardé de le rappeler.

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