Hélène Bayard, Autour de l’île, île d’Orléans, février 2011
Le 18 janvier dernier, le Regroupement de citoyens pour la protection de l’île d’Orléans a déposé son mémoire, contresigné par plus de 500 personnes, devant la Commission parlementaire sur la culture et l’éducation. Plutôt que de se contenter de lire ce document devant les commissaires, les membres du Regroupement ont choisi de développer les arguments qui l’ont inspiré. Les présentateurs du mémoire étaient : Mme Anne-Yvonne Palafray, M. Normand Gagnon, M. Joseph Melançon, Mme Catherine Monna, M. Pierre Lahoud et M. Marcel Barthe.
D’emblée, le Regroupement a invité les commissaires à considérer l’île d’Orléans comme ayant une valeur identitaire nationale, soutenu par le fait qu’il s’agit du plus important site historique classé de la province.
Le projet de loi 82, Loi sur le patrimoine culturel, consacre l’idée de considérer le paysage comme un patrimoine au même titre qu’un site ou un monument historique. Mais là où le bât blesse, selon le Regroupement, c’est que ce projet restreindrait le paysage à celui qui se découvre sur le site, excluant de facto ce que le regard embrasse à partir du site même. Cela revient à dire que l’environnement de l’île d’Orléans, c’est-à-dire le fleuve et les perspectives, ne fait pas partie du paysage.
Le Regroupement propose donc à la commission d’introduire dans la Loi 82 la notion de zone tampon. Il s’appuie pour ce faire sur la Charte d’Athènes (1931), la Charte de Venise (1954) et surtout sur la Déclaration de l’UNESCO (2008) qui stipule : « qu’une zone tampon devait être créée pour inclure l’environnement immédiat du bien proposé pour l’inscription, les perspectives visuelles importantes et d’autres aires ou attributs ayant un rôle fonctionnel important en tant que soutien apporté au bien et à sa protection. L'espace constituant la zone tampon doit être déterminé au cas par cas par des mécanismes appropriés. » S'appuyant sur ces recommandations, le Regroupement a proposé : « Que la notion de zone tampon apparaisse dans le texte de la Loi 82 et soit formulée selon les orientations de l'UNESCO… et que les sites patrimoniaux déclarés, incluant évidemment l'île d'Orléans, bénéficient de cette zone tampon. »
Devant cette proposition, la ministre Christine St-Pierre s'est interrogée sur la façon de circonscrire cette zone tampon ; quelles limites géographiques devrait-elle avoir ?
M. Marcel Barthe a suggéré ceci : « Plutôt que de se cantonner dans un calcul mathématique difficilement applicable à tous les sites, le principe de zone tampon devrait être, un critère que les promoteurs seraient dans l'obligation de : respecter afin de mieux intégrer et harmoniser leurs projets dans le paysage ; en somme, ce serait une obligation au même titre que les études environnementales exigées. »
À la fin de la présentation, le regroupement a soulevé quelques-unes de ses inquiétudes relativement au territoire même de l'île d'Orléans. Entre autres, il trouve peu rassurant de confier aux municipalités, particulièrement celles de très petite taille comme c'est le cas à l'île, la responsabilité unique de la protection d'un site patrimonial. « La rareté des compétences et des ressources humaines et financières risquerait d'entraîner un désintéressement quant à la protection du patrimoine et l'atomisation des prises en charge risquerait à son tour de faire perdre la nécessaire perspective d'ensemble en ce domaine. » (sic), disaient-ils, soulignant à nouveau que l'île avait acquis depuis le décret de 1970 le statut d'élément du patrimoine national. Enfin, le regroupement est d'avis que le Conseil du patrimoine proposé dans le projet de Loi 82 devrait être « doté de pouvoirs décisionnels en matière de protection des patrimoines et des paysages, plutôt qu'être simplement consultatif, un peu à l'image de la Commission sur la protection du territoire et des activités agricoles (CPTAQ) qui a beaucoup contribué à la préservation du caractère particulier de l'arrondissement historique de l'île d'Orléans. »