Lutte en Haute-Gaspésie

Thierry Haroun, Graffici, Gaspésie, mai 2010

De faux espoirs en promesses gouvernementales non tenues, des pertes d’emplois en projets abandonnées, voilà le triste bilan des dernières années de la Haute-Gaspésie, sorte « d’Aurore l’enfant martyre » de la région.

Le 19 mai, le député de Matane, Pascal Bérubé, organise à l’Assemblée nationale une journée consacrée à cette région, dont le chemin de croix n’en finit plus de finir. On ne compte plus les luttes, les manifestations, les déceptions et autres cris du cœur de ces péninsulaires qui refusent de baisser la garde malgré les tempêtes perpétuelles.

Cette journée célèbrera la Haute-Gaspésie par des activités visant à lui accoler une étiquette « positive » en vantant ses forces et ses bons coups. Ce sera aussi une occasion pour les acteurs socio-économiques d’élargir le réseau d’influence de cette région qui souhaite être entendue et considérée par Québec, ce qui ne semble pas être le cas actuellement. Abandonnée ? Mal aimée ? Martyre ?

Le dernier coup bas des libéraux de Jean Charest a été l’annonce de la fermeture prochaine du bureau de la Commission des lésions professionnelles de Sainte-Anne-des-Monts. Deux emplois perdus. Et dire que lors de son ouverture, en 1988, on promettait la création de 15 emplois à terme. Vous avez bien lu, deux emplois perdus. Québec ne leur laisse même pas deux jobs. On coupe à blanc, pas de pitié pour les régions pauvres. Une conséquence directe du dernier budget que la ministre régionale, Nathalie Normandeau, a qualifié de bon pour la Gaspésie. Voilà qui nous rassure.

En réaction, la mairesse de Sainte-Anne-des-Monts, Micheline Pelletier, avait manifesté son « extrême frustration », de voir que Québec « ne nous considère pas ». D’autant plus, ajoutait-elle « qu’on ne devrait pas parler d’occupation du territoire, mais plutôt de dévitalisation du territoire ».

On ne compte d’ailleurs plus les envolées de madame Pelletier, véritable battante comme on en voit rarement en politique. À la suite d’une sortie de Pascal Bérubé en février dernier sur les ondes de CIEU-FM, qui laissait entendre que la Baie-des-Chaleurs était couchottée par la ministre Normandeau, la mairesse soulignait plus largement ceci : « Lorsque je regarde le développement qui se fait présentement à Gaspé, celui de Bonaventure, à Percé même, et que je vois plein de projets qui se réalisent là, alors que nous, on en fait des projets, mais qui n’aboutissent pas ou qui aboutissent extrêmement difficilement après de longues luttes incessantes, moi, j’en conclus que nous ne sommes pas considérés ! »

En décembre 2002, pour sauver la face de son gouvernement, et malgré la volonté de la majorité de fermer Murdochville suivant la fin des activités minières, le gouvernement péquiste de Bernard Landry décide d’implanter le centre d’appels de la SAAQ à Murdocheville plutôt qu’à Sainte-Anne-des-Monts tel que promis au départ. Le ruban rouge sera d’ailleurs coupé par les libéraux en 2003. Le maire de Murdcheville de l’époque s’en était indigné, affirmant que « le gouvernement du Québec n’aurait jamais dû agir ainsi. Le simple fait de voler des emplois à la Haute-Gaspésie pour les donner à Murdocheville est un geste que je considère difficile à justifier. Amèrement déçus, eux aussi, de la tournure des événements, les élus de la Haute-Gaspésie remémoraient à M. Landry » qu’alors que les projets fusent de toutes parts, notre MRC demeure la plus démunie et l’une des plus pauvres du Québec. Nous avons sur la table depuis un an des projets de promoteurs qui ont les moyens financiers et qui veulent investir chez nous. Le seul ingrédient manquant, c’est la volonté gouvernementale d’investir dans nos projets ».

Aujourd’hui encore, La Haute-Gaspésie cherche à se faire entendre et à être considérée à sa juste valeur par Québec. Mais comment ? À ce titre, Pascal Bérubé a une formule qui n’est pas sans intérêt. « Pour être mieux entendu, il faut que le message soit entre le misérabilisme et le jovialisme. »

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