Cimenterie de Port-Daniel : entrevue avec le promoteur

Cimenterie de Port-Daniel : entrevue avec le promoteur

Antoine Rivard-Déziel, Graffici, Gaspésie, 29 juin 2012

 

Alors que les groupes environnementalistes demandent à ce que le projet de cimenterie à Port-Daniel soit soumis à des études environnementales indépendantes, plusieurs élus municipaux de la Gaspésie souhaitent qu’il fasse l’objet de rencontres publiques. Le promoteur du projet, Gisement McInnis, n’est pas convaincu. Son porte-parole, Denis Boucher, fait le pari que l’entreprise peut démontrer que la cimenterie sera un modèle de «performance environnementale» sans passer par une évaluation du BAPE et des séances publiques. Entrevue.

Comment pouvez-vous garantir un minimum d’impacts environnementaux ?

Nos choix technologiques ne sont pas encore arrêtés. Par contre, nous sommes en discussion avec plusieurs équipementiers afin d’obtenir les meilleures performances sur le plan environnemental. Nous souhaitons que la cimenterie devienne un modèle en Amérique du Nord. Pour profiter du marché convoité, la côte est américaine, nous devrons nous plier à des normes environnementales très strictes qui entreront en vigueur aux États-Unis en 2013. Les Américains ont tendance à être protectionnistes, alors si nos installations ne répondent pas à leurs normes, ils taxeront nos produits. Par ailleurs, le ministère de l’Environnement suit notre projet à la trace. Je peux vous dire que ses représentants n’ont pas mis de gant blanc pour nous demander de mettre à jour notre étude d’impact environnemental. Pour nous, l’enjeu est trop important. Il n’est pas question d’escamoter quoi que ce soit.

Plusieurs groupes environnementalistes s’inquiètent des émanations polluantes provoquées par les combustibles qui serviront à chauffer le calcaire. Que leur répondez-vous ?

Ce qui rentre dans le four, c’est une chose, mais le plus important est ce qui en ressort. Si nous brûlions des graines de lin dans un four qui ne serait pas équipé des meilleurs filtres et que la combustion était mal contrôlée, il y aurait quand même des émanations polluantes. L’idée est de se munir de filtres à la fine pointe de la technologie. Et c’est ce que nous ferons. Pour le combustible, nous utiliserons le coke de pétrole, soit un sous-produit du raffinage du pétrole, ce qui est beaucoup moins polluant que du charbon. Nous pourrions aussi envisager d’autres combustibles, comme des pneus ou des déchets. Quoi qu’il en soit, pour chaque combustible que nous utiliserons, nous devrons obtenir un permis du ministère.

Si votre projet est à ce point novateur sur le plan environnemental, pourquoi ne pas en faire la démonstration publique en organisant des rencontres avec la population ?

Je comprends très bien le désir des citoyens de mieux comprendre, d’avoir plus d’information. Mais la rencontre publique est un mode de communication dépassé qui ne permet pas d’atteindre les résultats que les gens souhaitent obtenir. Dans ce type d’événement, certains prennent trente minutes pour saisir un élément, d’autres trois heures. Certains sont gênés de poser des questions pertinentes, alors que d’autres ne se gênent pas pour poser des questions absolument pas intéressantes. Communiquer avec le public est une priorité, mais la rencontre publique n’est pas une formule qui le permet. Récemment, en collaboration avec entre autres le Conseil régional de l’environnement, la MRC du Rocher-Percé, le maire de Port-Daniel et des pêcheurs de homard, nous avons mis en place un comité de suivi. Nous jugeons que cette formule, qui assure un lien direct et constant entre le promoteur et les intervenants du milieu, permet une meilleure communication avec les citoyens, comparativement à des rencontres publiques. Nous reconnaissons que les gens qui siègent sur ce comité forment un cercle restreint, mais, en même temps, ils représentent des milliers de personnes de différents milieux.

Un des principaux attraits de Port-Daniel est son paysage. La construction d’une cimenterie et d’un terminal maritime viendra-t-il le gâcher ?

Cette préoccupation est tout à fait légitime. La situation géographique du site de la cimenterie nous permet cependant de dire que les impacts sur le paysage seront minimes. La cimenterie sera construite sur un territoire enclavé peu visible du village. De la route 132, les gens apercevront le bout de la tour de préchauffement, tout au plus. De plus, il faut savoir que le terminal marin n’est pas un gros bloc de ciment. Il s’agit plutôt d’une suite de dix pylônes à travers lesquels un tuyau hermétique passera. D’une longueur totale de 500 mètres, il est certain qu’il fera partie du paysage de Port-Daniel. Par contre, le transport par bateau est plus écologique que le transport par camion. Par exemple, un chargement de bateau équivaut à 4 000 voyages de camions.

classé sous : Non classé