« Le rêve d’Ozanam » à Montréal

Julie Delvaux, L’Itinéraire, Montréal, le 15 janvier 2012

Au rez-de-chaussée du bâtiment de la Société Saint-Vincent de Paul (SSVP) de Montréal, sur la rue Champlain, en plein milieu de la matinée, des dizaines de personnes cherchent la perle rare: du linge, des meubles, des décorations de Noël… Tout ça à un prix modique. Parmi les rayons de ce comptoir de dépannage, Lucie Alègre se fait saluer chaleureusement par tous les habitués qui semblent bien la connaître. «L'une des plus grandes souffrances engendrées par la pauvreté est le sentiment d'exclusion et de solitude», souligne la directrice générale de la SSVP.

La SSVP de Montréal, c'est avant tout 1 400 bénévoles qui viennent en aide aux plus démunis. La Société offre des services de dépannage alimentaire, de référence, de réinsertion et de soutien aux personnes dans le besoin. Et Lucie Alègre insiste pour dire que son organisation n'apporte pas seulement une aide matérielle, mais aussi et surtout un soutien psychologique.

Selon Mme Alègre, les bénévoles effectuent un travail d'écoute et de communication indispensable. «Il est essentiel d'intervenir sans porter de jugement», insiste Mme Alègre. Pierre Portelance, bénévole très impliqué, ne compte pas ses heures, et ce, depuis 14 ans : « J'aime beaucoup ça, c'est tellement valorisant de pouvoir aider les gens!» Le soutien apporté par la SSVP est adapté à chaque personne en difficulté. «Il est important de bien cerner le problème d'une personne afin de mieux répondre à ses besoins, explique Mme Alègre. On est connectés avec de nombreux organismes communautaires pour donner le plus de chances possible aux gens de s'en sortir.»

Depuis quelques années, l'éducation, la scolarité et les activités parascolaires se retrouvent au coeur des interventions de la Société Saint-Vincent de Paul afin de briser le cycle de la pauvreté. Mme Alègre se souvient d'une anecdote marquante qui a eu lieu lors d'un gala récompensant les élèves ayant accompli des efforts : « Je me suis adressée aux enfants en leur disant qu'ils devaient avoir confiance en eux parce que nous avions confiance en eux, raconte la directrice. À la fin du gala, un jeune garçon de neuf ans est venu me serrer la main en me disant :  Madame, je vais faire ce que vous avez dit. J'en ai encore des frissons lorsque j'y repense!»

La SSVP, qui est sur le point de fêter ses 165 ans d'existence, a établi ses valeurs en accord avec la société dans laquelle elle évolue. «Montréal est une ville cosmopolite et il est essentiel de prendre en compte cette réalité», explique Mme Alègre. Ainsi, l'organisation a délaissé ses origines chrétiennes pour devenir laïque. «Nous tenons à garder une grande ouverture pour aider tous les gens qui en ont besoin», insiste-t-elle.

Présente dans 144 pays, la SSVP a été créée en 1833 à Paris par un jeune homme de 20 ans, Frédéric Ozanam, qui souhaitait secourir les plus démunis. « Les 1,5 million de bénévoles à travers le monde sont une belle preuve de réussite, concède la directrice. Je suis impressionnée par leur dévouement.» Au fil de la discussion, Mme Alègre confie d'ailleurs que son grand-père était lui-même bénévole pour la société : «Lors des repas de famille, il nous répétait souvent que nous étions privilégiés, car nous avions la chance de pouvoir manger à notre faim», se souvient-elle.

Toutes ces interventions sont rendues possibles grâce aux dons que reçoit la SSVP dans les 100 points de service situés principalement dans les quartiers défavorisés de Montréal.

classé sous : Non classé