Elie Benchetrit, La Voix sépharade, Montréal, décembre 2011
Depuis quelques mois c'est une femme, la première à Montréal et la deuxième en Amérique du Nord à diriger une grande fédération de la communauté juive. C'est dans son bureau que nous l'avons rencontrée afin d'en savoir davantage sur elle.
Déborah est une montréalaise qui a commencée par s'intéresser à la musique. Elle est d'ailleurs détentrice d'un baccalauréat dans cette discipline de l'Université McGill. Elle se rend compte cependant qu'elle a besoin d'élargir ses horizons et en 1981, elle quitte Montréal pour aller étudier le Droit à Toronto où elle obtient le diplôme qui lui permet de s'inscrire au Barreau de l'Ontario. Cependant, elle ne se considère pas prête pour affronter le marché du travail. Elle décide de s'inscrire à l'Université Columbia où elle obtiendra une maîtrise en Droit constitutionnel, Droit comparatif et Droits de la personne.
De retour au Canada en 1987, elle obtient un poste au Ministère de la justice à Ottawa et se passionne pour le Droit des Autochtones. Elle y demeure 8 ans, ce qui lui donne l'occasion de rencontrer celui qui deviendra son mari, M. Maurice Tovel, le frère de Michel Abitbol, professeur à l'Université Hébraïque de Jérusalem et spécialiste de l'histoire des juifs du Maghreb.
En 1995, c'est le retour à Montréal qui lui donne l'occasion de revenir à la communauté en s'engageant comme bénévole à la JlAS (dossiers d'immigration), puis lors de la fusion de JlAS et de Baron de Hirsch, de devenir vice-présidente d'OMETZ. « Le bénévolat m'a littéralement changée» nous confie-t-elle. En effet, cette remise du pied à l'étrier, lui fait redécouvrir sa communauté et ses diverses problématiques et l'amène tout doucement à reprendre du service, cette fois-ci comme professionnelle, à la tête de la Fédération CJA.
Déborah est consciente de la complexité des problèmes auxquels fait face notre communauté. Elle est nouvelle et nous avoue avec humilité qu'elle « a beaucoup à apprendre et que ce sera un long chemin à parcourir pour réaliser ses objectifs.» Elle souhaite de tout coeur – puisqu'elle s'adresse à un médium sépharade – que nous nous acheminions vers une communauté juive unie, une communauté qui, tout en gardant sa riche diversité culturelle, puisse affronter les défis importants qui nous attendent. Il s'agit là des changements démographiques et sociologiques qui touchent notre communauté en ce début de siècle et pour être plus précis, d'une population vieillissante, du sens de l'appartenance des jeunes à cette communauté et du renforcement de l'identité à travers l'éducation juive auprès de ceux-ci.
La Fédération CJA, par le biais de Gen J, a commencé à s'attaquer à ce problème en assistant les classes moyennes de notre communauté qui ont des difficultés à défrayer les coûts élevés des écoles juives. Les camps d'été qui constituent l'antichambre de l'engagement et du sens d'appartenance à la communauté, devraient attirer, grâce à des aides accordées à ces mêmes familles, un plus grand nombre de jeunes. Il est impératif donc de disposer de fonds pour financer ces projets. Déborah nous informe également que d'après des sondages réalisés au sein de notre communauté, un certain nombre de personnes se disent non-affiliées aux institutions communautaires et que par conséquent, il est impératif de les y attirer:
Pour résumer la situation, Déborah nous rappelle que David Cape, le nouveau président en exercice de la Fédération CJA et elle-même sont déterminés à cibler les grands défis à relever et, entre autres: Renforcer et mettre l'accent sur la langue française dans tous les projets et programmes culturels entrepris, et plus particulièrement au sein de nos écoles. Pourquoi pas, nous dit-elle, organiser un « Morch of the living» en français? Viser l'excellence dans nos écoles juives. En last but not least, augmenter les fonds de donation – les grands donateurs n'étant qu'un petit nombre – en sensibilisant ceux qui ne le sont pas encore à l'importance de ce geste, le seul qui garantit la pérennité et la vitalité de toute une communauté.